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Poudre blanche à saveur de curry

Par Journal Accès

Sous la patte d’Omalley par Christian Genest

Je vous ai raconté le dessert de mon périple indien y’a une quinzaine de jours, telle une thérapie… un genre d’exutoire émotif, parfait pour mariner certains questionnements existentiels résonnant comme un acouphène.

En voici le préambule: Destination Kashmir afin de découvrir l’Himalaya en ski, peaux de phoque et sac à dos, tel un powder-junky, celle qu’on s’envoie en pleine face en faisant flotter nos «fat skis».

En grand garçon avide d’aventures toujours «plus plus plus!», je m’étais sincèrement fait croire que je pouvais en assumer les aléas… je vous laisse juger de ma naïveté.

Douce arrivée à Delhi, suivie d’un transfert de l’aéroport international au garage indien municipal pour voler sur les ailes de Spice Jet. Après beaucoup trop de contrôles de sécurité inefficaces, je dois même laisser ma musette Rapha à l’agente de bord en hijab en foulant le tube d’embarquement menant à l’avion. En effet, tous les bagages cabines sont systématiquement refusés, et une affiche annonce clairement: «No arms and explosives in the main cabin». Shit, moi qui croyais que les sommets de l’Himalaya allait provoquer de la turbulence! Je pourrais vous raconter que ma gang de skieurs-blancs-becs et moi étions les seuls blancs à bord, qu’il n’y avait pas de poignée sécurisée sur la cabine de pilotage et qu’on y entrait comme dans un moulin alors que les beaux-frères barbus défilaient continuellement aux WC à l’avant…  Mais j’aurais trop peur que vous me preniez pour une «nénette»… passons.

Au carrousel, y’a des gueules sympathiques… vous savez, le genre qu’on nous présente au TVA de 18h tous les soirs et… p-a-r-t-o-u-t.

O.K… Pranayama! Au secours!

C’est que Srinagar est l’aéroport indien le plus au nord, et par le fait même, celui où l’on débarque pour prendre le thé à Kaboul sans se faire tatouer son passeport… Genre!

Et c’est là que je me fais accoster par Oussama:

«Hey Foreigner, where are U from? Where are you staying?»

Fuck, dans ma tête de con, je me disais… «Tsé, il faut que tu fasses une pause entre les 2 phrases man!»

Oh et… J’suis quoi moi?

«I’m from Switzerland, not speak English».

Tiens, dans les dents!

For the record… J’ai la patte qui shake, pendant que j’essaie de ne pas décortiquer son look barbe, cheveux rasés, ti-casse blanc et costume traditionnel-chic taliban gris.

Mânsour, notre chauffeur qui baragouine environ sept mots anglais, doit nous conduire jusqu’à Gulmarg. Y’a des soldats partout, mais partout. Bon, ça je le savais, on me l’avait dit avant de partir.

C’est que le Kashmir aimerait être indépendant. Les Indiens en ont donc profité pour faire de ce territoire la plus grosse base militaire indienne. Mais les blindés pis les AK47…  bonjour l’ambiance.

Sur la route en ascension qui traverse d’abord ce qu’ils appellent une ville, on se fait dévisager à tous les arrêts, jusqu’à ce que sept gardes nous bloquent le passage, carrément.

Notre chauffeur baisse la glace et discute, puis s’explique et finalement s’énerve… pis en Arabe svp… On dirait que c’est plus violent!

Jusqu’à ce qu’un G.I. indien crisse un coup de crosse de son semi-automatique sur le capot de la jeep. On comprend que c’est assez.

Eric pense que ça y est, c’est le cachot pour nous tous et on va finir sur YouTube.

Mânsour nous fait signe de sortir des $ alors qu’il s’affaire à installer les chaînes sur les pneus du 4×4, en chuchotant: «No passport».

Ouffff!!! On est repartis, n’empêche que ça jase pas fort durant le dernier 30 minutes d’ascension qui nous conduit à ce que l’on rêvait: notre hôtel!

Le Highlands: un genre de club house/restaurant, un wifi à pédales-genre et quelques baraques non chauffées et non isolées.

Pas de lumière. Un petit chemin enneigé me conduit jusqu’à mes quartiers. Je me sens essoufflé… pas mal même.

On est dans Astérix au Kashmir, sauf que je ne l’ai pas lu celui-là, et qu’il me manque la foutue potion magique.

Aparté. Dans ce genre de situation où je suis hors de ma zone de confort, il arrive fréquemment que mon cerveau parte en vrille, à la Dr Jekyll and Mr Hyde, vous voyez?

Exemple Kashmiri:

Je freake: on gèle, il fait noir, y’a aucune sécurité… Vive les vacances!

Non mais, était-ce vraiment nécessaire de chasser la poudre jusqu’ici?

Et si là là là… t’en avais plein la gueule, hein?

L’élément central décoratif: une truie, oui une f%?$#%? truie! Et pis la salope n’a pas chauffé depuis un moment parce qu’on se les gèle, ça transperce les os.

On se rejoint au quartier général où quelques Australiens nous enfument avec leurs bidis.

J’enfile une KingFisher, et puis une autre, avant de déguster du Korma Mutton. Je décline le papadum aux raisins en guise de dessert. Allez hop, un scotch plutôt qu’un masala chaï… au diable l’Inde et son pseudo Yoga!

Il se fait tard. Comme l’ambiance est assez tendue et que le mec qui pédale pour faire tourner le routeur semble avoir fini son chiffre, je me dirige vers ma planque en guise de nuit.

Pantalon mou, capuchon KSL, bas de laine, tuque et couteau opinel en poche, je me cache sous la couverte après avoir avalé un «mini-gramme» de Rivotril et syntonisé Rye sur mon Iphone. Je décroche enfin sur Shed Some Blood pour me réveiller congelé au petit matin.

Est-ce le son du Salât, l’envie de pipi, ou le glaçon sur mon nez qui m’a poussé au réveil? Ce n’est pas clair. Sans doute les trois en même temps.

Après un Kashmir Kawa en compagnie de Farouk, qui essaie de me raconter qu’Allah a soigné son fils, je le convaincs, à l’aide de quelques roupies, de bourrer la truie toute la journée, si bien qu’après avoir poussé le lit près de celle-ci, je pourrai dormir confortablement lors de la seconde nuit.

Le planning  est cocasse: vieilles gondoles françaises qui nous tirent tant bien que mal à 4600 mètres d’altitude, guide au look chèvre pas très loquace, Kashmiris sur motoneige qui nous reprendront au «call» du guide sans GPS.

Malheureusement, la chasse de poudreuse a été très décevante. On aurait plutôt dit un trip de géologie. C’est, semble-t-il, la pire année en 40 ans dans la région. Dommage, car les montagnes himalayennes sont majestueuses, et le défi semblait relevé.

Une avalanche a même décroché le groupe nous précédant, ce qui sonne le glas de notre aventure en montagne qui aura duré… deux jours. Snif snif.

Après avoir rencontré autant de gueules de terroristes au chic aéroport de Srinagar, j’avoue assumer totalement plier bagages, rentrer à Delhi et m’offrir une nuit de luxe au Park Hotel.

Morale de l’histoire: la neige en Himalaya, c’est comme le curry: «over-raté»!!!

L’an prochain, pour la ski-week avec les adu-lescents, on se fait un Vail avec un Chardonnay américain hors de prix au dîner!

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