Quand la témérité frôle la mort

Par Thomas Gallenne

Des jeunes grimpent dans un pylône à 120 Kv à Sainte-Adèle

https://www.youtube.com/watch?v=_pcl3wu_xW0&feature=share

Une vidéo prise le lundi 19 septembre dernier par un adolescent de 12 ans de l’école secondaire Augustin-Norbert-Morin à Sainte-Adèle aura semé l’émoi et tiré la sonnette d’alarme. Mise en ligne le mardi, l’histoire va faire les manchettes nationales. Récit d’une semaine folle pour une mère et son fils.

La vidéo est à glacer le sang. Des jeunes sont en train d’escalader un pylône électrique à haute tension. Le plus haut est au niveau des lignes qui transportent un courant de 120 000 volts. Par une journée humide, un arc électrique aurait pu l’atteindre, le traversant de part en part. Le choc peut être fatal. La chute tout autant. Cela pourrait d’autant plus être notre enfant, qu’il s’agit d’un élève de l’école secondaire A.-N.-Morin à Sainte-Adèle.
Cette ligne de transport n’est qu’à quelques minutes à pied de l’établissement scolaire. Certains élèves ont l’habitude de se rendre dans le boisé adjacent sur l’heure du midi. D’autres empruntent les sentiers pour se rendre au pied de ces fameux pylônes. Tommy Pasieka est au pied d’un de ces pylônes ce lundi lorsqu’il assiste comme plusieurs de ses copains à l’ascension de quelques élèves. L’un est au sommet alors que d’autres sont à mi-hauteur. « Yo! Vous allez vous électrocuter, vous allez mourir! », lance l’élève de première année. Le soir, Tommy montre la vidéo à sa mère. « Mon premier réflexe a été de contacter l’école », se souvient Marie-Anne Pasieka qui envoie un courriel à Alain Rochon, directeur adjoint au premier cycle à A.-N.-Morin.
Le lendemain (mardi), rebelote. Sur l’heure du midi, des jeunes se remettent à escalader la tour d’acier. « Quand Tommy est rentré et que j’ai su que cela continuait, j’ai décidé de mettre sa vidéo en ligne. Je voulais interpeller les gens, crier à l’aide avant qu’un enfant ne meure », lance la mère de famille, dans un cri du cœur.

Réaction en chaîne
Une équipe d'Hydro-Québec était présente ce mercredi midi aux pieds des pylônes situés à quelques minutes à pieds de l'école A.-N.-Morin. (Photo: Courtoisie)

Une équipe d’Hydro-Québec était présente ce mercredi midi aux pieds des pylônes situés à quelques minutes à pieds de l’école A.-N.-Morin. (Photo: Marie-Anne Pasieka)
Dès mercredi (21 septembre), des équipes d’Hydro-Québec étaient présentes sur les lieux pour prévenir tout comportement dangereux et interdire toute ascension des structures de transport. Ce qui n’a pas empêché un jeune de secondaire 2 de grimper sur la première barre transversale alors qu’un ami s’apprêtait à le suivre.
L’élève a l’habitude de s’y asseoir pour jaser, pour passer le temps avec ses copains. « Je ne pensais pas que c’était dangereux à cette hauteur », avouera-t-il candidement. « Ce n’est pas une question de hauteur. Il pourrait y avoir de la conductivité. C’est dangereux », lui signifie Marc Lapointe, policier à la Direction principale-Sécurité industrielle d’Hydro-Québec, présent sur place. Le jeune a déclaré que ce n’est pas un phénomène récent, qu’il a cours depuis plusieurs années. « Tous les jours, il y a du monde. Pour les secondaires 1, je ne sais pas pourquoi, mais on dirait que c’est cool d’être dans les poteaux. »

Les employés d'Hydro-Québec se sont rués en quad vers les jeunes à travers le chemin de service d'Hydro-Québec. (Photo: Marie-Anne Pasieka)
Les employés d’Hydro-Québec se sont rués en quad vers les jeunes à travers le chemin de service d’Hydro-Québec. (Photo: Marie-Anne Pasieka)
Les employés d'Hydro-Québec se sont rués en quad vers les jeunes à travers le chemin de service d'Hydro-Québec. (Photo: Marie-Anne Pasieka)
Les employés d’Hydro-Québec se sont rués en quad vers les jeunes à travers le chemin de service d’Hydro-Québec. (Photo: Marie-Anne Pasieka)
« Tous les jours, il y a du monde. Pour les secondaires 1, je sais pas pourquoi mais on dirait que c'est cool d'être dans les poteaux. » - Un élève de secondaire 2. (Photo: Thomas Gallenne)
« Tous les jours, il y a du monde. Pour les secondaires 1, je sais pas pourquoi mais on dirait que c’est cool d’être dans les poteaux. » – Un élève de secondaire 2. (Photo: Thomas Gallenne)

 

Danger de mort

« Ces jeunes ont été extrêmement chanceux », a lancé Sophie Lamoureux, porte-parole d’Hydro-Québec, à Saint-Jérôme. Le danger de mort est bien réel. Selon les conditions météo, l’humidité dans l’air, l’effet de conductivité peut former un arc électrique et frapper une personne, dans un rayon très court. Le contact direct n’est donc pas nécessaire pour être frappé par le courant.
Informée suite à la mise en ligne de la fameuse vidéo, Hydro-Québec a contacté la direction de l’établissement dès mercredi pour établir avec elle un plan d’intervention. Des patrouilles d’Hydro-Québec étaient dépêchées sur place et la Sûreté du Québec a été informée de la situation.
En avant-midi, Alain Rochon, directeur adjoint au premier cycle à A.-N.-Morin, a rencontré les élèves de secondaire 1 et 2 pour les sensibiliser.
Jeudi matin, Hydro-Québec procédait à l’installation de clôtures temporaires au pied des deux pylônes les plus proches de l’école, là même où des élèves avaient été vus en train de grimper.
En après-midi, la Commission scolaire des Laurentides envoyait une lettre écrite conjointement avec Hydro-Québec pour informer tous les parents d’élèves de l’école de la situation.
Enfin, vendredi, tous les élèves de l’établissement scolaire recevaient la visite de la direction de l’école et d’un représentant d’Hydro-Québec pour les informer des dangers de tels comportements.

Un geste héroïque?

N’eut été de l’intervention de Tommy Pasieka et de sa mère Marie-Anne, les pires scénarios étaient à craindre, la vidéo nous en est témoin. Après une semaine folle, passée sous les feux de la rampe, le fils et la mère se disent fiers du geste qu’ils ont posé. « Au début, j’avais peur des répercussions pour mon fils, reconnaît Mme Pasieka. Mais ma conscience m’a dit que je ne pouvais pas passer ça sous silence. Au contraire, il s’est fait féliciter par ses pairs, par plusieurs professeurs. J’ai reçu tellement de messages sur les réseaux sociaux, d’inconnus qui sont reconnaissants. Je pense qu’on a sauvé des vies. On a bien fait Tommy et moi. Quand une vie est en jeu, il ne faut pas avoir peur de dénoncer! »
 

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