En français s'il vous plaît

Par serge-grenier

Speak White, disait-on jadis. On m’a déjà lancé au stationnement du Reine-Élisabeth un solide Go back to your slums alors que nous sortions tout juste du congrès quinquennal du Parti libéral du Québec.

J’avais giflé l’homme dans les deux langues. Mais c’était avant la loi 101 du bon docteur Laurin, la deuxième meilleure loi péquiste après celle portant sur le financement des partis politiques, une leçon de démocratie. Alors qu’aujourd’hui, ce sont des lois, de simples lois. À Ottawa, la meilleure du XXIe siècle fut très certainement celle sur la clarté de la question référendaire du Dion et, maintenant avec le bon Harper – enfin un gars qui se tient debout et qui parle français –, une meilleure répartition des circonscriptions électorales à l’échelle fédérale – il a un plan.

En ma qualité de Montréalais, j’en ai un, moi aussi, un plan. Un bon plan: la francisation de Ville-Marie depuis Pointe-aux-Trembles jusqu’à l’Île-Dorval. Je suis fédéraliste et je veux que cela se sache. Mon cheval de bataille est la langue. Ville-Marie mérite mieux de la patrie qu’une fin en forme de Musée de la Civilisation. Montréalais depuis des siècles, premiers brasseurs canadiens, les Molson ont donné leur nom à leur nouveau Centre plutôt que lui conserver celui de l’aréna la plus connue des Amériques, le Forum de Montréal. J’enrage. Honte à vous, brasseurs!

J’aimerais bien vous parler de suite des

Lunetteries Second Regard mais Legault y verra bientôt. Pizza Hut que je n’ose traduire, quand même pas Bell! Bâton Rouge, c’est Bâton Rouge, même savoureuse vichyssoise partout, ici, aux États-Unis incluant Porto-Rico.

Le Charest aime mieux Caleçons vos goûts? et on sait qu’il n’en a aucun. Goût. Michou prononce encore l’s d’Ogilvy. Gérald

Tremblay ne lit que le Los Angeles Times. Le Landry ne parle que de ça, la langue. Monsieur le Cardinal Turcotte se réfugie dans son latin. Gros Parizeau laisse à maigre Lizette le soin de, il n’est plus capable, elle non plus. La femme David ne touche même pas à Second Début, si français pourtant.

Et que dire de tous ces commerces superflus? Une caisse pop à Kirkland, une Centrale Beauté alla Lise Watier dans

Hochelaga-Maisonneuve, Extermination Cockcroach Extermination en Tous Genres à Domicile interdite en Basses-Laurentides, coupe Longueuil non tolérée de traversée au mirador du pont Gédéon-Ouimet, pas de Coifferie Gy-Zel ou de Salon Gilles Pour Hommes, pas plus d’un Urgel ou d’un Magnus à la fois, pas d’huissiers sauf chez Michèle Richard, pas d’Aide Psychologique Pour Tous, pas de pain Gadoua, pas de boissons énergisantes, pas de jeans qui pendent, pas de bottines jaunes, seulement du chocolat vendu aux portes par des jeunes qui préparent un de ces voyages de classe en Lettonie. Pas de La Crotterie, ex-Aubainerie Croteau.

Certaines multinationales ont agi ainsi qu’elles le font dans tout pays normalement constitué. Dormez-Vous? Bureau en Gros? Lebeau Vitres d’Auto, Maxi.

Parlons rues, si vous le voulez bien. Les rues Atwater et Amherst, le square

Dorchester, la rue Sherbrooke, la rue Wellington des pauvres de Verdun, The Town of Mount Royal? Pourquoi? La rue des Trois-Johnson, la rue Raoûl Duguay, la rue

Pauline-Marois aux Éboulements, l’impasse de la Rébellion-de-38, la rue Poune près de Panet et Logan, la sombre et triste ruelle André Montmorency, la ruelle Gros-Coderre à Montréal-Nord, la rue Jean-Guy Moreau qui ressemble à toutes les nouvelles rues de Repentigny, la rue Lucien-Francœur à Outremont (il habite là depuis toujours et enseigne dans une école publique d’en bas), la rue piétonnière Lise-Thibault, la rue Marc-Lalonde – une bien belle rue –, l’avenue Louis-Ferdinand-Céline en pleins boudins juifs sur Hutchison, l’avenue Justin-Trudeau à Notre-Dame-de-Grâce, pourquoi pas?

Les clubs maintenant. Avant, les noms sud-américains triomphaient. La Casa Loma, la Zarzuela, seul tapette-bar en ville, le Flamingo Rose, le Kon Tiki (!), déjà le Madrid, la Cucaracha à Denyse Filiatrault, l’El Morocco, le Séville, la Catalogne de feue Shirley Théroux, la Poubelle (la Favela?) de Tex Buddy Lecor, le Papillon Monarch, cher au cœur des vieilles tapettes, rebaptisé le Zoo par les jeunes, le Carré Dominion pour les péripatéticiennes mâles (!), les toilettes en ville pour se reconnaître, rouler vite en char dans le Village pour en écraser une couple. Le Village Gay, je vous le demande: c’est-tu si drôle que ça?

En tout cas, moi, j’ai fait ma part. Du temps que je travaillais à Radio-Canada-Ottawa, j’avais lancé une campagne de souscription visant à franciser certains noms de notre belle capitale nationale. Un 24 Sussex, ça se rebaptise, un Hull ça s’efface, un journal Le Droit, ça, t’allume un feu de cheminée, je m’arrête là, les séparatistes vont se mettre à m’haïr.

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