Crédit : Simon Cordeau

Portrait : Claude Chapdelaine, la mémoire de PASA

Par Simon Cordeau (initiative de journalisme local)

Claude Chapdelaine a été président de Plein air Sainte-Adèle (PASA) deux fois. « À mon corps défendant ! », s’empresse-t-il de souligner. « J’ai été gestionnaire toute ma vie. Mon plan, c’était de devenir un bon soldat. Je ne donne plus d’ordres ! Mais quand tu es gestionnaire, ça te court après », raconte-t-il, sourire en coin. Portrait d’un passionné de plein air, qui croit que la pérennisation des sentiers passe par le travail d’équipe et l’appui de nos municipalités.

Même s’il ne skie plus depuis deux ans, M. Chapdelaine parle toujours de son sport de prédilection avec une passion contagieuse. « On est tous des p’tits gars rêveurs. Je suis dans les pistes non tracées, en ski nordique. Je m’imagine : me voilà devenu Jackrabbit ! [Rires] » Aujourd’hui, il ne siège plus au CA de PASA, mais il est encore impliqué dans le comité de pérennisation. « Je ne fais plus de nettoyage de sentiers ou de coupes de bois. En fait, je reste surtout la mémoire de PASA », raconte-t-il en riant.

Travailler en équipe

Claude Chapdelaine et sa conjointe Diane en randonnée. Courtoisie

L’implication de Claude Chapdelaine commence il y a une quinzaine d’années. « Depuis des années, je faisais du ski de fond, sur des belles pistes entretenues, je ne savais pas par qui. Quand j’ai pris ma retraite, je me suis dit qu’il faudrait que je m’intéresse un peu à ça. » Il participe donc à la création du club de plein air de Sainte-Anne-des-Lacs. « J’ai fait partie des membres fondateurs. J’y ai appris mon métier de membre de club de ski de fond. »

À l’automne 2010, un poste s’ouvre sur le conseil d’administration de PASA, et un de ses amis l’y invite. Gestionnaire de carrière, M. Chapdelaine a une expertise précieuse. Il connait aussi la région comme le fond de sa poche. « En 2006, quand j’ai pris ma retraite, je me suis acheté un GPS et j’ai décidé d’enregistrer toutes les pistes de ski de fond des Laurentides, de Saint-Jérôme jusqu’à Mont-Tremblant. Je voulais me faire ma propre carte. Et j’ai en fait tout un paquet, des pistes de ski de fond ! »

Selon M. Chapdelaine, c’est d’abord l’esprit d’équipe et les expertises complémentaires de ses membres qui font le succès d’une organisation comme PASA. « Je ne peux pas les laisser tomber. Ils comptent sur moi, et moi je compte sur eux. On développe une interdépendance. Le bénévolat marche beaucoup comme ça. »

Il s’agit toutefois d’un travail presque anonyme, précise-t-il. « Les gens que tu rencontres sur les sentiers, ils ne savent pas que tu es bénévole. Donc ils ne te disent pas merci. Mais tu vois le bonheur dans leurs yeux. Ça, je suis très sensible à ça. »

La clé du succès

En plein air, PASA est la plus grosse organisation de la région, et plusieurs facteurs expliquent son succès, selon M. Chapdelaine. D’abord, elle peut compter sur un grand bassin de membres. « Quand je suis arrivé à PASA, il y avait 15 membres du conseil d’administration. C’était tout. Il n’y avait pas de membres. Mais ça prend des membres ! » Ainsi, PASA instaure un membrariat gratuit et via Internet, ce qui facilite le recrutement et le renouvèlement. « En échange, on va te donner de l’information. On va t’écrire un courriel tous les deux ou trois semaines », illustre M. Chapdelaine.

Ensuite, l’appui de la Ville est essentiel. Il souligne l’intérêt et l’implication de Nadine Brière, ancienne mairesse de Sainte-Adèle, qui a mené à la pérennisation du parc du Mont Loup-Garou. « À Sainte-Anne-des-Lacs, j’étais membre fondateur, mais c’est la Ville qui a convoqué une rencontre de tous les skieurs intéressés pour former un club », illustre-t-il. À Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson, le maire Gilles Boucher, lors de son premier mandat, « a beaucoup poussé pour former un club », raconte M. Chapdelaine. « Il m’avait rencontré pour savoir comment faire. » À l’inverse, à Saint-Sauveur, le développement des sentiers stagne et le club local est inactif depuis 2021. « Je n’ai pas l’impression qu’ils ont été bien appuyés par la Ville », déplore M. Chapdelaine.

