Crédit : Annie Fafard
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Concevoir son milieu de vie

Par Simon Cordeau

Une maison, c’est d’abord un milieu de vie. Celui-ci doit donc être conçu avec soin, en prenant d’abord en compte le lieu où il est construit, souligne Isabelle Garceau, designer et technologue en architecture à Val-David. « Je commence toujours par une visite sur le terrain : pour voir la topographie, l’ensoleillement aussi. Quel est le type de forêt ? Ce sont des feuillus ou des conifères ? Est-ce qu’il y a des vues possibles, sur les montagnes ou sur les lacs ? Je veux voir les voisins aussi, les types d’architectures qu’il y a autour. Ce sont les premières étapes », détaille-t-elle.

Dans les Laurentides, les terrains sont rarement plats. « Si un client veut une maison de plein pied, qui n’est pas adaptée à son terrain, je vais lui recommander fortement d’y aller avec un rez-de-jardin, pour profiter de la topographie. Ça évite du remblai et déblai excessif, qui engendrent des coûts, mais qui défigurent aussi la nature. J’essaie de respecter le sol existant le plus possible. »

Suivre le soleil

Crédit : Annie Fafard

Il faut aussi prendre en compte la trajectoire du soleil. Idéalement on conçoit les aires de vie, comme le salon et la salle à manger, dans la partie sud, afin qu’ils bénéficient d’un maximum d’ensoleillement. Les pièces utilitaires, comme la salle de bain et la salle de lavage, seront plutôt au nord.

Mais parfois, cela peut exiger des compromis. Par exemple, on peut vouloir une vue sur le lac à partir des aires de vie. Mais s’il est au nord, on pourra ajouter des fenêtres au sud ou un toit cathédrale, afin d’avoir assez d’ensoleillement.

« On conçoit autant l’intérieur que l’extérieur. Dans les Laurentides, on a beaucoup de vérandas-moustiquaires. Donc on va jaser avec le client. Vous pensez l’utiliser comment ? Pour déjeuner, pour souper ? On l’aménagera plus au sud, à l’est ou à l’ouest, selon les besoins du client », illustre Mme Garceau.

De la même manière, si la maison se trouve dans un quartier plus dense ou dans un village, on positionnera les fenêtres de façon stratégique, pour garder de l’intimité. « La même maison ne peut pas être construite à différents endroits. Elle doit être adaptée à son environnement. »

Au fil des saisons

« Oui, on veut du soleil et l’impression d’être dans la nature, avec le plus de fenêtres possibles. Mais il y a un autre phénomène possible : la surchauffe. Ça peut devenir désagréable », avertit Mme Garceau. Au Québec, les quatre saisons peuvent amener un certain défi, admet-elle.

Une technique peut être de jouer avec le débord de toit : le prolongement du toit vers l’extérieur. « L’été, le soleil est plus haut, donc le débord de toit vient nous protéger. Et en hiver, le soleil est plus bas, donc il entre et nous réchauffe », explique Mme Garceau. Le débord de toit peut aussi dégager la neige de la maison, ainsi que l’eau lorsqu’elle fond ou la pluie, qui pourraient endommager les matériaux. « Les chalets suisses, c’est pour ça qu’ils ont de grands débords de toit », souligne la technologue en architecture.

Le type d’arbres sur le terrain peut aussi servir à réguler l’ensoleillement. Par exemple, les feuillus feront de l’ombre l’été, mais laisseront passer la lumière l’hiver. « Mais des fois, on n’a pas le choix. Si le lac est au nord avec une forêt de conifères, peut-être que la vue sur le lac, on l’aura en sortant de la maison. »

Construire pour la prochaine génération

Crédit : Annie Fafard

Le choix des matériaux est aussi central à la conception d’une habitation. « L’idée est de construire pour que ça dure au moins 60 ans. On pense à long terme. Une toiture en bardeau d’asphalte, c’est moins cher. Mais dans 15-20 ans, c’est fini et ça se retrouve à l’écocentre. Par contre, si on va avec une toiture d’acier, c’est bon pour la vie. Et la journée où elle ne sera plus bonne, dans 100 ans, l’acier pourra être recyclé ou revalorisé », illustre la technologue en architecture. Ainsi, l’idéal est de construire « pour la prochaine génération », selon elle.

« Il y a la grosseur des maisons aussi. Plus on construit petit, moins on utilise de ressources. Et si on fait des duplex ou du multilogement, on utilise la même quantité de ressources, mais pour plus de personnes. » Cela peut également réduire les coûts, qui ont beaucoup augmenté ces dernières années, tant pour les matériaux que pour la main-d’oeuvre.

« Avant la pandémie, on parlait du projet, et à la fin, on parlait du budget. Maintenant, on parle d’abord du budget, et après on parle des besoins, pour être certains qu’on est sur la même longueur d’ondes », indique Mme Garceau. D’ailleurs, beaucoup de projets sont annulés ou retardés cette année, en raison des taux d’intérêts également. « Au lieu de se construire à neuf, on va garder notre maison et la rénover », illustre-t-elle.

Densification douce

Dans les prochaines années, les unités d’habitation accessoires (UHA) offriront beaucoup de potentiel, s’enthousiasme Mme Garceau. Pour densifier doucement leurs zones urbanisées, plusieurs municipalités souhaitent autoriser la construction de petits logements dans une cour ou un garage, par exemple.

« J’ai vraiment hâte d’offrir ce type de service-là. Ça peut être très pratique pour les aînés. Si on ne veut pas nécessairement habiter avec ses parents, ils peuvent être pas loin. Ils gardent leur autonomie et leur indépendance, mais on peut partager un jardin ou nos repas. »

Cela permet aussi de « double l’utilité » d’un garage, par exemple en ajoutant un logement au-dessus. « Ça va peut-être aider les gens qui n’ont pas beaucoup de sous pour se loger. […] Mais il va falloir que ce soit bien encadré, pour pas que ça devienne de la location à court terme. Le but, c’est de faire du logement pour les gens du coin », croit Mme Garceau.

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