Les gangs de rue à Montréal dans les années 1880
Par Rédaction
Mars 1882, dans le village de Sainte-Cunégonde qui plus tard sera annexé à la ville de Montréal et deviendra connu sous le nom du quartier de la petite Bourgogne, sévissent des bandes organisées, le Gang des Bleus de Saint-Henri et le Gang des Rouges de Sainte-Cunégonde ancêtres des gangs de rues de Montréal-Nord, ils en portaient les mêmes couleurs. Ce n’était pas des petits voyous mais des criminels armés qui défiaient les policiers, les ridiculisaient et les attaquaient, les citoyens étaient constamment victimes de violence sur la rue et rançonnés.
Rappelons que les policiers ne seront armés que dans les années 1898-1900.
Ces deux bandes ont une cinquantaine de membres qui font la loi, leur loi.
Voyons comment ils se comportaient à la Cour: «Chaque lundi matin, la cour est remplie par une foule sale et malpropre, rassemblée pour assister au procès d’un grand nombre de leurs compagnons.
Ils sourient de tout ce qui peut se passer de grotesque et ensuite ils passent le chapeau pour ramasser l’argent nécessaire à l’amende des contrevenants. Il y avait ce matin, neuf cas d’assauts de la part de ces différentes bandes. Il yen a eu 16 les deux lundis précédents. Le chef Choquet déclare qu’il veut purger Sainte-Cunégonde de ces voyous, mais que la tâche sera difficile vu qu’ils se mettent tous ensemble pour payer l’amende des leurs. Il en avait nettoyé la ville dès ce printemps en leur imposant 115$ d’amendes en trois semaines. Cette somme les avait mis à sec et les avait tranquillisés pendant quelque temps. Le Chef montra ensuite au reporter un casseur-de-crâne fabriqué avec un bout de tuyau de caoutchouc et une barre de fer très lourde entrée dans l’un des bouts.»
Devant les insuccès du chef Choquet à éradiquer les bandes de voyous de Sainte-Cunégonde, un nouveau chef est engagé à l’automne 1885, Joseph Pagé, il accepte la fonction à la condition qu’il puisse choisir ses hommes. C’est dans ce contexte de violence qu’il engage un nouveau policier du nom de Louis Cyr, à peine âgé de vingt -deux ans, le jeune colosse de 302lbs qui deviendra un des hommes les plus forts au monde subira un baptême du feu à l’égal de sa force.
Sa réputation et sa force l’ayant précédé, le calme revint pour un moment à Sainte-Cunégonde, mais voilà que l’accalmie cessa lorsque les policiers furent appelés à se rendre sur la rue Workman un après-midi pour y intervenir auprès de quatre individus qui troublaient la paix.
Les policiers Vendette, Proulx, Cyr et Young vont s’y diriger, à leur arrivée les voyous leur font des pieds de nez et les mettent au défi de les arrêter. Louis Cyr et le policer Proulx vont arrêter Delphis Paquette après une course à pied mais le nouveau policier Cyr va néanmoins recevoir une pierre à la tempe qui va le blesser sérieusement, Proulx racontera plus tard à la Cour ce qui advint par la suite:
«Au moment où je saisissais Dolphis Paquette, son frère Arthur Paquette, me donna un premier coup de hache sur le côté gauche de la tête avec le taillant de la hache et me fit une blessure en me fendant la peau jusqu’aux os. J’ai reçu un second coup de hache de la part de Wilfred Paquette sur le côté droit de la tête et j’ai perdu connaissance. Néanmoins, je suis revenu assez tôt pour m’apercevoir que le prisonnier Wilfrid Ouelette me frappait à coups de pieds dans le visage pendant que j’étais à terre et causait les blessures que j’ai sur la figure. Pendant que j’étais à terre et comme j’allais me relever, Dolphis Paquette m’a frappé avec un corps dur que je crois être une barre de fer dans le dos et m’a causé la blessure dont je souffre le plus. Je n’ai pas vu le prisonnier Sablière me frapper mais crier: frappez, fessez, tuez.
Dolphis Paquette un des assaillants qui avait réussi à s’enfuir sera arrêté aux États-Unis.
Le policier Proulx reprit le travail après avoir survécu miraculeusement à ses blessures, quant au jeune Louis Cyr après avoir été victime d’un autre assaut à la hache, il choisit plutôt de se consacrer à des exhibitions de force dans des arènes publiques et entreprit une carrière en ce sens.
Cette époque est marquante pour les affrontements avec les policiers comme en témoigne un jugement de Cour: «Louis Coulombe 38 ans, est reconnu comme ayant l’habitude de battre la police, il a été condamné à un mois de prison. Tiens j’apprends que le coroner va bientôt rendre jugement dans une cause où un policier de Montréal a utilisé son arme lors d’une confrontation avec une bande de voyous dans un parc, il y est aussi fait mention des Bleus et des Rouges…