Traversée de l’Amérique : Alexis Cartier la fait en vélo
Le cycliste de Sainte-Anne-des-Lacs Alexis Cartier s’est envolé le 3 avril pour la Californie. Son objectif pour 2025 : compétitionner dans les 6 courses du Life Time Grand Prix, qui se tiennent un peu partout aux États-Unis, et se rendre d’une compétition à l’autre en vélo. En tout, il fera près de 14 000 km de vélo sur 7 mois. « L’année passée, j’ai fait autour de 28 000 km. Donc ça se ressemble », indique Alexis.
Les 6 courses de vélo de gravelle et de hors-route représentent « le plus gros circuit de cyclisme professionnel en Amérique, autant pour les athlètes que pour son rayonnement », explique le cycliste. « Avant, c’étaient des événements individuels, mais maintenant, ils forment une série. Ils ont investi massivement en marketing, en production vidéo et en bourses pour les coureurs. C’est le niveau de compétition le plus élevé à l’extérieur de l’Europe. »
Et au lieu de prendre l’avion entre chaque compétition, Alexis a décidé de les relier en vélo, d’abord dans un souci écologique. « J’ai fait du vélo lorsque j’étais plus jeune. Quand j’ai recommencé, je me suis mis au vélo de gravelle, et je savais la direction dans laquelle je voulais pousser. Je veux réduire et remettre en question l’impact du cyclisme professionnel sur l’environnement. C’est énormément polluant si tu reviens au Québec entre toutes les courses. C’est du vélo, à la fin. Ce n’est pas si important que ça », soutient-il.
La préparation

Lorsque je parle avec Alexis, début mai, il est en Arizona, près de Flagstaff. « Il ne fait pas chaud : autour de 4 degrés cette nuit. Je suis en altitude. Je suis à l’hôtel aujourd’hui, parce que j’avais un petit mal de gorge. »
A-t-il eu besoin de se préparer avant de se lancer dans cette aventure ? « Physiquement, j’ai juste continué à m’entraîner normalement, entre 18 et 30 heures par semaine. Des fois, c’était un peu plus : je peux monter à 35 heures. »
Pour traverser les États-Unis, Alexis essaie de garder un horaire de 5 heures de vélo par jour et de 25 heures par semaine, avec 2 jours de repos complet ou de plus petites distances. C’est donc « à peu près similaire » à son entraînement à la maison. « Je vais moins vite avec les sacoches. Et au lieu de faire des boucles, je vais en ligne droite », illustre le cycliste.
Aussi, il n’y a pas de déplacement entre deux courses où il doit se presser, ce qui lui laisse le temps de se reposer. « J’essaie de faire un gros bloc d’entraînement, puis de me laisser du temps pour récupérer. Les deux prochaines semaines seront intenses, mais après ça, je pourrai me reposer beaucoup. Puis je repartirai la machine avant la course. Il faut que tu sois frais », explique le cycliste.
Les compétitions
Alexis a participé à la première de ses courses le 10 avril, peu de temps après son arrivée en Californie : la Sea Otter Classic, à Monterey. « Ça ne s’est vraiment pas bien passé », regrette-t-il. « Je n’avais pas fait de camp d’entraînement. Je suis resté à Sainte-Anne-des-Lacs tout l’hiver et j’ai fait beaucoup de fatbike. Mais j’avais roulé le vélo de la course juste une fois. » Toutefois, la compétition était de haut niveau, et les autres participants « avaient déjà plusieurs courses dans les jambes », explique Alexis.
« J’ai crampé après 2 heures. Et j’ai terminé en 5 heures, à peu près. Il y avait beaucoup de petites côtes et ça demandait des efforts violents. Mon corps n’était pas prêt. Ce n’est pas une erreur, mais c’est une leçon d’humilité », continue le cycliste.
