Du Kilimandjaro au Mont Royal

Par Cedric Leblanc

Récemment l’animateur et chef d’antenne Pierre Bruneau, du réseau télévisé TVA, réalisa «l’exploit» de l’ascension du mont Kilimandjaro tout en parrainant une levée de fonds pour la recherche sur le cancer. Téléphone portable à la main, médicaments pour contrer les effets de la raréfaction de l’oxygène, précédé d’une ar­mée de porteurs, présence d’un mé­decin et équipement sophistiqué, «l’exploit» fut réalisé. Notre ami Bruneau de retour à son poste reçut moult félicitations pour son acte de «bravoure».

Le même Pierre Bruneau depuis des années en contact avec l’animatrice météo Colette Provencher affiche toujours une crainte infantile et déraisonnable lorsqu’elle fait part de nouvelles chutes de neige ou de refroidissement alors qu’elle resplendit le bonheur d’être à l’extérieur notamment de profiter des sports d’hiver, ce qu’elle fait. Quant à l’ami Bruneau il n’a pas le choix devant tant d’optimisme à acquiescer du bout des lèvres, que oui il fait bon s’activer à l’extérieur.

Le «vainqueur» du Kilimandjaro pensant exactement le contraire. Mais voilà que quelque temps après sa «victoire» sur la montagne, un autre interlocuteur se pointe à son émission témoignant de la rigueur de l’hiver, et qu’entendons-nous avec stupéfaction, l’homme qui a peur d’avoir froid, celui qui depuis des millénaires grelotte dans son studio télévisé devant Colette, dire: «On ne peut pas tous avoir eu le cran de monter le Kilimandjaro» et son interlocuteur, vassal de service, de s’aplatir bêtement et de l’encenser sur son «exploit».

Montréal 8 février 1975, j’entreprends à la course à pied la montée du Chemin Cami­lien-Houde jusqu’à la croix du Mont-Royal, 6 km en partant de l’intersection Gatineau Lacombe, habituellement je fais l’aller-retour, ce matin je ne fais que l’aller puisque je travaille au poste de police de la montagne. Quelque 30-33 minutes plus tard me voilà au sommet près de la croix dans l’allée des renards et je contemple la ville, soleil éclatant, froid vivifiant, l’horizon est magnifique, je réalise que ce que je vois et l’endroit où je suis, est là où 340 ans plus tôt un certain Jacques Cartier contempla exactement ce que je voyais et il nous en a laissé la description écrite «Après que nous fûmes sortis de ladite ville (Hochelaga) fûmes conduits par hommes et femmes de la place sur la montagne, mentionnée plus haut, qui est par nous nommée Mont-Royal, distante dudit lieu d’un quart de lieu. Et, étant sur ladite montagne, eûmes vue et connaissance de plus de trente lieues, à l’environ de celle-ci; vers le nord, il y a une rangée de montagnes (les Laurentides) s’étendant d’est en ouest, et une autre (Adirondacks et Montagnes Vertes du Vermont) vers le sud. Entre ces montagnes est la terre la plus belle qu’il soit possible de voir labourable, unie et plate. Et au milieu desdites terres voyons ledit fleuve (Saint-Laurent) outre le lieu où étaient demeurées nos barques, où il y a un saut d’eau, le plus impétueux qu’il soit possible de voir (Rapides de Lachine); et qu’il nous fut impossible de passer; et aussi loin que l’on pouvait regarder ce fleuve était grand, large et spacieux, et allait au sud-ouest et passait auprès de trois belles montagnes rondes (Saint-Bruno, Saint-Hilaire, Rouge­mont) que nous estimions être à environ quinze lieues de nous (45 milles).»

Voilà, il y a des montagnes plus hautes que les autres, le Mont Royal est plus haute que le Kilimandjaro, qu’on se le dise, je dois quitter, le froid m’attend et il ne m’a jamais vaincu, c’est même un ami.

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