Le secret des dieux

Par Marie-Catherine Goudreau

J’ai bien de la chance, je connais une quantité de gens gentils. Vous savez, ces gens qui tout naturellement vous font sentir Beau, Grand, même quand vous savez pertinemment que, certains jours, vous ne le méritez pas plus que ça. Vous savez bien, de ces gens qui sont plus zen par leur attitude et leur générosité à accepter les autres pour qui ils sont, que ne le seront jamais tous les gourous de la Sérénité au chemin unique. Oui, il y a de ces gens qui t’accompagnent en silence, un silence qui dit tout.

Je me rappelle, lors d’une de mes fameuses «retraites aux jus verts» et autres bizarreries de la sorte, avoir été la cible d’une intervenante euphorique et new-age qui voulait me faire prendre conscience de l’importance capitale de la méditation… et surtout me faire prendre conscience que je m’y prenais très mal en la matière puisque, à ses yeux, je ne pouvais méditer tout en étant dans l’action: pôvre profane!, tu n’y penses pas: méditer tout en faisant son jogging quotidien? Non! Méditer tout en roulant en vélo dans les bois?? Oh que non!! MAIS méditer dans la position du bouddha: O-U-I!. Le nirvana, madame. Je ne connaîtrai donc jamais LA grande Vérité, l’Élévation de mon âme vers la Lumière, ce sentiment de participer au Grand Tout et de se fondre dans l’Univers.

Pourtant chaque semaine, j’ai l’impression de m’en rapprocher un peu plus. Chaque semaine, je suis à même de voir l’éclaircie dans ces éclaircies, cette luminosité nourrissante autant pour l’œil que pour l’âme. Chaque semaine, j’explore. J’explore la Forêt laurentienne en compagnie des «Belles des bois» en vélo de montagne, ces gentilles fées, Nancy, Rasa et Nadia.

Il faut nous entendre rassembler nos forces, nous encourager l’une l’autre, réclamer le meilleur de nous-mêmes, implorer la déesse de la pédale si elle existe! Il faut nous voir arpenter les bois comme de vraies guerrières en culottes courtes, bas aux genoux, éviter une roche, esquiver une branche, rattraper un dérapage dans la boue, danser sur un pont étroit, tomber, se relever, recommencer. Il faut nous voir mettre de côté notre orgueuil, oublier nos petits bobos toujours très féminisés! Il faut nous voir, sortir du rôle maman-boulot-performance, pour simplement laisser à la porte des bois notre orgueil, notre look bcbg; laisser à la porte des bois la mère de famille, la blonde de…, la boss de…; laisser ce qui est propre à nous, les femmes: la culpabilité de prendre du temps pour soi…

Il faut nous voir grimper les entiers abruptes de la Rédemption.

Oui!, il faut nous voir et nous entendre comme seule la forêt sait le faire, il faut nous entendre sur la roche, baptisée par nous seules, «la roche des lamentations», dépositaire de tous nos tracas de la semaine. Et puis, ce qui se dit là reste-là, comme un secret des dieux inscrit dans la pierre à tout jamais, appartenant désormais à la forêt.

Je vous le dis, cette «roche des lamentations», c’est la meilleure des confesseurs, la meilleure psy en ville, c’est la meilleure des méditations!

Les gourous de la position du Lotus trouveront peut-être que nos âmes se perdront en chemin. Qui sait…?

Mais.

Ce que je sais, c’est que chaque semaine j’enlace et embrasse un arbre en compagnie de ces gentilles fées, tout droit sorties des bois.

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