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Mode: la nouvelle saison

Par Éric-Olivier Dallard

Après d’interminables palabres autour de la question, de lignes ouvertes un rien hargneuses, d’attaques irrévérencieuses à l’égard de l’irrévérence «des jeunes» à l’école, les décisions courageuses (sic) tombèrent il y a quelques années: dorénavant, nos rentrées scolaires verraient le retour de l’uniforme dans nombre de nos écoles. Il en fut de même du vouvoiement il y a deux ans plus tard.

En cette rentrée 2008 l’on s’étonne de la hausse considérable de demandes d’admissions dans des établissements privés?! Mais voyons donc: il ne s’agit que de la suite logique de la course du balancier amorcée très exactement au moment des premières discussions autour du port de l’uniforme, quoi d’autre? L’on parlait tout le temps d’irresponsabilité de la jeunesse au cours de la dernière décennie; on en est maintenant à l’irrévérence. Plus les problèmes semblent s’aggraver, plus notre société bien-pensante dénonce les petites choses.

Le plus intéressant dans la réflexion qui a mené les écoles à décider de ce retour aux uniformes et aux formules de la politesse, est le constat que l’habit, comme la langue, transforme les êtres et les rapports aux êtres. Troublant tout de même, que ce constat de l’échec de toute(s) cette (ces) (r)évolution(s) des années 1970. L’abandon de l’uniforme et le tutoiement étaient d’entre elles, qui s’inscrivaient dans l’état d’esprit de cette époque voulant libérer de tout, tous. Et aujourd’hui l’on s’indigne dans la confusion sur le manque de respect de la jeunesse pour les représentants de l’autorité, pour les mentors, pour les directeurs, pour les personnes-âgées-dans-les-autobus-auxquelles-on-ne-cède-pas-la-place. On s’indigne sur la familiarité déplacée qui teinte tous les échanges. Et aujourd’hui l’on s’indigne dans la confusion sur le manque de respect de la jeunesse pour la jeunesse.

Et aujourd’hui l’on s’en prend à cette jeunesse que l’on n’a pas su modeler convenablement. Sur cette jeunesse à laquelle aucun modèle n’a été offert. Les publicistes s’en sont alors chargé avec bonheur, éduquant à coup d’idoles frivoles et de révolutionnaires de pacotille.

Les strings à l’école, comme le tutoiement, sont les exactes représentations de cette libération irréfléchie.

Un assourdissant affranchissement qui dérape

Que des universitaires, des intellectuels, des penseurs aient pu être à ce point aveugles, tous au même moment, donne le vertige. Par exemple, comment pouvait-on adhérer à l’idéologie communiste avec tant de ferveur, alors que l’on n’en connaissait à peu près rien? Comment a-t-on pu demeurer aveugle et sourd quand les premiers témoignages sur les atrocités de ce système politique ont commencé à affluer? C’était l’époque où la gauche rougeoyante du rouge communiste, marxiste, léniniste, maoïste, trotskiste, omniprésente, omnipotente, corrompait les esprits. Sérieusement, avez-vous jeté un oeil au fameux «livre rouge» de Mao? Étaler autant de conneries en si peu de pages, il est là l’exploit de ce bouquin. Quels abrutis que ceux-ci qui traitaient d’abrutis ceux-là qui n’adhéraient pas à ces idées. L’Histoire a donné raison aux seconds. Mais, à l’époque, les premiers faisaient la loi. Les affranchis intempestifs de ces années sont maintenant revenus de leur sacro-saint affranchissement. Un peu penauds, quand même. Et frileusement ils décident de remettre le tutoiement au goût du jour. Après qu’ils aient lapidé Aron et déifié Sartre, après le rouge sanglant du communisme et de ses goulags, après le rouge absurde et sectaire du livre de Mao, je leur souhaite le rouge incandescent et cramoisi de la honte. Une image me revient. C’est mon premier jour de classe. La maîtresse d’école s’adresse à nous tous, nouveaux élèves: «Alors, tu prends ton crayon et tu prends un cahier Canada…» Au milieu de tous, je me demande quelques instants à qui donc s’adresse ce «tu»…

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