(Photo : Collection du Musée du ski des Laurentides)
|

Les Pays d’en Haut, terre d’adversité

Par Simon Cordeau

En ces temps de pandémie, il est bon de se rappeler que nos prédécesseurs, eux aussi, ont connu l’isolement, la maladie, la privation… et l’espoir d’une vie meilleure. Écrit avec l’aide de Paul Carle, président de la Société d’histoire et du patrimoine de Val-David.

Les Pays d’en Haut, terre isolée

Les premiers colons arrivent à Val-David vers 1850. Les premiers chemins, eux, n’arrivent qu’autour de 1880, et ils n’étaient pas ouverts l’hiver! Et le train arrive à Sainte-Agathe seulement en 1892.

Si vous vouliez tenter votre chance dans les « cantons du nord », on vous remettait un bond de la colonisation, un petit papier vous donnant droit de vous installer sur un lopin de terre. Vous vous rendiez ensuite à Shawbridge (aujourd’hui Prévost) où les chemins s’arrêtaient. Vous faisiez le reste du trajet à pied, dans le bois, peut-être équipé d’un sac à dos et d’une hache.

Arrivé chez vous, au cœur de la forêt laurentienne, vous faisiez une petite cabane temporaire, pour passer l’hiver, et vous commenciez à couper des arbres. Vous en couperez beaucoup, des arbres, pour construire votre maison et défricher votre terrain. Au moins, l’été suivant, votre femme viendra vous rejoindre, et après 2-3 ans à bucher, vous serez installés. Mais ne vous attendez pas à recevoir beaucoup de visite…

Les Pays d’en Haut, terre de privation

Bien des colons ont été amèrement déçus lorsque leur terre défrichée s’est révélée rocailleuse et pratiquement infertile. Les récoltes étaient à peine suffisantes pour survivre. Pour espérer gagner quelques piastres, il fallait, encore, couper du bois.

On raconte que des colons frustrés, en quittant la région, auraient laissé des pierres sur le perron du presbytère du curé Labelle, pour lui exprimer leur mécontentement. En perspective, les contraintes de la pandémie semblent plus tolérables.

Photo : Archives de la Société d’histoire et du patrimoine de Val-David

Les Pays d’en Haut, oasis pour les malades

En 1895, l’infirmière new-yorkaise Elizabeth Wand s’aperçoit que l’altitude et l’air sec de Sainte-Agathe forment le climat idéal pour les patients atteints de tuberculose. Entre 1895 et 1922, 22 sanatoriums seront construits dans la région.

À l’époque, le traitement peut prendre jusqu’à 20 ans! Ainsi, les familles viennent souvent visiter leurs proches en train. Tranquillement, elles prennent goût aux grands espaces naturels, aux lacs et aux sports d’hiver. Certaines familles finissent même par s’installer dans la région. Le tourisme, qui commence alors, sera l’un des principaux moteurs de développement des Pays d’en Haut.

À la demande des propriétaires de pentes, il sera enfin possible de se rendre à Sainte-Agathe par la route, en hiver, à partir de 1942.

Les Pays d’en Haut, terre envahie

L’arrivée massive de touristes crée bien des frictions avec la population locale. Les curés, qui ont la mainmise sur la vie sociale de la région, voient d’un mauvais œil ces touristes anglophones, la plupart protestants, et certains de la communauté juive de Montréal. Ce n’est pas d’hier qu’on craint l’arrivée des gens de la ville…

Nombre de colons y voient toutefois une manière de faire un peu d’argent et, peut-être, sortir de la misère. L’été, ils louent leur maison à des touristes et déménagent… dans leur grange ou leur remise. En 1947, on dénombre 450 maisons à louer à Val-David, soit presque l’entièreté du village.

Les Pays d’en Haut, terre d’exil… et d’espoir

Durant la Seconde Guerre mondiale, des Québécois qui fuient la conscription s’exilent ici. On construit des abris pour accueillir et protéger les déserteurs.

On croit d’ailleurs que beaucoup des premiers colons, autour de 1850, seraient en fait des Patriotes en exil. Plusieurs d’entre eux venaient de la région de Saint-Eustache, mais tout lien plus précis est difficile à documenter.

Quoiqu’il en soit, aujourd’hui encore les Pays d’en Haut accueillent les citadins qui fuient le stress et le brouhaha de la ville. Ces jours-ci on reçoit même, parfois malgré nous, ceux qui fuient la pandémie et son confinement.

NOUVELLES SUGGÉRÉES

0 Comments

Submit a Comment

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *