Sous les pavés, les sentiers

Par Josée Pilotte

Vous serez heureux d’apprendre que nous ne sommes pas les seuls à vouloir se prendre en main et à vouloir changer le monde puisque dans plusieurs villes du Québec et de l’Ontario une vague de «démocratie directe» emporte les vieilles références politiques.

Ce nouvel activisme souterrain prend racines dans la collectivité du citoyen ordinaire, et non pas dans celle des anarchistes qui encouragent la désobéissance civile, la destruction du mobilier urbain et autres «actions terroristes socialement acceptables», comme au Sommet de Montebello de 2007.

Je vous avoue que tout ça me fait sourire, d’un sourire complice… en fait je trouve ça plutôt inspirant d’entendre que des gens d’une même communauté prennent le taureau par les cornes pour se forger de nouveaux modes de vie. Ces guérilleros sans fusil n’ont rien à leur épreuve et s’exécutent plutôt que d’attendre que leurs politiciens daignent bouger.
À Montréal, ce sont entre autres des jardiniers clandestins qui tentent de reverdir les terrains vagues du Sud-Ouest et du Mile-End, ou de colorer le glauque du dessous de l’échangeur Turcot.
À Pointe-Saint-Charles, ce sont des citoyens, fatigués d’attendre après leur ville, qui ont transformé, au pic et à la pelle, une zone dévastée en parc pour y créer le «Jardin de la liberté»…

Et le meilleur selon moi: des militantes torontois pro-vélo qui ont fait une grimace à la Ville en sortant la nuit, avec bombes aérosol et pochoirs, pour créer des pistes cyclables sur les principales artères.

Leur slogan? «Agissons ici, maintenant.» Bref: ils réalisent en une nuit ce que la ville ne réussit pas à faire depuis 10 ans! (1)

Je me vois presque… bombe aérosol à la main traçant des lignes blanches sur notre nouveau boulevard Taschereau sauverois (c’est quand même assez incroyable qu’ils n’y aient pas pensé; on s’entend qu’ils vont y arriver un jour, la marche des cyclistes étant inéluctable. Oui ils vont y arriver… Dans 10 ans? Moi, j’le fais en une nuit!)

Je me vois presque… balai à la main, organisant une corvée sur la 364 pour nettoyer toute la maudite garnotte qui nuit aux cyclistes. Les robin-des-bois des sentiers le font bien, eux: il fut un temps où ils n’étaient qu’une dizaine à nettoyer, à négocier avec les propriétaires privés pour un droit passage sur leur terrain… Aujourd’hui chaque jour une trentaine de personnes bénévoles, passionnées et engagées, entretiennent notre plus grande richesse laurentienne. NOS sentiers. NOTRE forêt.

Demain nous serons, je l’espère, des milliers!

Vous savez, il faudrait être aveugle pour ne pas se rendre compte qu’il y a une affluence grandissante d’adeptes du plein air, de la santé et du sport dans notre région, une affluence de plus en plus influente justement. Il faudrait être aveugle pour ne pas les voir. Comme il faudrait être aveugle pour nier qu’il y a des besoins criants en termes de ressources qui humaniseraient notre quotidien: organismes aidant, bénévoles impliqués, robin-des-bois en tout genre. Il faut penser à les soutenir et à les valoriser

Est-ce que c’est utopique de penser que c’est la fin de l’individualisme? Sans tomber dans l’extrême go-gauche-j’me-fais-deux-tresses-j’fume-de-l’herbe, peut-on se demander si cette fin de l’individualisme n’irait pas de pair avec la fin du cynisme politique? Plutôt que de se laisser mener, on veut prendre part aux décisions, en faire partie intégrante. On veut se préoccuper de notre voisin, de notre environnement et aussi s’assurer que l’on trace des lignes de ballon-chasseur dans la cour d’école de nos enfants.
«Sous les pavés, la plage», était l’un des cris de ralliement de la révolution de mai ‘68. Il n’est pas nécessaire d’arracher l’asphalte ou de sortir nos bombes aérosols, mais il est nécessaire de s’unir pour revendiquer notre vision de nos Laurentides rêvés.

Allez, osez prendre part au débat sur: www.www.journalacces.ca et éclatez-vous… on aime ben ça!!!

Viva la Révolution!!!
(1) Tiré de l’article d’Isabelle Paré, Main basse sur la ville, Le Devoir, 4 juillet 2009.

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