La perte de la démocratie scolaire : Un effet pernicieux
Par Rédaction
Par Philippe Leclerc
Depuis 2020, la gouvernance scolaire au Québec a été profondément transformée avec l’abolition des commissions scolaires élues. Ce geste, censé améliorer l’efficacité, a eu des conséquences sur la démocratie locale et scolaire.
Désormais, les citoyens n’ont plus de lien direct avec la gestion de leurs écoles. Les faibles taux de participation aux élections des commissions scolaires auraient pu être corrigés en alignant ces élections avec celles des municipalités. Pourtant, le gouvernement caquiste a préféré centraliser le pouvoir dans les mains des centres de services scolaires, des entités qui fonctionnent à l’abri des regards des contribuables.
Le Camping Donald : un exemple de ce nouvel effet
Prenons le cas du Camping Donald à Mirabel, un exemple concret de ce que cette perte de démocratie peut entraîner. Ce camping, apprécié par des centaines de campeurs depuis plusieurs décennies, sera exproprié pour laisser place à deux écoles. Une décision unilatérale et administrative du centre de services scolaire. Si la nécessité de construire des infrastructures scolaires n’est pas contestée, la manière dont cette décision a été prise est choquante. Aucune consultation citoyenne n’a eu lieu et aucun véritable débat public n’a été tenu.
Aujourd’hui, les campeurs se retrouvent sans solution. En guise de compensation, la Ville leur offre 1 000 $, une somme dérisoire face à la perte de leur espace de vie estivale, même si Mirabel n’avait aucune obligation de compensation. Ce montant symbolique apaise les consciences, mais ne répare rien. Ce qui est plus inquiétant, c’est que cette décision a été prise à l’abri des regards, sans consultation publique.
L’opacité bureaucratique et l’absence de responsabilité des élus
Ce manque de transparence reflète l’opacité qui entoure désormais la gouvernance scolaire. La loi permet aux centres de services scolaires de réquisitionner des terrains sans obligation légale de consulter les parties prenantes, comme les campeurs du Camping Donald. Le maire de Mirabel, Patrick Charbonneau, drapé dans la cause des générations futures, n’a fait que relayer la décision du Centre de services scolaire de la Rivière-du-Nord, en s’abritant derrière la bureaucratie et l’absence de disposition dans la loi. Cela soulève une question : quel est le rôle des élus municipaux dans cette situation ?
Doivent-ils se contenter de transmettre les décisions prises ailleurs, ou ont-ils la responsabilité de défendre les intérêts de leurs citoyens ? Offrir une compensation symbolique de 1 000 $ ne remédie en rien à la détresse des campeurs, visible dans les reportages. Pourtant, ni les élus provinciaux, ni les élus municipaux ne semblent répondre de cette situation. La décision appartient au Centre de services scolaire, mais qui en porte la responsabilité ? Le Ministre de l’Éducation ? Absurde.
Nos compatriotes anglophones : un modèle de démocratie scolaire préservée
On peut réintroduire une forme de démocratie scolaire, à l’image de ce qu’ont conservé les communautés anglophones du Québec. Contrairement au réseau francophone, les Anglo-Québécois ont gardé leurs commissions scolaires élues. Ce lien démocratique leur permet de continuer à avoir voix au chapitre concernant la gestion de leurs écoles. Si nos compatriotes anglo-québécois peuvent payer leurs taxes scolaires tout en ayant un droit de regard, pourquoi devrions-nous nous en priver ? Avons-nous vraiment économisé tant que ça au final en abolissant la démocratie scolaire ?
Nos conseils d’établissement, dernière défense de la démocratie locale et scolaire
Aujourd’hui, la démocratie scolaire semble en péril, mais elle n’est pas totalement perdue. Nous sommes en plein cœur de la période des assemblées de parents et de la formation des conseils d’établissement dans toutes les écoles du Québec. À défaut d’une vraie démocratie scolaire et d’élus municipaux qui jouent un rôle plus important, c’est ici que nous, en tant que parents et payeurs de taxes, devons nous impliquer. Ces conseils représentent la dernière opportunité de défendre les intérêts de nos enfants et de nos communautés. Le double rôle que nous avons à jouer est essentiel : celui de parent engagé dans la réussite scolaire, mais aussi celui de contribuable en quête de transparence dans l’utilisation de ses taxes.
La tarte aux pommes de la vertu, cette belle excuse de la construction d’écoles pour les générations futures, ne doit pas nous faire oublier que nous avons aussi un mot à dire, ici et maintenant. Pour les prochaines années, c’est en participant activement aux conseils d’établissement que nous pourrons, à défaut d’une démocratie scolaire vivante, jouer notre rôle. Toutes les communautés fortes se construisent en respectant les voix d’aujourd’hui, tout en préparant l’avenir de demain.
2 commentaires
Je suis tout à fait en accord avec ce que vous décrivez dans cet article monsieur Leclerc. Il est vraiment inacceptable et choquant de se faire passer ce genre de « sapin » sous le nez sans aucune consultation publique, en toute opacité, par les centres de services scolaire. Ce qui me choque énormément est que tout cela est fait en catimini et en toute impunité. Un autre désastre orchestré par Legault et la CAQ qui n’en sont pas à un désastre près ! Que reste-t-il donc de vraie démocratie au Québec ? Celle-ci s’étiole à vitesse grand V. Certes nous avons besoin de nouvelles écoles mais pas au détriment des loisirs d’été d’une population qui n’a que quelques mois d’été pour en jouir et qui, de plus, a de moins en moins les moyens financiers de se payer des vacances dignes de ce nom, loin de chez-elle. Notre qualité de vie diminue rapidement quand nous sommes gouvernés par des gens sans vision et par beaucoup trop de crétins !
Merci M. Leclerc de mettre des mots sur la détresse des campeurs. Non seulement les élus n’ont consulté personne, mais Mme Guilbeault et M. Legault ont donné énormément de pouvoir aux élus pour exproprier à leur guise. « On vous exproprie, vous negocierez ensuite au TAQ. ». Le projet de loi 22 sur l’expropriation aussi à passée en catimini fin décembre 2023 et a prise effet en mai. Malheureusement, personne n’en parle et c’est ce changement qui est à cause racine du problème selon moi.
Tout le monde est à risque maintenant.
Bonne journée !