Enfin, « il y a toujours un petit moteur qui fait marcher les autres ». L’organisation a besoin de gens engagés qui motivent les autres. « Et ça prend des gens à la retraite ! », ajoute M. Chapdelaine, afin que ceux-ci aient le temps de s’impliquer. « Actuellement, on a deux petits moteurs exceptionnels : Daniel Bergeron [président) et Dominique Hamel [administratrice] », souligne-t-il.

Nommer les pistes

M. Chapdelaine ne skie plus depuis deux ans. Mais lorsqu’on lui demande ses pistes de prédilections, il répond qu’il y en a plusieurs. « J’aimais beaucoup la Alexis. Elle a un dénivelé intéressant. Il y avait l’Adéloise Est. Elle part des pentes 40-80, traverse la route 117, passe sous l’autoroute 15, et va rejoindre le P’tit Train du Nord. Elle existe encore, sur papier, mais il y a des bouts qui sont fermés. C’est dans les priorités de PASA, de la pérenniser. C’est le lien entre l’est et l’ouest. »

Dans le parc du Mont Loup-Garou, une piste porte d’ailleurs son nom : la Chap. « Mais ça, ce n’est pas de ma faute ! », s’empresse-t-il de préciser. C’est l’équipe de PASA qui lui a fait la surprise. « Et ils l’ont faite selon l’image qu’ils ont de moi : rough. » Il mime des hauts et des bas. « Mais ç’a tombé à l’époque où je commençais à être un peu moins bon et un peu peureux. [Rires] En novembre, j’ai glissé et je me suis cassé le dos. Donc je ne l’ai jamais skiée, la fameuse Chap. Mais je l’ai marchée ! »

Plusieurs pistes de Sainte-Adèle sont nommées en l’honneur de bénévoles. C’est d’ailleurs lui qui a nommé la Poirier, dans le parc du Mont Loup-Garou. Il donne aussi la Augy en exemple, au mont Durocher. « Il y a la Deveault au mont Loup-Garou. André Deveault a travaillé énormément pour faire des pistes de raquette. Benoit Gauthier n’a pas de piste à son nom : il n’a jamais voulu. C’est une machine, qui développe des pistes de vélo, sans toujours demander la permission », raconte-t-il, sourire en coin.

Cela dit, il souligne aussi l’importance des pistes qui rappellent notre patrimoine culturel, comme la Alexis, la Donalda, la Grand Jaune et la Grignon.

Préserver et connecter

Mais les pistes les plus importantes, selon M. Chapdelaine, ce sont les pistes régionales. « Il faut communiquer avec les autres. Si tu fais le tour des petites pistes à Sainte-Adèle, tu n’es pas Jackrabbit. J’aimais beaucoup faire de Sainte-Agathe à chez moi, ou jusqu’à Piedmont. Mais il faut les connaître, les pistes. » Ces sentiers sont morcelés ou ont simplement disparu avec le temps.

Alors que Sainte-Adèle planifie le développement du secteur Chantecler, M. Chapdelaine croit qu’il est indispensable d’y préserver une connexion avec l’est. « L’Adéloise Ouest et l’Adéloise Est devraient se connecter et s’appeler l’Adéloise », illustre-t-il.

Les promoteurs savent maintenant qu’avoir une piste est un atout, concède-t-il. Mais selon lui, il y a aussi un danger qu’on crée des corridors, sans préserver la forêt et la nature qui les entourent. À l’inverse, certaines villes imposent une superficie minimum pour les nouveaux lots. « Protéger la nature, oui, mais si tu ne peux plus y aller ? », se demande-t-il.

Ainsi, il ne faut pas seulement pérenniser des sentiers, mais aussi permettre aux gens de passer sur des terrains privés, comme c’est le cas ailleurs dans le monde. « Prenez les sentiers de grande randonnée en France. Avez-vous entendu qu’un propriétaire pouvait fermer ça ? Ou l’Appalachian Trail aux États-Unis, pays capitaliste s’il en est un. Il n’y pas un propriétaire qui peut la fermer ! Il faut voir comment ils font. »

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