Deux citoyennes scientifiques : ça mange quoi en hiver ?

Par daniel-calve

Hilde et Sunniva ne sont pas deux femmes ordinaires. En effet, il faut être un peu cinglé pour passer neuf mois en Extrême-Arctique dans un refuge de 20 m2 en proie aux ours polaires. Heureusement elles sont bien préparées, en plus d’avoir chacune 25 ans d’expérience comme aventurières dans les régions polaires. Toutefois ce ne sont pas des chercheuses ; ce sont des citoyennes scientifiques qui se sont engagées à observer l’ampleur des impacts du réchauf-fement climatique dans le Grand Nord.

La science citoyenne, c’est la collaboration entre scientifiques et citoyens bénévoles à des projets de recherche dans le but de collecter des données sur une thématique précise et ce, sur la base d’un protocole reconnu. Ces données ont une réelle valeur et peuvent mener à des percées scientifiques déterminantes. Dans sa forme la plus riche, la science citoyenne a le pouvoir de transformer la société. Sans compter que la technologie d’aujourd’hui rend facile le partage d’informations et la collaboration entre citoyens et chercheurs.

L’expédition « Hearts in the Ice » offre les conditions idéales pour la collecte de données difficilement accessibles sur une période étendue. Des organismes comme la NASA, le Scripps Institute of Oceanography et l’Institut polaire de Norvège ont su saisir l’occasion et se sont joint au projet à titre de partenaires scientifiques pour la collecte et l’analyse d’échantillons et de données sur la salinité et la température de l’eau, les concentrations de phytoplancton, les aurores boréales, les formations nuageuses, l’épaisseur de la glace, la faune (insectes, ours polaires, renards arctiques, rennes), la flore (lichens) et la présence de plastique dans l’estomac d’oiseaux morts.

Un tel programme ne serait pas possible sans l’apport de la technologie, et le drone s’avère un outil particulièrement utile. Eric Saczuk, du British Columbia Institute of Technology, s’est rendu au Bamsebu et a formé Hilde et Sunniva au pilotage d’un drone muni d’un système d’imagerie multispectrale, qui permet d’obtenir simultanément des enregistrements dans différentes bandes du spectre visible ou infrarouge. Il suffit de piloter le drone suivant un plan de vol précis pour obtenir un motif répété d’images qui se chevauchent. On obtient alors une foule de données qui, une fois analysées par un logiciel, produisent des images d’une précision de 80 à 90 %.

Pendant la nuit polaire, Hilde et Sunniva se servent du drone principalement pour observer les températures de l’air au-dessus de l’eau à proximité de la rive. Les données obtenues seront comparées avec les échantillons d’eau de mer et de phytoplancton recueillis au même endroit durant la même période. Et avec le retour du soleil en mi-février, elles pourront enfin étendre leur champ d’observation aux glaciers ainsi qu’à la faune et la flore environnantes.

Ces deux femmes ne sont certes pas ordinaires. Par contre la science citoyenne, tel que son nom l’indique, est accessible à tous. Et en cette ère de bouleversements climatiques planétaires dont certains sont irréversibles, la contribution à cette démarche est essentielle.

Il existe présentement plus de 3000 projets de science citoyenne dans le monde, dont la plupart sont répertoriés sur le site scistarter.org. Plus près de nous, plusieurs programmes de suivi des espèces animales ou végétales au Québec nécessitent la participation des citoyens. Que ces espèces soient envahissantes ( ticks, herbe à poux, tordeuse des bourgeons de l’épinette…) ou en péril (chauve-souris, grenouilles, abeilles, papillons… ), la science citoyenne permet de combler les lacunes dans la recherche tout en augmentant l’enthousiasme du public pour la science. J’invite les curieux à consulter les sites www.espacepourlavie.ca, www.quebio.ca et www.inaturalist.ca.

La science citoyenne permet aux participants d’apporter une contribution directe à la recherche, d’accroître leur compréhension scientifique et de se plonger profondément dans l’apprentissage des questions environnementales. Ces opportunités offrent des expériences personnellement transformatrices.

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