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Faut des couilles en maudit!

Par Josée Pilotte

J’aime ma job.

C’était par un bel après-midi d’été, ensoleillé comme les sourires et les paroles qui nous échangions nonchalamment, sur la terrasse du sympathique et gastronomique Benevento de Saint-Sauveur…
«Eric Nicol! Ça va?»
– (…)

Dans le monde des communications, on communique… on se respecte j’veux dire!

Un drink «scotch, jus de canneberge blanc avec zeste de seven-up et dans le rôle du fruit défendu: une somptueuse mûre déposée, comme un trésor au fond de la mer.»

J’vous donne-tu le goût là? Les filles de Sex and the City peuvent aller se rhabiller avec leur «Manhattan»; ce qui est «in» maintenant c’est le «scotch-canneberge» de Francine et Jackie, les charmantes proprios du Benevento.

Nous, les médias laurentiens, étions chaleureusement invités cet après-midi-là à découvrir le nouveau menu-tapas joliment concocté par le jeune chef Jonathan Ranger… décidément l’âge n’a rien à voir avec le talent! Je vous suggère d’ailleurs fortement ce nouveau menu du Benevento, tout aussi plaisant au regard qu’au palais… on se serait presque cru à un chaud après-midi d’été, notre verre de blanc frais à la main, dans une tiède villa de la Costa Brava. La totale!

Nappes blanches, discussions légères, cœurs à la fête… j’me serais pensée, un bref instant, entourée de mes amis intimes… Comme quoi, une bonne table et du bon vin font joyeusement disparaître un esprit compétitif comme le mien! Dans l’état festif où nous étions, j’en oubliais presque la personne assise face à moi, discutant l’air dégagé, un verre de blanc à la main… et qui s’apprêtait à réaliser son rêve le plus grand mais sur- tout le plus fou: Michel, le quinquagé- naire, deviendra sous peu Michel-L-E. Définitivement.

Oui, j’en oubliais presque son ex-conjointe assise à ses côtés, l’air un peu résigné, une légère pointe d’amertume dans la voix, nous écouter nous réjouir, sans réserve, du bonheur de Michelle, son mari. L’indignation cette journée-là, n’était pas au rendez-vous, elle n’était surtout pas au centre de nos préoccupations à nous les «bobos», bourgeois-bohèmes. Moi non plus, je ne m’indignais pas… mais pourtant je ne pouvais m’empêcher d’imaginer les réactions vives et les discussions interminables si un jeune homme beau, bien dans sa peau, 29 ans, professionnel, sportif, indépendant et sociable avait lancé, l’air de rien: «Moi, franchement, j’vais vous dire: j’me «réserve» pour la femme de ma vie. Non! J’ai toujours pas fait l’amour avec une femme, c’est un choix que j’ai fait et je m’assume entièrement!»

Wow! Kessé-ça? J’entends presque les commentaires indignés!!!!

Hey! Mais on est où là?!

Y’en a un qui va devenir une, ici, à notre table – y va se faire enlever l’engin, bordel! – et nous, on continue de manger notre truite comme si de rien n’était; pis l’autre qui nous dirait vouloir garder sa virginité à 29 ans… on s’étoufferait probablement!

On est-tu drôles, hein?!

Les tabous ont complètement changé «boutte-pour-boutte», comme si les vrais «weirdos» ben, aujourd’hui, c’était les «straits»; on est-tu assez fuckés, merci!

Fuckés?

On ne s’indigne pas devant le ministère de l’Éducation quand il envisage de ne plus considérer les fautes de français dans les examens de… français (!) de nos enfants… mais notre «super Mario» quant à lui s’indigne en première page des quotidiens (et entend même déposer un projet de loi) sur le doublage des films étrangers. Wow! Mais quel enjeu social! Personnellement, j’aime mieux que ce soit doublé ici, mais ce que je veux, c’est voir «Shreck» en français, point!

J’aime bien mieux voir mon gouvernement défendre la qualité de notre langue dans nos écoles et savoir que mes fils ne finiront pas leurs études illettrés… que de le voir déchirer sa chemise sur la place publique pour des films.

Oui, nos valeurs ont pris une drôle de tournure… J’me disais tout ça à cette table, par ce bel après-midi printanier, mon verre de blanc à la main, alors que nous nous réjouissions d’être là.

J’me disais tout ça mais j’me disais surtout que Michelle était bien chanceuse d’avoir une «ex» comme la sienne, justement là à ses côtés. Parce que moi, je ne sais pas ce que j’en pense, de tout cela; mais par contre je sais ce que je pense de cette dame qui a partagé plusieurs années de la vie de «Michel(le)»: qu’au fond, on devrait nous enseigner à être toujours authentique. D’abord envers soi-même. Ça éviterait peut-être que, parfois, l’on mette 50 ans à se découvrir.

Mais.

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