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Génération fuckée?

Par Josée Pilotte

La Galère

Maudite galère!

Ne trouvez-vous pas pathétique l’image que nous renvoie la nouvelle série de Radio-Canada, La Galère, sur notre génération? Ne trouvez-vous pas plus pathétique encore que celles qui tiennent le miroir, Rénée-Claude Brazeau au scénario et Sophie Lorain à la réalisation, soient de cette même génération?…

C’est un peu comme si on faisait un «dîner de cons» et pis que les cons… ben… c’était nous-autres..

La Galère, en gros, c’est l’histoire de quatre filles fin-trentaine qui se débattent avec leurs vies au quotidien, naviguant en eaux troubles du statut de mère parfaite, à la brillante carrière, en passant par la vie amoureuse flamboyante, la quête du bonheur, la recherche du prince charmant… Quatre amies qui, pour évacuer leurs frustrations du quotidien, pousseront l’audace à s’inventer une nouvelle façon de vivre, voire une nouvelle façon de se réinventer elles-mêmes.

La galère? Oui!

Parce qu’on le connaît tous un peu ce foutu bordel, pis qu’on est tous un peu dedans au fond: c’est sans doute d’ailleurs pourquoi on en rit autant.

La galère? Oui, mais c’est, aussi, un chemin vers l’esquisse d’une nouvelle forme de solidarité, une marche vers une nouvelle définition de la complicité féminine. C’est un gros «fuck you» au métro-boulot-dodo.

Ces filles veulent s‘inventer une nouvelle forme de famille, comme les communes des années ‘60 qui cherchaient à révolutionner la société.

Je ne sais pas si nous devrions en rire ou bien en pleurer, de cet autoportrait contemporain d’une génération sans nom qui pourrait se baptiser, à mon humble avis, «génération F», «F» pour «Fuckée». Une génération indécise qui vacille, qui oscille entre le goût du fric et le goût de la simplicité. Une nouvelle gang qui se crie athée, mais qui, dans sa quête d’absolu, s’accroche à de nouveaux gourous.

Des idéalistes de l’amour absolu, de l’amour sans conditions, sans contradictions… mais pour qui le grand débat est justement de débattre sur la place publique, pour déterminer si «sucer c‘est vraiment tromper»…

Le plus drôle dans toute cette galère, c’est notre façon de nous tourner en dérision, de rire de nous-mêmes. Nous ne sommes plus gênés d’imposer à nos enfants quatre belles-mères, huit beaux-pères, 12 grands-mères et 24 oncles et ce, avant même qu’ils aient atteint l’âge de la puberté… parce que «ta maman aime beaucoup les papas» (Stéphanie s’adressant à sa fille dans La Galère). Mais je vous rassure, au mieux je me rassure, parce que comme disait Thierry Ardisson dans sa biographie: «On a pas changé le monde, mais putain qu’on a don‘ eu du fun!»

On a tellement de fun, qu’on balance les derniers tabous par-dessus notre épaule, comme ce frère et cette sœur qui revendiquent à la face du monde le droit de s’aimer et de se reproduire librement, chose qu’ils ont jusqu’ici bien réussie, en quatre exemplaires… Et vive la Charte et ses libertés!
«Où y‘a de la gêne, y’a pas de plaisirs », dit-on. On pourrait-tu avoir un peu moins de plaisir… et s‘en garder une, «p’tite gêne»?!

Je me questionne sur ce désir de vouloir tout afficher de tout dire librement, sans retenue, sans pudeur, sans scrupule… Se croit-on vraiment plus libre ainsi? En croyant faire voler en éclat les tabous, ne sommes-nous pas en train d’ériger des murs de honte? Une honte de se sentir scandalisé par ce qui est véritablement scandaleux, mais que notre société banalise…

Oui, dans cette coure folle contre nous-mêmes, il n‘y a pas que de mauvaises avenues; il y a beaucoup de bon dans ce questionnement incessant et dans cette capacité à s‘avouer se que l’on est sans hypocrisie complaisante.

Mais.

La conne ici voudrait prendre une pause du «dîner de cons»; permettez que je quitte la table une semaine, question de m’inventer ma galère à moi. Elle sera faite de simplicité, d’amour et d’eau fraîche; composée d’un homme (Chéri), de nos enfants-bien-à-nous, et de trois valises remplies de «petits rien», dont ce roman d’une «délirante histoire d’amour», oui!, que l’éditeur décrit comme un «livre d’amour sauvage (qui), comme tous les vrais livres de son espèce, contient sa contrepartie, son contraire, ici les prémisses d’un assassinat -disons d’un assassinat moral – ce qui semblera à plupart beaucoup moins grave que tout autre type de meurtre. Pour être plus percutant, on dira: CETTE HISTOIRE D’AMOUR A ÉTÉ ÉCRITE POUR TUER!»

Peut-être que je vous raconterai à mon retour…

Mais.

Peut-être pas!

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