(Photo : Victor Diaz Lamich)
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Un homme de conviction, fier de ses racines

Par France Poirier

J’ai eu l’immense plaisir de m’entretenir avec un monument de la chanson francophone, Paul Piché. L’artiste sera à Saint-Jérôme le 23 juin pour le grand spectacle régional de la Fête nationale du Québec à Saint-Jérôme.

Vous devez être très sollicité pour la Fête nationale ?

Absolument, j’ai beaucoup de demandes, et cette année, j’ai choisi Saint-Jérôme. Il y a plusieurs demandes, mais je ne voudrais pas donner un chiffre parce que ça aurait l’air prétentieux. Effectivement, plusieurs villes me sollicitent pour la Fête nationale à l’avance, et quelquefois les demandes sont deux ans à l’avance.

Pourquoi avoir choisi Saint-Jérôme ?

J’ai un attachement particulier avec Saint-Jérôme, ça représente beaucoup de choses pour moi. Mon père est originaire de Saint-Jérôme, il y a beaucoup de Piché à Saint-Jérôme. Mon grand-père est natif de là aussi.

Ça me rappelle une histoire à propos de mon grand-père. Quand il était jeune, il était facteur pour les camps de bûcherons. Il partait de Saint-Jérôme avec un de ses amis autochtone. Il montait la rivière en canot jusqu’à la Minerve. Il arrêtait à Labelle et, de là, il prenait le train du Nord pour revenir à Saint-Jérôme. L’hiver, il faisait ça à cheval. Ça leur prenait deux semaines.

Une autre histoire me vient de mon père. Lorsqu’il était jeune, un élève de sa classe lui a dit : « Ton père est tombé en bas du clocher de la cathédrale ». Finalement, ce n’était pas lui, c’était un autre avec qui il travaillait. Il s’en était sorti sans trop de mal. À chaque fois que je passe devant la cathédrale, je pense à ça !


Est-ce que c’est votre première Saint-Jean à Saint-Jérôme ?

Je ne crois pas. Mais je ne pourrais pas dire c’était quand. Il y a longtemps, mais je ne me rappelle pas quand. Je suis certain d’avoir déjà fait un show de la Fête nationale à Saint-Jérôme, pas mal certain.

Est-ce qu’il y a des années auxquelles vous n’avez pas participé ?

Une seule fois, et c’était très bizarre. On a eu une fête de famille. Il y avait eu une annulation d’un show en quelque part. C’est pour cette raison qu’on a fêté en famille. C’est très rare ! Habituellement, j’ai plusieurs spectacles, puisque ça s’étire souvent sur plusieurs jours.

Quelle était la première Fête nationale à laquelle vous avez participé ?

C’était il y a longtemps, parce que je n’étais pas encore connu. C’était à la Minerve chez nous. On avait fait ça dans un champ. Ça avait été ben l’fun. Le seul problème c’est que le fermier avait fait passer ses vaches dans la journée et nous nous sommes retrouvés avec de l’engrais dans le champ ! (rire) C’était avec un gang d’amis, ça avait été une belle soirée.

Quelle est votre Fête nationale la plus mémorable ?

Je suis obligé de dire celle de 1990 sur l’île Sainte-Hélène avec Michel Rivard et Gilles Vigneault. Nous étions les trois et on avait invité Diane Dufresne et Laurence Jalbert. C’était à la suite de l’échec de l’accord du lac Meech alors la ferveur était forte, d’ailleurs elle était forte même avant ça.

Cette soirée-là est mémorable parce qu’il y avait de la dignité et beaucoup de douceur malgré la controverse. C’était un show en ouverture sur le monde. Nous trois, on n’était pas dans la fermeture, c’était une soirée comme ça.

Je pense aux autres fêtes nationales, que ce soit aux États-Unis ou en Europe, ce sont souvent des parades militaires, alors que nous, c’est un spectacle de hippie quasiment, ça toujours été ça. Je me souviens que c’était la première fois que je le sentais comme ça. Il y avait 200 000 personnes. On célèbre notre différence.

Ce n’est pas une fête qui oppose notre différence. On invite les gens à être avec nous. C’est une belle fête et ça me touche toujours de voir les gens, de voir l’ambiance. C’est cette fois-là où je l’ai plus senti, par le choix des chansons, le discours patriotique.

Qu’est-ce que représente la Fête nationale en 2022?

C’est pas mal la même chose. C’est comme si on partait à zéro à chaque fois à cette date. On remet les pendules à l’heure. Nous on est comme ça. On est là, on veut exister avec notre différence et c’est bienvenu à tous. C’est comme un « reset ».

Êtes-vous séparatiste ou nationaliste ? Et quelle est la différence selon vous ?

Effectivement, tu peux être nationaliste sans être séparatiste. Moi je me dis indépendantiste, car séparatiste, je trouve ça trop contre le Canada. Je ne suis pas contre le Canada, j’ai beaucoup de respect pour le Canada où il y a une belle démocratie. Sauf pour la Loi sur les mesures de guerre, la démocratie est toujours en marche.

Je suis indépendantiste, je pense que le Québec devrait être un pays. En ce moment, le Québec exerce une certaine influence sur le Canada, il peut dire son mot. Il devrait être sur la scène internationale. On est une particularité, une différence et tous ceux qui valorisent la diversité devraient le reconnaître. Le fait d’être français en Amérique, c’est une diversité pour l’humanité, un phénomène unique et essentiel.

Pour la richesse culturelle du monde, le plus beau cadeau qu’on peut faire est de continuer d’exister et d’être. Pour accepter les différences, il faut commencer par s’accepter comme différence. […] On ne disparaîtra pas du jour au lendemain, mais il y aura un point de non-retour. L’enjeu est là. Moi, j’ai toujours pensé qu’en devenant indépendant, on pourrait s’associer avec le Canada. C’est la vision de René Lévesque finalement.

Des chansons à chanter au bord du feu ?

Euh… Bozo de Félix Leclerc, c’est une très belle chanson [Et il entame quelques notes.] Et toutes les chansons de Gilles Vigneault, naturellement. Quelquefois des jeunes me disent : « On a connu vos chansons sur le bord d’un feu, mon grand frère chantait ça ». Ça fait toujours plaisir à entendre.

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