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L’essence du Grand Nord

Par Martine Laval

Elisapie Isaac

Festival Manitou. 14 au 16 juillet.
Domaine Saint-Bernard à Tremblant.

 

Dans le cadre de la première édition du Festival Manitou qui célébrera les cultures autochtones du 14 au 16 juillet, Elisapie Isaac offrira un spectacle le vendredi soir au Domaine St-Bernard de Mont-Tremblant. Enfant du Grand Nord québécois vivant à Montréal, fille d’une mère inuk et d’un père terre-neuvien, elle retourne régulièrement à Salluit renouer avec ses racines et se ressourcer dans sa culture. Chanteuse, musicienne et cinéaste, la musique l’habite, le chant l’exprime, ses origines la nourrissent. Rencontre avec une femme imprégnée de sa source.

 

Que représente pour vous le Festival Manitou, Elisapie?

Le festival permet de remettre les autochtones dans leur contexte, sur leur territoire, puisque c’est majoritairement des Québécois qui demeurent à Tremblant, ancien territoire ancestral autochtone, et de leur donner une plateforme pour vivre leur art et leur expression artistique.
Je trouve tellement important, en 2017, de retracer ces lieux, de rafraîchir la mémoire, l’image, avant même le dialogue.
La première édition du festival va permettre d’entendre plusieurs artistes et de voir des œuvres magnifiques d’artisans autochtones.
Pour moi, c’est très significatif de faire partie de cet événement qui prend place sur des lieux sacrés vibrants d’histoire.
Il se passe actuellement une montée positive des peuples autochtones qui désirent reprendre le plein pouvoir de leur propre existence sur ce territoire québécois qui leur appartenait bien avant l’arrivée des Blancs.
Oui! Et la première chose qui me vient en tête est qu’on nous écoute! Pour la première fois de l’histoire, on a un public!
On sent qu’on a envie d’en connaître plus sur nous. Les gens se sentent concernés par toute cette haine, cette injustice que les peuples autochtones ont vécues.
De savoir qu’on veut nous écouter est immense. Ça fait beaucoup de bien aux jeunes qui ont envie de s’exprimer au nom de leurs parents et des générations précédentes qui ont été traumatisés et ne peuvent pas encore vraiment parler de leurs souffrances.
On a ce privilège et cette responsabilité en même temps de « brasser » l’histoire tout en faisant attention aux mots et à la façon dont on veut récupérer notre place et guérir.

Bien que tu sois née au Québec, tu ne te dis pas québécoise, mais inuk (du peuple inuit).

Depuis 20 ans que je demeure à Montréal, on ne m’a jamais fait sentir comme une Québécoise, mais comme une fille du Grand Nord, non francophone.
Je crois que lorsque le peuple québécois francophone sentira vraiment une appartenance et voudra s’exprimer également avec le peuple autochtone, c’est là qu’on pourra parler d’une même tribu vivant dans la même province. Mais je pense qu’on n’est pas encore rendus là.
Pour moi, être québécoise est une importante cause identitaire des Québécois francophones. J’adore cette culture, mais je ne m’y suis jamais sentie incluse parce que je suis autochtone. Ce n’est donc pas naturel pour moi de dire que je suis québécoise.
J’ai une culture tellement forte, une identité tellement importante par rapport au territoire que je ne pense même pas à la notion de province de Québec. On est ici depuis tellement longtemps, avec notre propre identité. En fait, je suis inuk du Nunavit qui vit à Montréal, qui se trouve dans la province de Québec au Canada.

Que présenteras-tu lors de ton spectacle au Festival Manitou?

Comme c’est un festival qui présente la culture autochtone, je vais offrir un spectacle qui permettra aux spectateurs de voyager dans cet univers-là.
Mon prochain album qui sortira l’hiver prochain est plutôt un retour aux sources, alors j’ai envie de chanter mes nouvelles chansons en plus de quelques autres de mon répertoire qui vont bien dans le contexte.

Un mot de la fin Elisapie?

Venez en grand nombre au festival! Je crois que les gens des Laurentides y seront très sensibles. C’est un festival pour tout le monde et on aime que les gens viennent à notre rencontre. On parle de réconciliation, alors ouvrons nos bras et apprenons à nous connaître, à nous respecter, à nous apprécier. On a tous la responsabilité de se dire qu’on se rencontre pour le bien des cultures, le bien de notre identité québécoise. On ne peut plus ignorer l’existence des peuples autochtones et ce festival est une belle occasion d’aller à la rencontre les uns des autres. Ça va ouvrir des conversations par la suite, et c’est là que le dialogue prendra place.

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1 Comment

  1. Michel Kieffer

    Bel et bon article Mme Laval.
    Toujours un plaisir de vous lire
    Michel Kieffer Photographe.

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