Sauvons nos CPE!

Par Marie-Catherine Goudreau

LETTRE OUVERTE

J’ai lu la semaine dernière l’excellent article de Rima Elkouri (La Presse+, 11 février) au sujet des coupes imposées aux CPE, et je suis en total accord avec l’ensemble de son argumentation.

Je suis l’heureuse et chanceuse maman d’un petit garçon qui a eu une place au CPE Bambouli, installation des Sommets, il y a un an et demi. Comme les autres parents que l’on y croise, mon conjoint et moi sommes quotidiennement rassurés, satisfaits et impressionnés par la qualité des services de notre CPE.

Les nouvelles coupes annoncées par le gouvernement de M. Couillard, quoi qu’il en dise, vont bel et bien affecter la qualité des services à nos enfants, et qu’on se le dise, à nous aussi parents (ex. : relation éducatrice-enfant et éducatrice-parent, fragilisation de la relation éducatrice-enfant, repas allégés/moins de qualité, abolition de postes d’éducatrices, abolition de cours et d’activités spéciales, etc.).

En tant que femme travailleuse autonome ayant un conjoint aux horaires atypiques, je fais partie de celles pour qui les politiques d’aide aux familles et à la conciliation famille-travail, dont font partie les CPE, ont permis de fonder une famille tout en me maintenant sur le marché du travail.

Le gouvernement de M. Couillard, qui valorise plus que tout la prospérité économique, semble tenir pour acquis les impacts positifs qu’ont eus les centres de la petite enfance sur la société québécoise (augmentation du taux de natalité, recul de la pauvreté, augmentation du nombre de mères sur le marché du travail…). Il semble aussi ignorer dans ses « calculs » la rentabilité qu’est l’investissement en « éducation » préscolaire. Parce que oui, il s’agit bien d’éducation. Il est bien naïf et réducteur de croire que l’éducation de nos jeunes commence à l’entrée à l’école primaire. Il l’est tout autant de penser que la transmission des apprentissages de la petite enfance puisse se faire que par les parents entre 6 h 30 et 8 h le matin, 17 h et 19 h 30 le soir et les fins de semaine (et on ne parle pas ici d’horaires atypiques!). Elle se fait à tout instant.

Au CPE, mon garçon apprend à partager, à contrôler ses émotions, à tenir compte des autres, à s’exprimer clairement, à devenir autonome, à apprécier les livres, à interagir avec différents adultes bienveillants… Toutes des habiletés qui sont nécessaires et garantes d’une meilleure intégration au système de l’éducation et à la vie en société. Et vous savez quoi? C’est vrai aussi pour tous ses compagnons et compagnes qui ont eu aussi la chance de transiter dans l’univers de Bambouli. Voilà la véritable force de nos CPE : son universalité. Je n’ai pas dit son accessibilité, puisque malheureusement encore trop d’enfants et de familles n’ont pas accès à ces services.

Alors, disons à M. Couillard que s’il souhaite vraiment le bien des générations futures, il doit cesser les coupes dans les CPE et développer plutôt son accessibilité afin que d’autres enfants et familles soient aussi privilégiés que nous!

Dans son acharnement à récupérer coûte que coûte de l’argent, le gouvernement sait qu’il pourrait faire mieux : en privatisant les CPE. C’est alors le secteur privé qui décidera des barèmes de qualité des services offerts aux enfants et aux parents, ainsi que des conditions de travail de milliers d’éducatrices. Cette situation viendrait changer assurément le salaire et les conditions de travail des éducatrices (des femmes, devrions-nous le répéter!).

Nous avons fait le « choix » d’une société où la plupart des parents travaillent et envoient leurs enfants dans un service de garde. Encore faut-il être sûrs comme parents et comme société que ces services de garde soient de qualité et qu’ils aient à cœur le bien-être et le développement de nos enfants, plutôt que l’enrichissement de leurs actionnaires et le développement de leurs entreprises.

Faut-il rappeler au gouvernement la conclusion d’une étude réalisée en 2012 : « Qu’il est possible, pour un programme de l’État, de concilier le développement social et la prospérité économique ».

 « Payantes pour l’État, les garderies à 7 $ », Le Devoir, 13 avril 2012)

Messieurs Couillard, Proulx, Hamad, Moreau, Leitao et Blais ainsi que Mesdames Thériault et Charlebois… Vous obligerez-nous à reconsidérer nos choix? Avoir des enfants ou intégrer le marché du travail?

Indignons-nous et rappelons haut et fort à nos dirigeants qu’ils n’ont pas été élus pour détruire nos acquis. Signons la pétition sur le site toujoursfoudenosenfants.com et envoyons-leur en masse des rappels!

Yolaine Blanchet, Sainte-Agathe-des-Monts