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La face cachée de la Une

Par Josée Pilotte

Est-ce que je vous ai dit que mes vacances approchaient? Est-ce que je vous ai dit que parfois il m’arrivait de vouloir changer de métier, de ville, de pays même?

Ça me prend parfois. Ça me prend d’imaginer ma vie sous d’autres cieux. Surtout quand j’ai l’impression que ma job, mon journal sont instrumentalisés, utilisés comme des outils de propagande.

 

On sait bien que lorsque quelqu’un vient voir un journal avec une information, il a un intérêt bien précis. Il ne vient pas chercher un ami, un thérapeute, un avocat, un conseiller matrimonial… Il vient parler à un journaliste. Le problème c’est que tout le monde croit avoir une bonne histoire et tout le monde a des raisons plus ou moins avouées de la faire connaître.

 

En 15 ans de métier, j’en ai connu très peu qui prenaient de leur temps pour venir voir un journal simplement au nom du bien de la démocratie et parce que Le public a le droit de savoir.

Non, il n’y a jamais que cela; il a toujours un agenda: un règlement de compte, une faveur à obtenir, une tête à faire tomber, un poste à prendre, un show à plugger…Bref, les gens qui viennent nous voir au journal dénoncent toujours une situation, non pas parce qu’elle est injuste… mais parce qu’elle les fait chier, eux, et qu’ils veulent quelque chose. Point. Je crois que c’est normal, en tous cas si ce n’est pas normal, c’est humain.

C’est donc tous ces petits «tirages-de-couvertes» qui, à la longue, deviennent épuisants et éreintants… et qui font que j’ai hâte à mes vacances!

 

Je ne veux pas avoir l’air de me plaindre, mais il y a des histoires qui parfois sont plus compliquées que d’autres. Des histoires comme celle que nous publions cette semaine à la Une, une vraie saga à mon avis. Avons-nous été manipulés par les uns ou par les autres? Bien sûr que si. Mais ce n’est pas parce que nous avons été manipulés que l’histoire, elle, n’est pas bonne.

C’est alors qu’intervient dans notre prise de décision de publier LA question: «Est-ce d’intérêt public?»

 

On y a donc pensé, on a dormi dessus, on s’est faits des cheveux blancs. Puis nous sommes arrivés à la conclusion que nous n’avions pas le choix. Vous allez dire qu’on a toujours le choix dans la vie, c’est vrai. Mais quand la rumeur d’un dossier important se répand comme une traînée de poudre et que nous, comme média, détenons de l’information privilégiée, il est de notre devoir de livrer cette information et de le faire le plus objectivement possible.

Nous le faisons chaque fois de notre mieux, en refusant de tenir compte des sources anonymes qui refusent de nous rencontrer, et en interrogeant chacune des parties concernées, en demandant l’avis à des intervenants et consultants extérieurs au dossier, etc.

 

Oui, nous faisons de notre mieux tout en sachant, bien entendu, qu’il y a toujours trois faces à chaque histoire: la tienne, la mienne, et la Vérité.

 

Vous comprenez donc que certaines personnes qui n’ont pas toujours une vue d’ensemble d’une situation que nous exposons, nous engueulent et finissent parfois par nous insulter.

 

Ajouter à cela des relations humaines tissées serrées depuis des années, des gens que l’on respecte mais qui parfois se retrouvent au cœur d’une polémique, et vous comprendrez pourquoi j’ai si hâte à mes vacances!

 

Mais. Tu dois faire ta job.

Et à chacun la sienne.

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