La fin de la perversion
Par Josée Pilotte
J’aimerais dire que je m’en fous, mais je
mentirais.
Et j’aime pas mentir. Je suis donc devant ma propre perversion, celle d’avouer humblement aimer la St-Valentin. Ne me dites
surtout pas qu’elle est le symbole de la consommation capitaliste, je ne veux pas le savoir.
Laissez tranquille la Harlequine en moi: elle est en amour avec l’amooooour!
Et j’aime les chocolats Godiva. Moins pour les chocolats que pour les mots d’amour, ces mots qui font sourire, sourire d’envie.
J’aime penser que je saurai, cette journée-là de février, comment faire avec les sentiments qui débordent, ces sentiments qu’on exprime trop souvent mal les autres jours de l’année. Nous les présentons comme un bouquet de fleurs à l’envers; pourtant quand on a un bouquet de fleurs à offrir, on ne le donne pas la tête en bas, les tiges en l’air… sinon l’autre n’en voit que les épines et se pique. Parfois, trop souvent, on fait ça avec les sentiments: on les offre à l’envers.
Ne nous comptons pas d’histoire: nous en connaissons tous, de ces couples à l’envers, qui des roses ne s’offrent que les épines.
Des couples où l’amour côtoie la haine, car pour eux «la haine» est devenue, au fil du temps, «l’amour». Oui, l’amour est parfois pervers, pervers tel un carburant hautement inflammable. Ces couples ont la chair et le coeur à vif. Peut-on guérir de l’indifférence, de la haine qu’on perçoit dans les yeux de
l’autre? Est-ce que la St-Valentin devient pour eux un douloureux passage obligé? Enfin. Souvent j’éprouve un vertige de les voir
«s’aimer».
Mais. Il y a aussi les autres couples, les couples amis, les couples amants, les couples fusionnels, les couples tordus, les couples secrets, les couples open, les couples créatifs
Pour eux tous le «couple» symbolise «leur» univers. L’Univers. «Un seul être vous manque et tout est dépeuplé»…
Alors la St-Valentin, c’est quoi?. C’est au moins un moment d’arrêt, que tu sois seul, en couple, mal accompagné, mal baisé, frustré, amer, délaissé, oublié, amoureux. C’est au moins un moment de gémissements ou bien de grognements, selon le côté de la clotûre où l’on se trouve.
J’aime les chocolats Godiva. Moins pour les chocolats que pour les mots d’amour, qui glissent de la bouche de Chéri à mes lèvres. Comme l’envol d’un baiser volé qu’on ne cesse tous de pourchasser, pour préserver l’amour, tel un «Zèbre» qui sans cesse fascine sa «Fanfan».
Donc. Dis-je. Avouez-le donc, gang d’hypocrites!, que vous aimez encore mieux une main meurtrie par les épines d’une rose qu’une St-Valentin sans Valentin.