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Êtes-vous superficiel ?

Par Mimi Legault

La chronique à Mimi

Suis-je devenue une matante pas fine qui grince des dents parce que je trouve que la superficialité gagne du terrain, jour après jour ? Levez la main ceux qui disent oui… Mais avant de répondre, permettez ? Ouvrez d’abord la télé. Justement ce midi, en écoutant les dernières nouvelles, c’est arrivé. Une pub. Celle de Loto-Québec pour le 6/49. Il y a un gars dans un ascenseur, il se croit seul et lâche un gaz. Juste à ce moment, une jeune fille qu’il semble connaître se pointe. Malaise. Il lui demande comment ça va. Mal, qu’elle répond, elle a un gros rhube et par conséquent ne peut sentir les effluves du jeune homme. Ataboy : le gars court chez le dépanneur, un 6/49 s’il vous plaît. C’est censé être drôle.

Ou bien, regardez l’émission XOXO et vous comprendrez ce que le mot superficialité signifie. En soi, il n’est pas péjoratif, mais sa prolifération dans plusieurs domaines me pose un sérieux problème. Le contenant est devenu plus important que le contenu.

C’est comme habiter une maison de prestige où l’extérieur attirerait tous les regards, mais l’intérieur serait crade et d’une pauvreté sans nom.

On vous remarque parce que vous conduisez une voiture sport de l’année, que vous portez des habits griffés et une Rolex à votre poignet. Parfait. Ça ne m’irrite pas le côlon. Mais si toute votre vie tourne autour du « paraître au lieu d’être », je me dis qu’il y a un os dans le fromage et que la vie mon vieux, c’est plus profond que ça!

C’est comme si de nos jours, pour être dans le vent, il ne faudrait pas faire travailler nos méninges trop longtemps, ne pas avoir d’opinion, ne pas chercher à «dia-lo-guer» sur des sujets qui demandent un minimum de réflexion.

Je vous donne un exemple vécu. Belle-maman possède un chalet dans un petit village perdu. Pas plus de mille habitants. Une église, un hôtel, un marchand général. Et bien sûr, un resto. C’était l’hiver, du – 25 degrés Celsius, solides. Tellement froid que même les avocats gardaient leurs mains dans leurs poches…

Je m’étais rendue au resto en VTT pour boire un chocolat chaud, j’en avais drôlement besoin. À l’intérieur, tous des gens qui se voisinaient depuis longtemps, genre la ligue du vieux poêle, qui causaient hockey, température, poutine, et encore température et encore hockey… parlaient de tout et de rien. De rien surtout.

À un moment donné, deux  hommes (sûrement d’la ville, ont-ils pensé) dans la trentaine sont arrivés endimanchés, cravatés et bien mis comme disait ma tante Georgette. Ils se sont installés discrètement dans un coin. Silence. Des « étranges » par ici ? On les lorgnait sans aucun tact visuel tout en les écoutant parler d’argent, d’indices boursiers, de frais bancaires.

Dès qu’ils sont repartis, l’un d’eux s’est écrié : « Non, mais y en as tu qui n’ont rien à dire »! Le troupeau a suivi par un rire collectif. Il n’y a ni mal ni bien dans ce récit. Mais je me gratte l’occiput en songeant que l’essentiel de la profondeur se dilue lentement mais sûrement dans l’essence humaine.

L’une de mes connaissances n’écoute plus les nouvelles, ne lit plus les journaux. Ce qui se passe dans le monde, me dit-elle, je m’en fous et ça fait du bien. Une bienheureuse qui refuse aussi les échanges autour d’un café et qui préfère de loin s’en tenir à cette sorte d’anonymat que l’on appelle Facebook. Cet entêtement à vouloir demeurer en surface me met mal à l’aise.

Les dirigeants de notre planète espèrent peut-être un monde rempli de bienheureux qui se soûlent la gueule ou se gèlent la bine.

Ce faisant, nos gouvernants décideront de leur vie à leur place. J’exagère ? Je l’espère. Parce que le nombre d’êtres humains qui traversent l’existence sans jamais rien voir ni entendre est prodigieux. J’ai écrit sur un bout de papier dont j’ignore l’auteur ces mots qui résument bien ma pensée : « c’est dans le va-et-vient des jours, dans ce fouillis des non-dits que la vie perd le sens des choses profondes et se réfugie dans la superficialité et le faux-semblant ».

Pour vous, j’ai concocté ce poème

Je creuse

Tu creuses

Il creuse

Elle creuse

Je sais, ce n’est pas pittoresque, mais c’est… profond.

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