Sport et agressions sexuelles
Par Thomas Gallenne
Sujet tabou par excellence?
En réaction à cette affaire, l’organisme Élan Calacs de Sainte-Agathe a tenu à apporter certaines précisions. En effet, pour l’organisme de lutte contre les agressions envers les femmes, cette affaire soulève plusieurs questions dérangeantes qui doivent être réglées.
L’organisme rappelle d’emblée que les personnes en position d’autorité et de confiance peuvent provenir de divers domaines. «Il peut s’agir d’un professeur, d’un entraîneur, d’un bénévole, d’un imprésario, d’une monitrice dans un camp de vacances, d’un employeur, d’un gardien, etc.», décrit Chantal Ruel, intervenante à L’Élan et ancienne entraîneuse de ski elle-même. Selon elle, la position d’autorité et de confiance est une relation normale et enrichissante pour un jeune lorsque la relation est saine. «Malheureusement, certaines personnes utilisent cette influence, ce pouvoir, pour manipuler. Les agresseurs sont des maîtres dans l’art de la manipulation», ajoute-t-elle.
La relation entraîneur-athlète un lien affectif privilégié?
L’entraîneur a une grande influence sur les jeunes athlètes. Bien que dans la majorité des cas, cette influence s’avère être des plus positive, il arrive que certains intervenants sportifs outrepassent les limites d’une relation adéquate et saine. Le pouvoir que détient l’entraîneur, s’il est mal utilisé, peut placer les jeunes dans une situation de vulnérabilité. «N’oubliez pas, l’entraîneur détient le savoir et l’expérience tandis que le sportif est un « corps », malléable et jeune. L’entraîneur « sait » ; le sportif « exécute ». Il y a clairement une relation de contrôle et de pouvoir», insiste Mme Ruel. Le temps passé ensemble, l’intimité qui se crée et la relation de confiance qui se développe, confirment que l’entraîneur devient un confident ou même parfois un parent de substitution. Alors, une athlète qui admire son entraîneur pour sa personnalité, sa compétence ou son apparence n’est pas une raison valable pour lui remettre la responsabilité sur ses épaules.
Et la Loi sur le consentement sexuel avec une personne en position d’autorité et de confiance est clair. «Lorsqu’une personne se trouve en situation d’autorité ou de confiance face à une mineure, le consentement de cette adolescente à toute activité sexuelle n’est jamais reconnu par la loi», rappelle Mme Ruel. Dans ce cas, c’est l’activité sexuelle elle-même qui est criminalisée, peu importe que l’adolescente y ait consenti ou non. Cette règle vise à protéger les adolescents qui se trouvent en situation de vulnérabilité en raison de la nature de la relation qu’ils vivent avec certaines personnes.
Depuis la sortie de l’affaire dans les médias, certains ont rappelé le rôle des parents et des organisations auprès des enfants dans la pratique d’une discipline sportive. La confiance aveugle de certains parents envers l’entraîneur et la prédominance de la performance sur le bien être des jeunes sportifs sont des facteurs de risques, selon l’intervenante. Les parents peuvent aussi questionner jusqu’où va leur confiance? «Une confiance aveugle ne protègera personne, poursuit Chantal Ruel. Les organisations sportives ont aussi leurs propres réflexions à faire. Comment protègent-elles les jeunes athlètes? Comment cet homme peut avoir eu accès à des jeunes pendant aussi longtemps, alors que dans le milieu, ça se savait? D’accord la présomption d’innocence, mais qui doit-on protéger?»
Les réactions de l’entourage deviennent alors cruciales dans ce processus selon la spécialiste. «Lorsqu’une personne décide de briser le silence entourant ce secret néfaste, les réactions aidantes de l’entourage seront déterminantes. Une femme qui ose dénoncer ce qu’elle a vécu, a besoin d’être crue, de ne pas être jugée, d’être écoutée et validée dans ses émotions», conclut Chantal Ruel.
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