|

Raid Gaspésie International 2016

Par bsimard

Partie II : la course!

Benoit Simard, collaboration spéciale
Prologue Carleton-sur-mer
Le prologue est une mise en jambe quipermet de déterminer quelles seront les équipes à surveiller et qui prendra la tête du classement. Intense, les premières équipes espèrent le compléter en moins de trois heures, bonjour la zénitude!
Comme le temps de course sera court, la marge d’erreur sera d’autant plus réduite. Le départ est donné sur la grève près du phare, une course effrénée d’un kilomètre nous attend avant d’atteindre les canots, et ensuite direction PC (point de contrôle) 1 dans le barachois. Le Barachois, c’est une forme de baie où la mer vient se blottir de manière bucolique. Mais pour canoter, le peu d’eau rend les canots très lents, et on hésite souvent entre courir dans la vase ou ramer sa vie, sans résultats de vitesse.
La température est grise, il brumasse. Sous l’arche de départ, une ambiance fébrile et multiculturelle : plus de 13 pays sont représentés parmi près de 70 équipes. L’ajout d’un volet scolaire – avec plus de 200 participants – rend la place, déjà bondée, encore plus grouillante et bigarrée.
Quelques minutes avant le moment tant attendu, coup de théâtre : on nous informe d’un changement de parcours. La forte pluie de la nuit dernière à rendu une section de trekking trop dangereuse, et transformé une zone de transition en champs de boue inaccessible pour les véhicules d’assistance.
Des centaines d’athlètes s’agglutinent dans l’entonnoir, et tous ont hâte au décompte final : 10, 9, 8, …, 3, 2, 1, partez!
Pendant les premières minutes, c’est la cohue, tous auront la même stratégie d’être les premiers aux canots. Une reconnaissance préalable nous a permis de repérer là où le sol est plus dur, et où le sable et le varech nous permettront de bien poser les pieds.
Le départ donné, on est en mode action-réaction, c’est là où la préparation de la veille fera la différence. Les prochaines heures (et ce sera comme ça tous les jours) ressembleront à une partie de Tetris où les blocs doivent s’empiler les uns sur les autres le plus rapidement possible.
Tout va très vite, le peloton demeure serré. Nous sommes en tête de course et quittons un chemin pour attaquer dans la forêt dense, un «bushwalk» serré comme on dit. C’est un dilemme auquel nous ferons face tous les jours : la vitesse d’un chemin plus long, ou un raccourci dans une section difficile d’accès? Seule une autre équipe prend la même route que nous. Au début, face à la difficulté de la direction que l’on a choisi, on rigole à l’idée que les deux Estoniens qui nous ont suivis doivent regretter leur choix. Plus on s’enfonce, plus on doute… Pourtant nos deux nouveaux compères ne semblent pas s’en formaliser plus que ça. On apprendra par la suite que les larrons en question, les frères Timmo et Joosep Tammemä, en plus d’être champions du monde de Rogaine, sont 12e sur le circuit ARWS (Adventure Racing World Serie) et furent 5e au dernier championnat du monde devant le meilleur team américain!
Avec le parcours raccourci du jour, l’aventure se poursuit à une vitesse de folie. À quelques kilomètres de l’arrivée, nous sommes toujours tête à tête avec l’équipe Estonienne, nous sommes en vélo, et c’est notre force. Enfin, on réussit à se démarquer et on poursuit sans relâcher l’intensité, au point où Martin souffre un peu et me demande de prendre la carte témoin pour finir l’étape. Arrivé au PC19, je remarque immédiatement que le 18 n’est pas poinçonné.
– «Martin! Il manque le 18! »
– « Non, je l’ai fait c’était un triangle à trois points! »
– « Ok, mais il est mince en titi, faudra le montrer aux juges ce soir!»
Et on continue, pas de temps à perdre, l’équipe Estonian ACE Adventure peut nous rejoindre à tout moment! Les vélos sont déposés à nouveau pour poursuivre à la course. On s’enfonce dans un tunnel qui passe sous la 132 sur plus de 100 mètres, wow, toujours premiers!
Arrive enfin l’arche d’arrivée! Bonheur et accolades! …jusqu’à ce que les frères arrivent à leur tour et nous pointent la carte : ils viennent à nous, et nous font réaliser que nous avons effectivement manqué le point 18, qui se trouvait à environ 1 km de l’arrivée! Horreur! Manquer une balise ajoute 30 minutes de pénalité. Sans trop hésiter, on reprend la carte témoin et repartons à courir. Au final, il nous aura fallu une douzaine de minutes pour compléter, on a tout de même réussi à limiter la casse. C’est là que j’ai encore une fois constaté la force de notre équipe : malgré la déception face à ce faux pas, nous gardons la tête froide et regardons déjà pour trouver une solution et une méthode qui nous évitera une telle situation dans le futur.
Bilan du prologue : 28 km en 2h42’, nous sommes relégués à la 5e position, avec 12 minutes 20 secondes de retard. 2e chez les quatuors mixtes, derrière l’équipe Dynafit/SkiMoEast.com (dirigée par Patrick Lussier, athlète laurentien exceptionnel).
Première Étape : Les grottes de Saint Elzéar
L’organisation nous fait découvrir la région comme rien n’a pu le faire auparavant. Ce matin, un coéquipier par équipe doit aller chercher la carte témoin dans une grotte. La grotte de Saint Elzéar est apparemment âgée de plus de 230 milliers d’années, s’étend sur plus de 200 mètres de long à près de 35 m de profondeur. Pas mal, hein?
Nous patientons sous la brume et la pluie occasionnelle, heureusement, il ne fait pas trop froid, c’est même une température agréable pour faire la compétition. Ce sera un départ type Les 24 h du Mans jusqu’à nos montures, donc encore très intense pour démarrer.
Il est mystifiant (c’est le bon mot) de réaliser que malgré le nombre de combinaison de chemins possibles, de la vitesse variable de déplacement des équipes, et le risque de se tromper à tous moments, les équipes prennent la tête à tour de rôle. On se croit seuls au monde et pouf!, nous sommes face à face avec trois équipes! On pense avoir un retard irrémédiable et boom!, nous voilà en première place! Vous aurez compris qu’au fil des heures, on vit une montagne russe d’émotions en continu. Ne jamais baisser les bras et garder le moral sont primordiaux. Bien sûr, savoir où l’on est l’est tout autant!
Le menu du jour est complet : sections techniques et rapides à vélo, traversée de lac à la nage, descente de la rivière Bonaventure et de ses magnifiques fosses à saumon en canot, section de tyrolienne époustouflante. La base quoi…
Le moment cocasse du jour m’appartient : arrivé premier lors d’un point de contrôle, je saute sans hésiter dans une fissure où nous croyons trouver le point de contrôle. Mauvais calcul : le PC n’y est pas, et je reste coincé dans l’obscurité totale, dans un trou à deux mètres sous la surface.
Nous retrouvons nos compétiteurs Estoniens quelques minutes seulement avant la dernière tyrolienne, quelques équipes du 150 km se glissent entre nous deux et je dois malheureusement patienter avant d’effectuer l’épreuve. Le temps file et nous passerons la ligne en deuxième place.
Résultats du Jour 1 : 72 km de parcourus, 7 heures 35 minutes de course. 2e position à 3’17. Nous reprenons la tête chez les équipes mixtes.
(Suite et fin la semaine prochaine!)

NOUVELLES SUGGÉRÉES

0 Comments

Submit a Comment

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *