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Nos ados adorés

Par Mimi Legault

Ma chronique d’aujourd’hui vise à désamorcer le comportement de votre ado qui vit une période difficile. Pas seulement à cause de la pandémie. À cause de son âge : 12 à 19 ans n’est pas une période facile.

J’ai pensé que si je vous le décrivais, ça vous rassurerait tout de go. Cette petite bête se reconnaît facilement : il porte une tuque de laine en pleine canicule et se promène en running malgré vingt centimètres de neige tombés. Il a un problème de surdité: n’entends que lorsque ça fait son affaire. Parle un langage qui vous fait rêver d’être munis des écouteurs dont on se sert à l’ONU pour traduction simultanée. Il ne faut pas l’abreuver de reproches, il n’a pas le frame psychologique pour ça. Plutôt choisir de le manipuler avec soin et mettre sur son front : attention, fragile. Son ego est en berne, en chute libre.

Selon l’ado, ses parents sont scotchés à leurs anciennes idées. Cette pensée de Mark Twain : quand j’avais 14 ans, mon père était si ignorant que j’avais du mal à l’endurer. Quand j’ai eu 21, je n’en revenais pas de tout ce qu’il avait appris en seulement 7 ans! Que voulez-vous, chers lecteurs, votre ado est à un âge où il trouve que ses parents deviennent de plus en plus difficiles. Il lui arrive même de penser qu’il s’est trompé de parents!

C’est quoi l’idée de leur faire manger ce qui est bon pour leur santé? Ils détestent le tofu et les tisanes. Parfois le brocoli. Ceux qui estiment qu’ils sont dépourvus de créativité devraient les observer en train de se faire un sandwich!

L’ado est une décharge d’hormones, c’est un porc-épic qui refuse de se faire flatter. Un jour, mon ado de 16 ans était venu s’asseoir sur le bord de mon lit. Ses trois amis venaient de quitter la maison; ils avaient écouté de la musique toute la soirée (vous appelez ça de la musique, vous?).

Il m’avait dit : tu sais maman, j’aime bien quand tu m’embrasses mais ne le fais plus devant mes chums. Dix quatre, j’avais compris.

Ils sont mal dans leur peau, sont trop âgés pour faire ce que font les enfants et trop jeunes pour copier les adultes. Veulent faire ce que personne d’autre ne fait. Et puis regardez-les marcher. Ils sont comme désarticulés, élastiques. Ils marchent comme s’ils avaient un ressort dans le derrière, un ressort brisé. Ils flottent ou surfent sur des idées farfelues, la tête penchée sur leur écran.

Et puis, ils connaissent tout. Un jour ma mère m’a dit (j’avais 13-14 ans), tu ferais peut-être bien de commencer à te débrouiller toute seule pendant que tu sais tout encore. Ne l’oubliez pas, ce qui remplace l’expérience, c’est d’avoir 16 ans. Un père inquiet de voir sa fille ado évachée sur son lit demande à sa femme : l’as-tu déjà vue faire du sport? Jamais, à moins que se vaporiser les cheveux au spray net ne figure maintenant aux Jeux olympiques.

Un ado, c’est un cataclysme temporaire, une ambiguïté à vous faire damner. À titre d’exemple, votre enfant devient un ado lorsqu’il arrête de vous demander d’où il vient et qu’il refuse de vous dire où il va. Il a besoin d’un GPS pour retrouver son lit. Et après? C’est sa chambre, son lieu sacré.

C’est un obstineux qui fera le contraire de l’adulte. Un jour, l’une de mes amies me raconta sa mésaventure avec son ado qui vivait sa crise à pleine vapeur. Elle fut donc agréablement surprise le soir où avant de sortir, il lui demanda de l’aider à choisir une chemise : une bleue, une blanche ou une beige. J’aime bien la beige, après, je choisirais la blanche, lui répondit-elle. Merci, lui répondit-il en enfilant la bleue.

Il est exact que le son va moins vite que la lumière. Ce que vous dites à vos ados ne parvient à leurs oreilles qu’aux environs de la quarantaine.

C’est ça un ado!

mimilego@cgocable.ca

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3 Comments

  1. C Girard

    Tout à fait !!!

    Reply
  2. Guy J.J.P. Lafond

    Merci Mimi!

    Sans vouloir faire l’avocat du diable ici,

    S’il vous plaît, pourquoi ne pas ralentir un peu avec nos préjugés sur des ados. Ce sont des êtres humains comme vous et moi. Et la différence entre nous et eux (elles) est qu’ils sont confrontés à des changements multiples et rapides que nous n’avons probablement pas connu de manière aussi intense quand nous, nous étions adolescents. Il est normal qu’ils se questionnent bien plus que nous sur le monde que nous leur présentons.

    Prenons des exemples:

    Avons-nous vécu une pandémie de type COVID-19 à notre adolescence? Non.

    Nos hivers étaient-ils en yoyo comme ceux d’aujourd’hui? Non.

    Les ados se posent la question: « Mais dans quel monde sommes-nous en train de grandir? »

    Heureusement, il y a l’amour sincère entre deux adolescents qui les protègent de la folie. @:-)

    Autre observation: les découvertes dans tous les domaines scientifiques s’accélèrent et même les adultes ont de la difficulté à s’y retrouver et à suivre le rythme.

    Je crois que nos ados deviendront de meilleurs épistémologues que nous, assurément.

    Je termine en vous disant que je n’arrive pas à comprendre des adultes en Ontario et parfois aussi au Québec. Pourquoi? Parce que adultes m’empêchent de parler à ma fille ado depuis trois ans déjà au Canada. Pourtant, je n’ai rien fait de mal.

    Alors, que se passe-t-il donc avec des adultes dans ce drôle de pays?

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    • Guy J.J.P. Lafond

      Désolé. Une coquille s’est glissée dans mon commentaire. Il aurait fallu lire « connus ».

      Reply

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