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En sommes-nous vraiment rendus là?

Par Éric-Olivier Dallard

En attendant de prendre un café avec Clément Cardin…

J’ai dans ma pipe une chronique; elle s’appellera «Café avec un maire». Elle parlera d’une heure passée avec Clément Cardin, le maire de Piedmont, à parler un peu de tout, surtout de rien… Par exemple, de la façon dont on réagit une fois devenu maire, comment l’on compose avec ce nouveau statut, avec les pressions multiples, les demandes souvent contradictoires mais souvent aussi chacune justifiée… Le pouvoir transforme-t-il? Renonce-t-on à certains idéaux? Demeure-ton le même homme, la même femme, dans l’adversité politique et l’arène publique? J’aimerais qu’il m’explique. Et il le ferait. Et il le fera. Ce pourrait être à La Brûlerie, par exemple. Ou plutôt, un truc à Piedmont, ce serait plus logique…

Cette rencontre, et cette chronique, «Café avec un maire», elles auront lieu. Et, avec Clément Cardin, nous échangeront. Un peu à propos de tout. Beaucoup à propos de rien.

Vous savez pourquoi je prendrai un jour un café avec Clément Cardin? Parce qu’il m’y a invité, il y a déjà quelques mois, tout simplement. Et que je m’en souviens, de cette invitation lancée et de ma parole d’y donner suite. En fait, Clément Cardin n’a pas aimé l’une de mes chroniques de ce moment, qui n’était pourtant, à mes yeux, ni meilleure ni pire que bien d’autres que j’ai commises dans ma carrière. Seulement celle-là, elle l’a touché. Il l’a prise pour lui… Peut-être était-ce d’ailleurs le cas. Il m’ a appelé, m’a fait part de son inconfort quant à ce que j’avais écrit, m’a invité à discuter. Beaucoup d’entre vous, lecteurs, lectrices, aviez aussi d’ailleurs réagi fortement à ce texte… Il arrive, encore aujourd’hui, des mois après, que vous me la citiez dans vos courriers.

Pourquoi est-il si simple d’obtenir des commentaires de M. Cardin, même sur des dossiers qui ne font pas nécessairement «son affaire»? Pourquoi des élus comme M. Cardin vont-ils au-devant des médias, même (ou surtout?) sur des sujets avec lesquels ils ont toutes les raisons du monde d’être inconfortables? Et je ne parle pas de pousser les hauts cris, de déchirer sa chemise sur la place publique, ou d’expédier à tous vents des mises en demeure! Non!, je parle de simplement, avec politesse, requérir un entretien avec un journaliste ou un chroniqueursaux propos jugés inappropriés. Question de mettre les choses au clair. Parce qu’ils ont compris que les médias restent le premier lien avec leurs citoyens.

Pourquoi Jean-Paul Cardinal, maire de Sainte-Adèle, lui, a-t-il recours à une firme de relations publiques dès qu’un dossier devient un peu chaud? Il a réagi – bien laconiquement d’ailleurs –, par la voie d’Octane-Stratégie, une firme spécialisée dans les relations «municipalités-médias», au dossier de la semaine dernière sur les mises en demeure envoyées par la Municipalité de Sainte-Adèle à deux blogueurs de sa ville (vous pouvez lire ce communiqué sur www.acceslaurentides.com). Cette semaine encore, c’est toujours Octane-Stratégie qui répond, au nom du maire, aux questions relatives au dossier opposant la municipalité au résident Marc Lupien (voir notre texte dans cette édition-ci d’Accès). En passant, le travail d’Octane-Stratégie est honnête et conséquent, pour ce que j’ai pu en juger.

Mais en sommes-nous vraiment rendus là, dans les Laurentides? En sommes-nous rendus à ce que nos municipalités aient recours à des firmes externes pour gérer leur image publique? On est vraiment si «big» que ça? Ou bien simplement un peu déconnectés?

M. Cardinal ne fuit pas vraiment les médias sur les dossiers chauds. Ce ne serait pas honnête de ma part de l’affirmer; j’ai pu, régulièrement et même dans le cadre des deux dossiers dont je parle plus haut, lui parler directement. Mais, notamment pour ce dernier dossier (celui le mettant aux prises avec Marc Lupien), la chose ne fut pas simple: il a fallu que je l’accoste au Palais de justice de Saint-Jérôme d’abord, puis que je le croise (par hasard!) dans un 5 à 7, la veille de la rédaction du texte, pour pouvoir aborder de front le sujet avec lui. Est-ce normal? Sans compter que M. Cardinal est un politicien avisé, un homme qui connaît ses dossiers et les maîtrise: lui parler a apporté un éclairage nouveau sur la question. Non, M. Cardinal ne fuit pas les médias sur les questtions chaudes; il se contente de louvoyer, souhaitant (ou non d’ailleurs!) les éviter poliment. Ce faisant, il se prive de la possibilité de mettre de l’avant des atouts majeurs: sa bonne foi, son talent oratoire, sa connaissance des affaires publiques.

J’ai publié il y a plusieurs années un article, dans Le Journal économique, intitulé «Intel et Natrel: la gestion de crise». J’y démontrais comment le géant américain, Intel (fabricant des puces informatiques), lors du lancement de sa première Pentium et des premières rumeurs (fondées) sur un disfonctionnement – très anodins et sans conséquence… cela concernait les opérations avec virgule flottante si ma mémoire est bonne – avait fini par perdre une fortune en niant le problème au départ, puis en étant forcé de le reconnaître, mais un peu tard. Le dommage était fait, la rumeur avait enflé: des milliers de consommateurs retournaient leurs ordinateurs pour un remplacement! De son côté, la «petite» compagnie laitière canadienne Natrel avait, elle, juguler une crise majeure, en prenant les devants: victime d’un chantage à l’empoisonnement (des fraudeurs avaient menacé d’empoisonner ses livraisons s’il elle ne versait pas d’argent), elle avait retiré immédiatement ses produits du marché, puis avait avisé les médias de la situation, achetant de pleines pages de pub dans les journaux. L’on y voyait un fermier en train de traire une vache, avec ces mots : «Voici la seule façon de nous soutirer du liquide». Un chef d’œuvre de gestion de crise. L’entreprise en est ressortie grandie aux yeux du public. Elle était une entreprise qui avait pris les devants et ses responsabilités.

Je vous ferai une copie de cet article si vous le voulez, Monsieur Cardinal.

Monsieur Cardin, c’est promis, le café, c’est pour bientôt!

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