Stone, le monde est stone
Par Josée Pilotte
Ça fait déjà quelque temps que je mijote cette chronique, peut-être parce que je sais que c’est un sujet très délicat et qui touche plusieurs de mes amis: nos enfants, leur éducation, notre responsabilité dans leur équilibre. Personne n’aime se faire donner une leçon ou se faire faire la morale sur ce qui nous est le plus cher au monde. Nos enfants. La chair de notre chair.
Mais. Difficile de ne pas porter un jugement sur une situation qui me semble à mon avis alarmante. Oui, difficile de ne pas se poser la question: pourquoi?
Je ne veux pas faire de pédagogie, ou ma maîtresse d’école, je ne suis pas psychologue non plus, ni même médecin, mais que s’est-il donc passé entre mon époque et celle d’aujourd’hui? Avant, dans nos écoles, il y avait un «gros», un «enfant de parents divorcés», un «roux»… pis un «tannant». Aujourd’hui je ne sais combien il y a de roux (pis de toute façon, c’est à la mode!), mais il semble que les tannants se soient multipliés de façon exponentielle, puisque le nombre de comprimés de Ritalin prescrits a bondi de 129% en cinq ans. C’est pas des farces: à la fête de mon petit Lou, sur 10 de ses amis, trois étaient sous médication. Toujours selon les mêmes statistiques d’ailleurs, près de 40% des ordonnances remises au Canada viennent du Québec.
Bon. Ça donne des frissons de penser que nos jeunes même très jeunes ont déjà des problèmes d’anxiété, d’estime de soi (puisque le quart des enfants présentant un TDAH en souffrent). C’est-tu ce qu’on mange, ce qu’on fait, c’est-tu les ondes?!… en tous cas, y’a quelque chose dans l’air ou dans l’eau!
Si nous, nous avons été les enfants «testés» avec toute la «marde» des pesticides, des colorants artificiels, etc… nos enfants, eux, en plus d’hériter de nos gènes déficients, sont les enfants «testés» de la «marde cathodique», du lobby du sucre, de la pub’, des fast-food, des aliments transgéniques….
Que l’on me comprenne bien: je ne dis pas que des enfants n’ont pas besoin de Ritalin pour fonctionner, je dis seulement qu’on a un maudit problème. Je dis aussi que c’est infiniment triste, cette situation Je sais que certains d’entre vous allez me dire «Écoute Chose, quand tu vois mal tu te fais prescrire des lunettes, quand tu fais de la haute-pression, on te prescrit une pilule!» Je comprends bien, mais messemble que quand tu fais de la haute-pression, tu ne fais pas juste prendre des pilules: tu coupes aussi le sel!
Ces troubles nouveaux viennent en grande partie d’éléments extérieurs à la physiologie, comme de notre style de vie, de l’hyper-stimulation, des exigences souvent démesurées de compétence et de performance. Et les parents ne sont pas seuls en cause, les institutions, elles aussi, le sont. Et les médias, et la publicité…
Mais.
Nous sommes aussi à la fois les produits et les producteurs de tout cela.
Vous l’aurez remarqué: cette chronique contient plus de questions que de réponses. Et, croyez-moi, moins de condamnation que de tristesse.