Électrosmog et la santé des Canadiens
Par Thomas Gallenne
L’exposition à des champs électromagnétiques de radiofréquences (CEMRF) qu’émettent les postes de base (antennes relais) et les appareils de communication sans fil, peut-elle représenter un risque pour la santé?
Le 14 novembre dernier, les organismes Sauvons nos enfants des micro-ondes (SEMO), l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) et Option consommateurs (Oc) ont exigé du gouvernement canadien qu’il donne suite aux recommandations du Rapport du Comité permanent de la santé concernant l’impact des CEMRF sur les humains. Ils ont rappelé que la ministre de la Santé, Leona Aglukkaq, n’avait pas donné suite au dépôt du rapport – lequel a eu lieu en décembre 2010. Elle avait 90 jours pour y répondre.
De plus, dans le cadre de consultations publiques sur le projet de règlement de la Ville de Montréal visant à mieux encadrer l’installation d’antennes sur son territoire, ces mêmes organismes – appuyés par la Commission scolaire de Montréal (CSDM) – ont demandé l’application du Principe de précaution tant que l’incertitude demeure sur les risques à la santé causés par les CEMRF.
«Mesures» ou «Principe» de précaution?
Au Canada, c’est le Code de sécurité 6 qui détermine les critères d’exposition aux CEMRF. Or, ce dernier ne tient pas compte des effets de cette exposition à long terme sur le corps humain, ce que déplore François Therrien du SEMO, Ce dernier demande à Santé Canada d’appliquer le
Principe de précaution.
L’absence de certitude scientifique sur un éventuel lien de causalité entre l’exposition et des effets sur la santé, doit-elle nous empêcher de prendre des mesures pour protéger la population?
«Si ce principe a cours en Europe, il est loin d’être enchâssé dans nos constitutions nord- américaines, souligne André Fauteux, éditeur de la revue La Maison du 21e siècle. C’est la prépondérance de la preuve – ou de la règle du 50+1 – en droit civil, qui doit être démontrée. Par exemple, si la majorité des experts parle d’une menace sérieuse à la santé, les organismes de santé publique réviseront leur position.» Cependant, on assiste de plus en plus à une sensibilisation sur les questions sanitaires. «Ça prend la pression des citoyens pour que les politiciens, le gouvernement bougent», croit-il.
Rappelons qu’en mai dernier, le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC) qui fait partie de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), indiquait que l’usage des téléphones cellulaires devait être considéré comme « peut-être cancérogène pour l’homme ».
Depuis sa dernière mise à jour (octobre 2011), le site internet de Santé Canada suggère des «mesures» d’atténuations des effets des CEMRF pour les usagers de téléphones sans fil.
Qui contrôle la santé des Canadiens?
Nous avons demandé à Santé Canada quelle était la distance minimale préconisée entre un poste de base et les plus proches habitations, sachant que cette question fait l’objet de nombreuses craintes dans les études scientifiques les plus récentes – certaines études préconisant des distances supérieures à 300 mètres. La réponse du ministère a été pour le moins surprenante. «Santé Canada n’est pas responsable pour les limites de distances des antennes relais cellulaires dans les zones résidentielles, a répondu Olivia Caron, agente à la division des communications réglementaires et des relations avec les médias de Santé Canada, suite à notre demande. Je vous suggère de contacter le ministère de l’Industrie.» La santé des Canadiens serait-elle gérée selon les intérêts d’Industrie Canada?
En 2008, la journaliste du Toronto Star, Linda Diebel, révélait que de hauts fonctionnaires du gouvernement canadien, ainsi que des représentants de Santé Canada et Industrie Canada siégeaient sur le comité santé de l’Association canadienne des télécommunications sans fil (ACTS/CWTA), très puissant groupe de pression. Selon elle, de tels liens soulevaient la question à savoir qui influence Ottawa au sujet de la sécurité reliée à l’usage des téléphones cellulaires, et comment.
En 2011, plus de 25 millions de Canadiens sont abonnés à un réseau sans-fil. L’ACTS estime la contribution de son industrie à l’économie canadienne, à 41 milliards de dollars et quelque 261 000 emplois.