|

Les gens que l’on cruise au whole foods

Par Journal Accès

Sous la patte d’Omalley par Christian Genest

Je ne suis pas dyslexique. C’était un jeu de mots tellement senti et puis, je voulais voir si vous aviez l’oeil attentif! Croise serait plutôt le terme circonstanciel. Au fait vous fréquentez le Whole foods dans vos escapades américaines?

Le concept d’épicerie a été conçu comme une antithèse à la chaîne Safeway… John Mackay avait en tête un «safer-way» avant d’y coller le nom actuel. Celui-ci est d’ailleurs un maillon de contre-culture américaine à l’instar du big. Bio, santé, artisanal, organique et local représentent l’épicentre du langage que l’on emploie à outrance, tellement que plusieurs satires «bobos-style» circulent sur la toile.

Évidemment vous pourrez aussi trouver plusieurs détracteurs à la chaîne; un débat interminable de style gauche-droite de la bouffe. N’empêche que j’adore mes pèlerinages au whole foods lorsque je suis aux States!

Je vous mets en ambiance.

Adjacent à l’entrée, le rack-à-bikes affiche presque complet, alors qu’on ne peut manquer les cartons remplis à craquer de melons à 5$ qui nous accueillent avant de franchir les portes coulissantes – qui nous avisent que l’Apple pay est désormais disponible. J’accroche un panier au format «moins mais mieux», taillé sur mesure pour l’étroitesse des allées, en humant le kiosque de fleurs qui ornent l’accueil.

J’aperçois pas moins d’une vingtaine de différents Kombucha, tel un mur. Mais qui donc engouffre ce genre de potion morveuse? J’entends Tracy me fredonner Crossroads alors que jamais des fruits et légumes ne m’ont autant fait de l’oeil; les bananes sont suspendues, les asperges se trempent les pieds dans l’eau, les laitues se font rafraîchir telles des divas. Alors que je peine à choisir un simple yogourt, des pancartes publicisent le gentleman fermier ou encore la maman vétérinaire aux petits soins pour ses chèvres nourries à la luzerne.

C’est qu’on a bâti une solide entreprise de lifestyle avec ce commerce et ça joue avec nos émotions de toutes parts.

Tsé y’a quelques années lorsqu’on se définissait par le: «Je suis U2 ou encore Petshopboys plutôt que Mariah Carey». Bin voilà que certains se définissent comme individu par: «Je suis très whole foods you know? Je constate que ce public est assez hétérogène: bien sûr Miss Yoga en leggings avec son rouleau lululemon sous le bras, Rico et son v-neck bien garni, le triathlète dégoulinant en souliers à clips, la dame sandales-et-bas-blancs mais aussi, des gros, des grands, des complets-cravates et même des plastifiées!

J’imagine qu’ils sont évangélisés par le même crédo annoncé en couleurs: «Eat like an idealist.»

Au-delà de ce portrait microsocial, je me demande si les chips font moins engraisser ici en tentant de faire abstraction de l’imposant étalage devant moi. Le bon vieux concept de ne pas en acheter pour ne pas en manger!!

Je file vers la section bouffe pour emporter qui, soit dit en passant clanche beaucoup de restos. C’est que je suis indécis, pas mal de trucs me font de l’oeil. J’opte pour une lobster chowder et ses croutons, un demi-sanwich au thon-tataki-mayo-wasabi. Je bifurque vers la vitrine de biscuits avant de me placer en queue pour la caisse. Ici on a remplacé Ricardo et 7 jours par le Psychologie today et Yoga Intl, en lien bien sûr avec le lifestyle bien maîtrisé de la bannière. Ma théorie veut que les sacs en papier sont si jolis que les clients oublient de facto leurs sacs de tissu-plastoche dans le coffre de l’auto électrique. N’empêche qu’il faut quand même être zen pour avaler la facture recyclée!

Je m’installe dans la section pique-nique à l’extérieur afin de dévorer mon dîner. Bel endroit pour zyeuter, peu importe vos intérêts naturels: le salon de l’auto «live» du stationnement? Les panneaux solaires qui brillent au-dessus de la véranda? L’adolescente – on dirait une amie de ma fille – les cuisses et fesses bien à l’air de par son short-jean beaucoup trop court, dont les sms ding-dongnent sans arrêt? Ou bien cette dame en jolis talons accompagnée de son petit jappeux? La poubelle étant un brin compliquée pour un gars comme moi, vaut mieux attendre que la blonde-yogi au coin se lève afin de lui demander conseil…

Et pis en passant le souriant caissier avait les fesses si… imposantes que j’y ai trouvé naturellement ma réponse sur les chips, même organiques ou cuites dans l’huile de soya!

NOUVELLES SUGGÉRÉES

0 Comments

Submit a Comment

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site est protégé par reCAPTCHA et les politiques de confidentialité et conditions de service de Google s'appliquent.