Monique Giroux : Grande ambassadrice de la musique d’ici et d’ailleurs
Par Martine Laval
Animatrice, auteure, conceptrice et productrice, Monique Giroux est une figure de proue de la culture québécoise et francophone. Défenseure passionnée des artistes d’ici, elle encourage, conseille, et admire ceux et celles qui risquent, qui secouent et qui mordent dans la création sous toutes ses formes. Elle accueille avec originalité et ouverture tous les grands artistes d’ici et d’ailleurs, les présentant avec chaleur et respect, à un public qui se laisse séduire et en redemande. Rencontre avec une grande dame de la culture de chez nous, grâce à qui la langue française chantée est promue à sa véritable grandeur.
D’où vous vient cette passion pour la musique francophone que vous vous faites le devoir de soutenir, de promouvoir et de faire découvrir, Monique?
J’en ai souvent cherché la source et je crois qu’il y en a plus qu’une, mais ça se résume simplement. Je suis fille unique, mon père était ouvrier chez Marconi et fou de la radio; on l’écoutait en même temps que la télévision. J’ai donc grandi entourée de son, pour ne pas dire de bruit et j’ai eu très tôt une fascination pour la radio. Je l’écoutais, je la regardais même, aussi curieux que cela puisse paraître, tentant de comprendre d’où ces mots et ces sons provenaient.
Ma grand-mère vivait avec nous et écoutait beaucoup Radio-Canada, ce qui eut une influence bien sûr. Toutes ces chansons sont devenues une sorte de refuge, des amies, chacune m’enseignant la philosophie : Léo Ferré, l’anarchie, la liberté; Félix Leclerc, la nature; Gilles Vigneault, le pays; Barbara, la solitude… Ces gens-là ont été mes profs de philo. Très tôt, je m’enfermais dans ma chambre, sous mon gros casque d’écoute que mes parents m’avaient acheté, tant j’écoutais toujours de la musique. « Je m’en suis fait presque une amie » comme chantait Georges Moustaki en parlant de la solitude, mais en fait, la musique a été ma meilleure amie.
Parlez-moi du spectacle Des mots sur mesure qui prendra place au Patriote le 19 mai.
C’est une très belle initiative qui en est à sa 7e édition et près de 50 artistes en ont fait partie jusqu’à maintenant. Le projet a été créé à l’origine à la Maison de la culture d’Ahuntsic à Montréal par Liette Gauthier, responsable d’un festival du monde, maintenant directrice artistique de la Maison de la culture d’Ahuntsic. Elle a de très nombreuses connaissances en musique du monde, et le circuit des artistes néo-québécois qui, dans leur pays, sont des artistes professionnels, lorsqu’ils débarquant ici, se réfèrent très vite à Liette qui présente alors des spectacles formidables.
Ce genre de spectacle a vite été proposé à d’autres diffuseurs partout au Québec et dans toutes les Maisons de la culture de Montréal.
Le concept est le suivant : les artistes présentés n’ont jamais chanté en français avant cet événement et certains ne parlent pas la langue, étant arrivés depuis peu.
Le principe du vivre-ensemble est porté à son apogée, alors qu’on propose à ces artistes, venus de partout, des chansons québécoises connues de tout l’auditoire d’ici, mais qu’eux ne connaissent pas bien sûr. On leur donne deux chansons.
La première comprend paroles et musique que l’on demande d’arranger à leur façon, avec instruments traditionnels si désiré, et chantée à leur guise. La deuxième, on ne leur donne que le texte pour lequel ils doivent composer une nouvelle musique… ce qui nous vaut par exemple La complainte du phoque en Alaska chantée par un Sénégalais qui n’a jamais chanté en français, qui compose une tout autre musique et qui commence en disant : « Cré moé, cré moé pas, kek part en Alaska… » sur une musique que l’on ne connaît pas. Dépaysant!
C’est un concept formidable, car l’auditoire reconnaît les paroles, cherche toutefois le titre de la chanson, et ça permet une complicité entre le public et les artistes qui se sentent appréciés et à qui on donne le droit de tâter notre culture et de la marier à la leur.
C’est le mélange des genres et des cultures : celle qu’ils ont choisie, et celle qu’ils apportent.
C’est un fabuleux cours de francisation et d’intégration finalement!
Oui, absolument! Et quand on fait le spectacle à Montréal et que les familles et les amis viennent, les témoignages fusent de toute part et on entend des choses comme : « Ça fait dix ans qu’on est ici, et c’est la première fois qu’on se sent aussi inclus! »
C’est un spectacle très bienveillant. Lorsqu’on en sort, on a envie de se prendre dans les bras les uns les autres…
Et il faut assister à la finale! On termine le spectacle avec une chanson, chantée dans chacune des langues des artistes sur scène. C’est très touchant!
Un mot de la fin, Monique?
Alors, moi, je salue le public audacieux qui viendra assister à ce spectacle, car c’est presque un geste humaniste, un geste fraternel que de prendre la peine de sortir de son salon pour aller assister à un spectacle comme celui-là. Ça va au-delà du divertissement. C’est accueillir ceux qui ont choisi de venir vivre ici dans la paix et à qui on dit : « Bienvenue! Voici notre culture. Aimez-la aussi, et faites-la vôtre ».
Des mots sur mesure, spectacle animé par Monique Giroux
Le vendredi 19 mai, 20 h
819 326-3655
www.theatrepatriote.com