Anne Desjardins
Par Martine LavalCelle par qui le terroir des Laurentides prit vie
C’est grâce à la chef Anne Desjardins que le Québec prit conscience de la richesse de son terroir, de ce qui y pousse, s’y cultive, s’y élève, s’y produit. L’Eau à la Bouche, son restaurant ouvert en 1980 à Sainte-Adèle fut pendant trois décennies la référence de la gastronomie québécoise.
Inconsciemment initiée aux plaisirs de la table par une grand-mère au palais fin et exigeant qui cuisinait divinement à partir de produits choisis avec minutie, et par une vie de famille voyageuse qui lui permit de savourer la fraîcheur et la saveur des produits de proximité en même temps que découvrir de nouveaux mets et cultures, Anne Desjardins est passée par la passion de la géographie avant d’aboutir dans l’art de cuisiner.
D’abord autodidacte, sans expérience ni prétention mais nantie d’une collection de livres traitant de recettes, techniques et histoire de la cuisine, la jeune chef remit cent fois son ouvrage sur le métier. Après quelques séminaires à l’ITHQ (Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec), et des rencontres enrichissantes lui permettant de faire évoluer son art, le couple qu’elle forme avec Pierre Audette ouvrira son restaurant en 1980, à même la maison achetée à Sainte-Adèle. L’Eau à la Bouche est né!
Avide de fraîcheur et d’originalité, la clientèle est heureuse de découvrir une nouvelle façon de vivre l’expérience gustative. Produits frais, locaux, saisonniers, cuisinés sur place, sans additifs ou produits industriels ajoutés, mais plutôt de façon tout à fait naturelle… c’est l’ébahissement! Les encouragements fusent de toutes parts permettant l’ascension, l’élargissement des connaissances et l’approfondissement de ce talent inégalé à cette époque qu’est celui d’Anne Desjardins.
Jardin d’herbes et de fleurs comestibles, qualité et fraîcheur des produits, diversité des produits régionaux utilisés, fierté, solidarité, complicité avec les fournisseurs, producteurs, éleveurs, elle fait connaître l’abondance des produits des Laurentides.
«Ma région est mon jardin» affirmera-t-elle fièrement.
«Aujourd’hui je considère que le pari est gagné. Il est dorénavant accepté et entendu par la plupart des cuisiniers d’ici que les produits régionaux sont un atout dans nos cuisines. En retour, les producteurs ont bien compris l’avantage de faire connaître leurs produits par les chefs, confirme la chef-propriétaire dans son livre L’Eau à la bouche, les 4 saisons selon Anne Desjardins. Vitalité, originalité, spécificité de notre approche culinaire, la cuisine québécoise est reconnue parmi les plus réputées.»
Parmi tous les grands honneurs reçus au fil des années, sa plus grande fierté et surprise est le titre de Chevalier de l’Ordre du Québec, une première dans l’hôtellerie. Pour son apport innovateur à la gastronomie québécoise et sa contribution à son rayonnement dans le monde, grâce à sa ténacité et à sa créativité, Anne Desjardins a atteint son rêve d’être chef reconnue par ses pairs à une époque où les femmes n’étaient pas légion dans la haute gastronomie. Aujourd’hui dans la soixantaine, Anne Desjardins est un modèle dans son métier et une référence pour les jeunes chef-s.
C’est pour honorer le parcours de celle qui nous a mis l’eau à la bouche pour les produits du terroir, qu’au cours des prochains mois, j’irai à la rencontre des fermiers, agriculteurs, éleveurs, producteurs des Laurentides, à la recherche de nouveautés à faire connaître, afin que nous poursuivions à mettre sur nos tables, le meilleur de notre «nordicité» et de notre terroir québécois.
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