La salubrité d’Habitat Saint-Sauveur remise en cause
Par nathalie-deraspe
La découverte de champignons dans un logement d’Habitat Saint-Sauveur semble avoir ouvert une véritable boîte de Pandore. La direction du Centre de santé et des services sociaux des Pays-d’en-Haut a lancé une série d’interventions afin d’améliorer la qualité de vie de ses résidents et dissiper les tensions avec l’administration.
Le bâtiment, vieux de 1977, est géré par une Corporation à but non lucratif présidée par Robert Tardif. De par sa charte, le coût des logements doit demeurer en deçà de ce qu’il y a sur le marché locatif à Saint-Sauveur. Construit en béton et à l’épreuve du feu, l’édifice a connu des infiltrations d’eau au cours des dernières années et nécessite plusieurs rénovations. Par le passé, des vandales se sont attaqués à 24 véhicules, faute d’éclairage suffisant dans le stationnement. Lors d’une inspection effectuée le 19 mars dernier, les services de l’urbanisme de la ville de Saint-Sauveur ont constaté qu’il y avait récurrence d’humidité dans un des 72 logements et recommandait qu’un hygiéniste industriel vienne vérifier la salubrité de l’édifice. Les champignons s’étaient multipliés à la vitesse de l’éclair sur le tapis et le long des murs et la rouille avait envahi une bonne partie d’un des calorifères. En outre, la jonction du plafond présentait une couleur grisâtre, signe de moisissures. Un rapport d’un technicien en bâtiment a permis de déceler plusieurs anomalies: infiltration d’eau dans les dalles de béton, insuffisance de gouttières, trop d’eau près des fondations, manque d’aération dans l’entre-toît, etc. Plus tôt au cours de l’hiver, les pompiers sont venus mesurer le danger de la neige, à la demande de locataires. Un expert a ensuite conclu qu’il fallait agir dans les cinq jours pour éviter une situation à risque. Une fissure majeure est également apparue après que la glace eut bombé le mur extérieur. Un autre problème qui devrait être réglé avant l’hiver prochain, note le technicien.
Analyse microbienne
Selon les experts de Natur’air, une simple inspection visuelle ne suffit pas à garantir la salubrité d’un bâtiment et seules des analyses microbiennes plus poussées permettraient de dire s’il y a ou non un risque pour la santé des résidents. Une étude exhaustive pourrait coûter entre 5 000 et 10 000$, mais permettrait d’identifier clairement les causes de l’excès d’humidité. Le spécialistes craignent par-dessus tout la présence du stachybotris chartarum, une moisissure qui peut s’avérer très toxique et qui se multiplie à un rythme inquiétant dans le placoplâtre (gypse) mouillé. Les champignons de plusieurs centimètres apparus dans ce logement d’Habitat Saint-Sauveur démontrent que le problème était latent (une moisissure est cent fois plus petite qu’un cheveu et, dans les meilleures conditions, se multiplie aux sept heures).
Loyers modiques
«La Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL) considère qu’Habitat Saint-Sauveur est un des projets les mieux gérés», affirme Robert Tardif. Selon ses dires, l’organisme dépose un rapport biennal qui témoigne de ce fait. M. Tardif affirme qu’il est impossible pour la direction de faire de la prévention et prévient que «toute amélioration aura une incidence sur le prix des loyers.» Toutes les personnes interrogées dans le dossier ont indiqué qu’elles ne voulaient pas s’identifier de peur de représailles. Il s’agirait là d’une partie du problème; les personnes âgées craignent d’être intimidées et hésitent fortement sinon renoncent à se plaindre. La ville s’est adjointe les services des professionnels du CSSS pour tenter de dénouer l’affaire et implanter un nouveau climat de confiance qui permettrait d’éviter que des situations semblables ne se reproduisent à l’avenir. La locataire du logement infesté est actuellement aux soins intensifs et serait infectée d’une bactérie inconnue. Impossible pour l’instant de dire s’il s’agit effectivement d’une bactérie ou du stachybotris chartarum. Son mari a développé une maladie de la peau, ce qui ne présage rien de bon, puisque le stachybotris chartarum est un irritant très puissant qui s’attaque entre autres à cette partie du corps.
Pour l’heure, les seuls travaux qui semblent envisagés demeurent le scellage de la brique extérieure, une opération qui devrait se faire au cours des prochains jours. Par ailleurs, la compagnie d’assurance refuse d’avancer les travaux dans le logement insalubre tant que le problème d’infiltration ne sera pas résolu.
«La problématique est connu depuis plusieurs années, confie Johanne Paquette du CSSS, mais c’est un dossier fort complexe. Nous avons l’implication d’un réseau local de partenaires qui permettra d’effectuer des actions globales qui touchent non seulement la santé des résidents mais aussi les relations avec l’administration.» Il nous a été impossible d’obtenir les commentaires d’Yves Martin, qui agit à titre de gestionnaire de l’édifice.