Le festival juste pour rire Amérindien
Par Rédaction
Soirée culturelle sénégalaise à St Jérôme
Si vous croyez que le Festival Juste pour rire est originaire de Montréal dans les années quatre-vingt, vous faites erreur. Le festival de l’humour Juste pour rire débute lors de la rencontre des Européens et des Amérindiens au 17e siècle.
En effet en nous décrivant comme des visages pâles et les jésuites comme des robes noires, les Amérindiens avec leur langage imagé inauguraient ce festival qui a perduré jusqu’à nos jours. Un de ses initiateurs fut le missionnaire jésuite, François-Joseph Lafitau, qui fut le premier à se servir de planches de botanique et qui en vint à découvrir le ginseng d’Amérique du Nord en 1716.
Le père Lafitau, que nous soupçonnons d’être un pince-sans-rire, ne nous a pas informés s’il a personnellement utilisé les vertus du ginseng… Toujours est-il que ce bon père jésuite nous a laissé un livre intitulé «Moeurs des Sauvages
Armoriquains» dans lequel nous pouvons aisément retracer le premier festival juste pour rire: «revenons à notre propos: après avoir bien banqueté, faisant des fluttes des os des bras et des jambes de leurs ennemis et autres instrument» n’est-ce pas là un bel exemple d’humour rouge, le vrai sens de l’humour, soit de faire participer ses ennemis à son festival intime… Un autre festivalier…le chef Outaouais Chingouessi, qui le 2 août 1701, alors qu’il arrive à Montréal pour la grande rencontre de paix avec le gouverneur Callières, lui adressa «une harangue pleine de sel» «je ne t’amène point d’Iroquois car j’ai mangé tous ceux que j’ai pris… »
Quant au chef Huron,Kondiaronk,il est aussi un familier de la gastronomie amérindienne… cela survint lors de la même conférence de paix alors qu’il fit un long discours dans lequel il rappela aux délégués Iroquois: «Que les Tsonnontouans avoient violé autrefois la Paix générale, ne se promettant que l’entière destruction des François, ne voulant pas même épargner son Père qu’il vouloir mettre à la chaudière, puisqu’un Iroquois menaça Monsieur de Frontenac,de boire son sang dans son crâne… Que leur frère Corlard les traittoit si durement eux qui avoient perdu dans cette guerre la plus grande partie de leurs guerriers en soutenant son parti, qu’il ne les avoit pas mis à l’abri de l’incendie de leurs cantons et de leurs forts que leurs mains étoient toutes ensanglantées de celui de nos alliez, que leur chair étoit même entre leurs dents et que leurs lèvres en étoient toutes bordées, que l’on connoissoit leurs coeurs dissimulez…» Une année faste pour le festival de l’humour fut l’année 1759-1760. Écoutons Louis-Antoine de Bougainville,aide de camp de Montcalm,nous faire part de la joie de vivre amérindienne… «Il y a il est vrai, nos alliés,les indiens, Bougainville voit arriver avec une allure martiale, quarante Folles Avoines débarqués de cinq grands canots, à leurs décharges de coups de fusils, ponctuées de grands cris, la place répondit par trois coups de canons. Ils montèrent en deux colonnes vers le château de Montréal, des chevelures pendues à leur ceinture, des prisonniers entre leurs deux filles. Des baguettes ornées de plumes à la main, ils adressèrent au gouverneur de la Nouvelle-France, Pierre-Rigaud marquis de Vaudreuil une courte, mais vigoureuse harangue: “Nous avons, dirent-ils, fermé les yeux et jeté notre corps au travers de la mort, en bravant la petite vérole pour venir joindre avec monsieur Marin, monsieur de Villiers et attaquer tous les vaisseaux anglais, nous apportons à notre père toute la viande que nous avons gagnée.”»
Cette viande étant leurs prisonniers…
Autour d’eux, ils dansèrent le pas de la victoire au son du tambourin. Spectacle singulier, note Bougainville, plus propre à effrayer qu’à réjouir. Les Folles Avoines entonnèrent leur chanson de guerre qu’ils qualifiaient de prière, au maître de la vie et ils demandèrent un chien parce qu’ils avaient rêvé que cela leur porterait bonheur. À un de leurs enfants, âgé de six ans qui versait des larmes, ils avaient donné un de leurs prisonniers à tuer…
Mais le plus grand sens de l’humour revient sans aucun doute au guerrier Ahatsistari.
Lors de son retour au pays des Hurons accompagné du père jésuite Jogues, il tomba aux mains des Agniers lors d’une embuscade. Les prisonniers furent conduits dans leur pays (Iroquoisie), et en cours de route on les tortura. Ahatsistari fut privé de ses deux pouces et on lui enfonça un bâton pointu jusqu’au coude par l’une des plaies béantes. Arrivés au village, les prisonniers eurent à subir d’autres tortures et au bout de sept jours les chefs Agniers décidèrent de laisser la vie sauve à tous les captifs Hurons, sauf à trois qu’ils condamnèrent à mourir dans les flammes. L’un de ces trois était Ahatsistari,il fut supplicié au village de Tionontoguen. Au lieu de lancer le cri habituel des autres captifs mourants: «Que quelqu’un se lève de nos os pour nous venger», il pria ceux de ses compatriotes Hurons qui assistaient à la scène, de ne pas permettre que le souvenir de son sort, influence le moins du monde le traité de paix avec les Iroquois.
Voilà un amérindien qui avait le sens de l’humour…