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Rêver en couleur

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Chronique d’un X

Jean-Claude Tremblay

Mari, père et fils. X de génération, homme d’affaires de profession. Rebelle sensible et constructif, ardent dénonciateur d’injustices. Protecteur des miens, éternel Laurentien.

« Est-ce que ça va être ça le projet, faire le tour du monde et rêver en couleur, pis ensuite revenir et découvrir qu’on n’a pas les moyens de nos ambitions ? », a demandé, avec sarcasme, une commissaire d’école, en entretien à la télé.
« Nos écoles, c’est un tel désastre en ce moment… On ne peut pas s’imaginer que toutes les écoles vont ressembler au rêve de Pierre Thibault », a lancé avec un cynisme déconcertant la journaliste au ministre de l’Éducation, toujours à la télévision d’État.
« C’est nous qui avons l’expertise… on est capables de s’arranger, on sait quoi faire et tout est disponible à même le réseau; c’est insultant tout ça… que l’on nous donne l’argent! », ont lancé sans pudeur des présidents de syndicats, en entrevue à la presse écrite.
Avec délicatesse, j’ose ouvrir cette chronique avec la question suivante : sachant que l’on a déjà « tout ce qu’il faut », pourquoi ne sommes-nous pas déjà des modèles pour le monde entier ?
Ricardo Larrivée était mignon tant qu’il se mêlait de ses chaudrons. Pierre Thibault avait l’air pur tant qu’il s’occupait de sa propre architecture.
Nul mot n’était dit tant que Pierre Lavoie s’occupait juste de ses grands défis. Ils étaient tous plus faciles à aimer, tant qu’ils demeuraient dans leurs respectifs quartiers.
La levée de boucliers qu’a provoquée l’initiative Lab-école n’est que le reflet d’une société qui a la fâcheuse habitude de juger avant même d’avoir consulté. D’où nous vient ce pernicieux réflexe de tirer à bout portant à travers la porte, dès que l’on entend la sonnette ? En consultant le document de projet, j’ai été rassuré d’apprendre qu’il ne s’agissait pas d’un plan machiavélique, mais plutôt d’une rafraîchissante initiative de réflexion collective. Une proposée par trois porte-parole bénévoles, dont la mission unique, jusqu’à preuve du contraire, semble être de réfléchir concrètement aux meilleures pratiques liées à l’environnement scolaire.
Néanmoins, l’appréhension est normale, le questionnement est nécessaire et la critique constructive est saine. Les gouvernements ont tellement pressé le citron de l’éducation qu’il faut comprendre la faible tolérance et le scepticisme de nos enseignants qui portent le système à bout de bras depuis trop longtemps. Mais chose certaine, ce n’est point dans la revendication nombriliste et dans le jugement de valeur, tantôt alimenté par des centrales, tantôt nourri par des pédagocrates, que nous allons construire un meilleur avenir pour nos enfants.
Imaginez que vous êtes un éminent médecin-oncologue, et votre propre enfant est atteint d’un cancer incurable. Votre dévouement n’a d’égal que vos compétences motrices, mais vous ne parvenez pas à le guérir, malgré votre acharnement. Le temps avance, et vous entrapercevez, avec douleur, la fin se pointer pour votre être cher. Arrive une personne étrangère, qui n’est pas médecin, qui, sans faire de promesse, vous propose de contribuer à la guérison à sa façon, en rassemblant et en se questionnant sur l’environnement. Que faites-vous :
1- Vous lui dites : « Non, mais pour qui vous vous prenez ?!? Merci, mais non merci. Moi seul sais ce qui est bon pour sauver la vie de mon enfant. Retournez d’où vous venez, je vais m’arranger ! ».
2- Vous lui dites : « Merci, peu importe qui vous êtes, mais j’accepte volontiers toute l’aide susceptible de sauver la vie de mon enfant et je choisis d’être partie prenante du projet de guérison ».
Notre enfant se meurt, métaphoriquement, et littéralement si nous poursuivons dans cette philosophie individualiste. Je ne sais pas pour vous, mais je sauterais sur l’option 2 avant que tout parte en fumée, comme « Laliberté » dans Pointe-Saint-Charles, quelque 11 années passées. Un mot manque gravement dans tout ce branle-bas de combat : altruisme. Nous avons tellement été écorchés comme société, que nos plaies ne se sont jamais vraiment cicatrisées – ce qui explique peut-être nos inhibitions et notre difficulté à nous faire confiance.
Force est de constater que les besoins immédiats sont criants et bien réels; c’est anormal – voire scandaleux – que les toits coulent et que certains profs doivent se résoudre à payer du matériel de classe de leur propre poche. Ces problèmes doivent impérativement être résolus, mais cela ne doit pas se faire en opposition à notre importante responsabilité de repenser l’avenir.
Remplaçons la peur, la colère et l’incertitude par le courage, la confiance et l’espoir. Accordons de l’importance à l’idée, au lieu de perdre notre temps sur le statut et la légitimité des porteurs de drapeau. Dépersonnalisons le sujet et gardons le cap sur l’objectif ultime : la création d’un environnement optimal qui favorisera le mieux-être et l’épanouissement de notre jeunesse.
JCTREMBLAYINC@GMAIL.COM

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