Alexis souligne que son objectif premier, avec le défi qu’il s’est lancé, c’est de compléter toutes les compétitions. « Mais j’aimerais vraiment ça pouvoir compétitionner avec les meilleurs. C’est plus l’fun qu’être en arrière. […] L’année passée, j’avais fait une course du Grand Prix, et je rivalisais. »
Gagner des courses, ou arriver dans le peloton de tête, lui permettrait aussi d’être « plus pertinent dans la discussion », espère-t-il. « Si je suis capable d’être en avant, ça pourrait attirer plus d’attention sur ma cause et ce que j’essaie de faire. Ça démontrerait que c’est une option viable que d’autres pourraient essayer. Mais si je ne suis pas là pantoute, c’est la preuve que tu ne peux pas rivaliser. »
De l’autre côté de l’écran, Alexis prend une petite pause, comme un pas de recul. « Mais ç’a moins d’importance tout ça. J’essaie de compétitionner contre moi-même, et de me détacher du résultat. Mais je n’y arrive pas tout à fait », ajoute-t-il en esquissant un sourire. « J’ai grandi en compétition. Mes barèmes de performance changent un peu avec ça. Si je suis capable de compétitionner, tant mieux. Mais ce n’est pas la finalité. »
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Le mode de vie

Le défi, en fait, se trouve plutôt dans le mode de vie qu’exige sa traversée américaine. « À la maison, tu as une routine. Déjà, tu dois pousser ton corps et l’amener à sa limite durant l’entraînement. Et il y a un maximum de stress que tu peux faire entrer dans ta vie. » Là, il doit en plus naviguer dans un environnement inconnu, planifier ses déplacements, trouver de la nourriture et de l’eau, etc. « Juste le stress d’être dehors, c’est quelque chose. Et c’est de la logistique. Mais j’aime ce défi-là. »
Alexis passe aussi la plupart de ses nuits en camping. Et malgré la fatigue, trouver le sommeil est parfois long, admet-il. « J’avais sous-estimé ça. Pour dormir 8 heures, tu dois passer 10 heures dans la tente, parce que tu gigotes. J’essaie de m’adapter. »
Il utilise d’ailleurs l’application Warmshowers, qui met en contact des cyclistes avec des gens qui sont prêts à les héberger. « Tu peux camper dans leur cour, ou il y en a qui ont carrément une chambre. Tu dois planifier un peu d’avance, mais ça peut être une alternative. »
Malgré ces quelques inconforts, Alexis se surprend à être « plus relax en camping, dans la brousse ». « C’est vraiment l’fun être dans la nature tout le temps. Je me couche et je me lève avec le soleil. Des fois, il n’y a pas de wifi. C’est un autre rythme. Il n’y a pas de distractions. C’est vraiment un mode de vie que j’aime. »
Cependant, dormir dehors n’est peut-être pas la meilleure façon de performer au plus haut niveau lors des courses, reconnaît le cycliste. « Mais ce n’est pas un sacrifice. C’est encore plus l’fun que si je prenais l’avion et que j’essayais de me téléporter. Et si la course ne se passe pas bien, j’ai tout le déplacement après. En fait, j’aime quasiment plus les déplacements que les journées de course. »
Il parle avec émerveillement du territoire vaste et ouvert de l’Ouest américain. « Ça change tellement. Des montagnes, du désert, du chaud, du froid, du sec, des arbres : il y a tout ! »
L’horizon
En traversant l’Arizona, Alexis se rend à sa prochaine épreuve, l’Unbound Gravel, qui se tiendra le 31 mai à Emporia au Kansas : une course de 200 miles (ou 320 km). Il a l’impression que c’est la course qui s’approche le plus de ce qu’il fait maintenant, en pédalant d’un État à l’autre. « C’est peut-être celle où ma préparation sera le plus en ligne avec les demandes de la course. L’exposition à la chaleur avant, aussi, ça peut être bon », explique-t-il.
Ce sera l’une des épreuves les plus longues : autour de 9 à 10 heures. La plus courte, elle, se gagne en 2 h 30, indique-t-il. « Il y en a qui sont plus explosives, mais toutes les courses sont basées sur l’endurance », nuance-t-il.
Après l’Unbound, il prendra un vol (son deuxième et dernier) pour Calgary. Il doit revenir au Canada durant son périple pour une question de visa, explique-t-il. Il en profitera pour participer aux Championnats canadiens de gravelle. Puis il redescendra aux États-Unis en vélo, vers Leadville au Colorado pour sa troisième compétition, le Leadville Trail 100 MTB, le 9 août.
Sa blonde ira d’ailleurs le rejoindre au Montana, pour un ou deux mois. « Et il y aura peut-être d’autre monde aussi qui va se joindre. Je vis des trucs cool et que j’aimerais partager. Tout le faire seul, ça serait long. Mais il y a des moments où c’est plaisant aussi, avoir juste moi à gérer. »
Enfin, il se rendra à Cable au Wisconsin pour le Chequamegon MTB Fest, le 13 septembre, et finalement à Bentonville en Arkansas, pour le Little Sugar MTB et le Big Sugar Gravel, les 12 et 18 octobre. « À la fin, je vais revenir à Sainte-Anne-des-Lacs en vélo. » Il lui restera alors 3 500 km à parcourir avant de revenir à la maison. « Je vais le faire plus vite, parce que, cette fois-là, je pourrai arriver fatigué. »
Les 6 Life Time Grand Prix
Sea Otter Classic : le 10 avril à Monterey en Californie
Unbound Gravel : le 31 mai à Emporia au Kansas
Leadville Trail 100 MTB : le 9 août à Leadville au Colorado
Chequamegon MTB Fest : le 13 septembre à Cable au Wisconsin
Little Sugar MTB : le 12 octobre à Bentonville en Arkansas
Big Sugar Gravel : le 18 octobre à Bentonville en Arkansas
Pour suivre Alexis Cartier dans son aventure
Instagram : @alexis__cartier
Strava : strava.app.link/0T5SEtAryTb