99% d'augmentation de taxes
Par Thomas Gallenne
Nouveau rôle d’évaluation à Sainte-Adèle
Dans la soixantaine, cette résidente a hérité du terrain de 11 000 mètres carrés et des quatre bâtisses de ses parents. Bien qu’elle n’ait pas souhaité alerter les médias ou l’opinion publique sur son cas personnel, elle tente par ses modestes moyens de trouver une solution pour faire face à ce fardeau fiscal. Car le terme dans ce cas-ci n’est pas galvaudé.
Entre l’évaluation de 2012 à 2014 et celle allant de 2015 à 2017, son terrain est passé de 73 400$ à 275 900 $, soit une augmentation de près de 275%, alors que la valeur des bâtiments est passée de 161 400 à 191 100$, soit une «maigre» augmentation de 18,4%.
Au total, les taxes foncières sur la propriété dont la valeur s’établie à 467 000$, s’élèvent à 5 840,81$ soit quatre versements de 1 460,18$. «Avant, je payais quatre versements de 786$ puis en 2014, c’est monté à 804,50$ à cause des vidanges. Je travaille 20 heures par semaine et je ne fais que ça payer des taxes, payer des factures. Je serai bientôt à la retraite et je veux rester chez moi et je veux garder le boisé derrière chez moi. Je ne veux pas vendre», martèle la sexagénaire désemparée.
Une approche purement économique
Sur le territoire de la MRC des Pays-d’en-Haut, c’est la firme Évimbec qui est responsable de l’évaluation foncière. «En gros, il y a deux façons de faire: soit il y a une réévaluation par facteur. On ajoute un pourcentage et tout le monde augmente par secteur ou on recommence à zéro, explique Olivier Rémillard, évaluateur agréé. Dans le cas qui concerne la dame, on parle d’un terrain de grande superficie, en plein centre-ville, dans un secteur zoné multi-logements. Or, le marché se veut un de développement. Nous notre rôle, c’est de déterminer quel va être l’usage le meilleur et le plus profitable.» Ce dernier admet qu’il s’agit là d’une approche avant tout capitaliste et que le facteur «humain» ne peut être pris en considération. «On n’évalue pas l’intention de la personne, à savoir si elle veut demeurer sur son terrain ou non. On évalue l’optimisation de l’emplacement. Et un grand terrain en ville c’est rendu rare.» Et comme dit l’adage: «tout ce qui est rare est cher».
Demande de révision
M. Rémillard rappelle que tout citoyen peut contester son compte de taxes et déposer une demande de révision auprès d’Évimbec. À compter du 1er janvier, les contribuables ont quatre mois pour contester.
Toutefois, qu’est-ce qui peut justifier une telle augmentation? «Le marché se reflète dans les valeurs des propriétés. Dans le cas de la dame, il y avait une sous-évaluation de sa propriété avant 2015», avance l’évaluateur agréé. De plus, il faut considérer le marché qui a connu plusieurs ventes depuis dans le secteur et des projets immobiliers qui se sont développés. Le directeur du service d’évaluation, Robert McCann, ajoute que dans toute demande de révision, le fardeau de la preuve revient toujours au contribuable. Il rappelle au passage qu’il y a bien eu le projet de Loi 4 déposé par l’ancien ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard. Ce projet de loi avait pour objectif de protéger les propriétaires à faibles revenus des hausses importantes de la valeur foncière de leur propriété. Or ce projet de loi est mort au feuilleton, au déclenchement des élections provinciales en août 2012.
«On invite quand même la personne à faire une demande de révision», lancent en cœur les deux évaluateurs. Une invitation qui n’a pas semblé mettre du baume au cœur de la payeuse de taxes qui continuait de chercher des solutions au moment de mettre sous presse. Interrogé sur la question, François Doyon, un citoyen de Sainte-Adèle qui s’est longtemps battu pour que le système d’évaluation foncière soit révisé vers un modèle plus équitable, n’a pas souhaité émettre de commentaires. Bien que se disant très sensible aux iniquités que peuvent vivre certains de ses concitoyens, il dit préférer se tenir loin de ces questions maintenant. Il invite cependant les citoyens qui ont subi des augmentations notables sur leur compte de taxes, à se faire entendre auprès de leurs élus.
De leur côté, la Ville de Sainte-Adèle et la MRC des Pays-d’en-Haut n’ont pas souhaité commenter, avançant que l’évaluation foncière relève strictement de la compétence des évaluateurs de la firme Évimbec. Enfin, le service d’urbanisme adélois avance que le zonage où se situe la propriété dont la valeur a fortement doublé, n’a subi aucune modification récente.