(Photo : Nordy par Davy Lopez)
Guylaine Guay présente son livre Corps gras.

Santé des femmes : l’appel au secours de Guylaine Guay

Par Joëlle Currat

L’animatrice et humoriste vient de sortir Corps gras, un livre traitant du lipoedème, une maladie encore méconnue touchant des milliers de femmes.

Aussi appelée la « maladie des jambes poteaux », le lipœdème est une maladie chronique qui se traduit par une accumulation anormale de graisse dans les jambes, les bras et la partie inférieure du tronc. Elle provoque souvent des douleurs, des gonflements, des lourdeurs, un relâchement de la peau, des ecchymoses et la sensation de nodules sous l’épiderme. Touchant environ une femme sur dix au Québec, le lipœdème est encore méconnu ici, alors que ce trouble a été identifié pour la première fois dans les années 1940 aux États-Unis. Guylaine Guay, qui souffre elle-même de cette maladie, déplore que celle-ci soit largement ignorée par le système de santé au Québec et au Canada. Dans cet essai rigoureusement documenté, elle retrace son parcours, ses questionnements, ainsi que ses échanges avec des professionnels de la santé et d’autres femmes concernées. À travers ses expériences, et se fiant à des recherches médicales, elle démontre l’impact physique et psychologique du lipœdème. Elle en profite pour susciter une discussion nécessaire sur la reconnaissance et la prise en charge des maladies touchant spécifiquement les femmes. À la fois soutien et outil d’information, cet ouvrage aide les personnes aux prises avec cette maladie à comprendre leur réalité et à connaître ses impacts, tels que l’anxiété, la dépression, la faible estime de soi, la culpabilité ou les troubles du comportement alimentaire.

Une maladie dégénérative

Guylaine Guay se dit très heureuse de la couverture médiatique dont jouissent son livre Corps Gras et le sujet du lipœdème depuis sa sortie le 4 novembre. Ceci dit, elle considère qu’il y a encore beaucoup d’étapes à franchir avant que cette maladie soit reconnue officiellement par les autorités médicales. « Ce trouble se déclare et s’aggrave souvent lors des grands bouleversements hormonaux que vivent les femmes, comme la puberté, les grossesses et la ménopause, explique Guylaine. Moi-même, je souffre de lipœdème depuis la puberté sans l’avoir su. C’est lors de la préménopause que mes symptômes se sont amplifiés. Et comme c’est une maladie dégénérative, on ne peut pas espérer en guérir. »

Peu de traitements

Lorsqu’une femme souffre de lipœdème, elle peut en soulager les symptômes mais pas les faire disparaître. « On peut utiliser des vêtements de compression, ou recevoir des traitements de drainages lymphatiques manuels ou de pressothérapie, par exemple. On recommande aussi les sports aquatiques, comme l’aquaforme. Moi-même, je peux faire dans l’eau des mouvements impossibles à imaginer en-dehors d’une piscine. » Un traitement par la chirurgie de réduction du lipœdème est aussi possible et peut apporter une amélioration significative de la vie des patientes et ralentir la progression de la maladie. Les chirurgiens qui pratiquent cette opération doivent être expérimentés et formés à l’intervention. Ils doivent également avoir une connaissance approfondie de la maladie et de ses effets sur le système lymphatique. En raison du manque de prestataires formés et expérimentés au Canada, de nombreuses patientes font appel à des chirurgiens internationaux qualifiés, ce qui entraîne des coûts faramineux.

Des impacts psychologiques

En plus des douleurs et des incapacités physiques, les femmes souffrant de lipœdème voient leur santé mentale se dégrader. « Il est difficile d’envisager des perspectives d’avenir lorsqu’on souffre d’une maladie dégénérative, confie Guylaine. Et quand on perd beaucoup de mobilité et qu’on souffre en permanence, cela affecte le moral. » L’autrice de Corps Gras souligne aussi que, d’après de nombreux témoignages reçus, les femmes souffrant de cette maladie se sentent abandonnées. Il leur est difficile d’être entendues et prises en charge dès le départ, étant donné que la maladie n’a pas encore été reconnue officiellement.

Libérer la parole

On comprend pourquoi Guylaine Guay s’est lancée dans l’aventure d’écrire un livre sur le lipœdème dont elle souffre depuis longtemps. « Je voulais faire connaître cette maladie qui est non seulement méconnue du public mais aussi des professionnels de la santé, » dit-elle. La rédaction de ce livre l’a aidée à libérer sa parole et à s’engager encore davantage pour la cause de la santé des femmes. « Pour moi, c’est un acte de militante. Je suis une femme de 56 ans. On sait qu’à cet âge, les femmes deviennent invisibles dans la société. Je trouve ça injuste. On a mis au monde pas mal toutes les personnes qui nous entourent et on a le droit à être traitées avec dignité en retour ! »

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