La presse demande l’aide des gouvernements
Par Thomas Gallenne
Pérennité de la presse au Québec
Une majorité d’éditeurs de journaux du Québec se regroupaient la semaine dernière au sein d’une coalition qui demande à l’État la création d’un programme d’aide pour que les journaux poursuivent le virage numérique imposé par la multiplication des plates-formes.
La Coalition pour la pérennité de la presse d’information au Québec a donc été formée du journal Le Devoir, du Groupe Capitales Médias, d’Hebdos Québec et de TC Transcontinental. Cela regroupe pas moins de 146 journaux qui informent chaque semaine près de six millions de Québécois, soit près de 80 % de la population!
Son mandat est double : sensibiliser le public à l’importance de maintenir la presse d’information d’ici en santé et obtenir une intervention temporaire de l’État pour l’aider à poursuivre le virage numérique imposé par la multiplication des plate-formes.
« Les membres de la Coalition demandent au Gouvernement du Québec d’accorder ‘‘l’exception culturelle’’ à l’industrie de la presse d’information au Québec. Nos quotidiens et nos hebdos sont importants pour préserver la diversité des voix, enrichir le débat d’idées, et accompagner des communautés de lecteurs dans leur quotidien », a indiqué Brian Myles, porte-parole de la Coalition et directeur du Devoir.
« L’industrie vit une profonde remise en question de son modèle d’affaires. Il ne s’agit pas d’un problème de qualité de l’information dans nos journaux. Au cours des dernières années, nos médias ont tous connu une hausse de leur lectorat global, en raison de la multiplication des plate-formes », pointe Claude Gagnon, co-porte-parole de la Coalition et président-directeur général de Groupe Capitales Médias.
Tarte publicitaire
Les membres de la Coalition font face à un exode des investissements publicitaires vers les médias sociaux, lesquels sont détenus par une poignée de géants américains.
Les revenus publicitaires numériques représentent près de 878 millions de dollars au Québec, mais ils échappent en grande partie aux médias d’ici. « De cette somme, on estime que 80 % vont aux Google et Facebook de ce monde, les 20 % restants demeurent au Québec », souligne Gilber Paquette, directeur général d’Hebdos Québec.
Selon lui, au cours de la dernière année, le gouvernement fédéral a investi 20 M$ en publicité numérique, et à peine 500 000 $ dans l’ensemble des quotidiens canadiens.
Dans une industrie en pleine transformation, la presse doit investir dans le développement de plate-formes numériques et réclame l’accès à des programmes d’aide au même titre que l’industrie cinématographique et télévisuelle.
À l’aide!
Afin d’aider la presse écrite à traverser cette période critique, la Coalition demande au Gouvernement du Québec de mettre rapidement sur pied un programme d’aide financière temporaire de cinq ans pour les journaux du Québec : programme et/ou crédit d’impôt remboursable couvrant 40 % des coûts de production de l’information (salaire des journalistes, masse salariale liée à la mise en page du journal et frais de reportage); programme et/ou crédit d’impôt remboursable couvrant 50 % des investissements numériques, à savoir l’acquisition et l’entretien de logiciels spécialisés, la création d’applications et la formation des usagers; exemption de la contribution payable en argent en vertu de la Loi 88 qui oblige les journaux à participer au financement des coûts nets des services de collecte sélective municipale, une facture qui a augmenté de 1075 % depuis 2006; abolition des taxes de vente pour les journaux vendus (TPS et TVQ) et enfin une augmentation significative du budget gouvernemental à l’égard des placements publicitaires dans les journaux québécois, qui ne reçoivent pas leur juste part des investissements publicitaires de l’État.
Rempart démocratique
Tout le monde convient que les journaux, qu’ils soient quotidiens ou hebdomadaires, jouent un rôle rassembleur dans la vie des citoyens au sein des municipalités du Québec et des régions.
Non seulement ont-ils joué pleinement ce rôle historiquement, mais encore aujourd’hui, beaucoup de ces médias écrits sont les derniers remparts contre l’isolement des communautés.
Si l’on en consomme le contenu, c’est surtout pour s’informer, s’éduquer et se cultiver.
Ce sont des véhicules de la liberté d’expression, des carrefours incontournables lors des débats publics, essentiels à la vitalité démocratique de leurs milieux de vie.
Ce sont aussi des agents de progrès social et économique.
À l’heure où le Gouvernement du Québec révise sa politique culturelle, c’est le moment de reconnaître l’importance des journaux dans la chaîne de diffusion des contenus culturels, car ces médias mettent en contact le créateur avec son public.