« Le bois a une histoire »
Dans son atelier de Morin-Heights, Taylor Lukian travaille le bois pour construire des maisons en bois rond, comme son père avant lui. « C’est difficile de mettre un titre sur ce que je fais. Je suis spécialiste du bois massif. »
« Mon père, Doug Lukian, était parmi les premiers à construire des maisons en bois rond ici. Il a appris d’Allan Mackie, sur la côte ouest. Mackie a fait le tour du Canada pour étudier les maisons de bois rond et quelle est la meilleure technique. Il a appris de Victor Nymark, entre autres, et il a fait une école », raconte Taylor.
« Rendre hommage à la forêt »
Toutefois, la tradition des maisons en bois massif se perd, regrette le charpentier. « De moins en moins de gens travaillent à la main. On voit plutôt des machines qui font la job. Mais je trouve important de rendre hommage à la forêt et de garder ça en vie. »
Selon lui, le bois travaillé à la main a un charme unique, qui se perd dans une usine standardisée. « C’est la différence entre un poteau de téléphone et un bel arbre. » Taylor sait bien qu’il doit rester compétitif avec les maisons préusinées. « Mais il se passe quelque chose quand tu es devant un grand billot, avec juste une hache dans les mains. C’est un beau moment de travail. »
L’essence du bois
Pour ses maisons, Taylor utilise presque uniquement du pin blanc. « C’est un bois qui est assez prévisible, qui pousse gros, long et droit. » Surtout, c’est un arbre qui pousse ici même, au Québec. « J’ai une théorie selon laquelle, si tu prends du bois qui pousse ici, la maison va mieux réagir à la météo et aux intempéries. »
Par contre à l’intérieur, où l’environnement est contrôlé, il aime mélanger les essences d’arbre. Il travaille alors avec de plus petites pièces de bois, ce qui lui permet de mettre en valeur du bois plus irrégulier, qui a du caractère. « Ça revient au client, selon le look qu’il veut. Si tu veux quelque chose de plus pâle, tu peux aller vers le frêne. L’érable a une teinte rose. »
Bois antique
Taylor aime particulièrement travailler avec du bois antique, comme des vieilles poutres de grange. « C’est tellement cool : c’est comme si tu donnes une troisième vie à l’arbre. Ce sont les projets qui m’intéressent le plus, même s’ils m’intéressent tous. »
Cependant, cela amène beaucoup de contraintes, et demande de l’essai-erreur. « On travaille avec du bois qui n’est pas uniforme. Mais d’habitude, les gens veulent que ce soit uniforme. » Il peut donc utiliser du bois standard en-dessous, et mettre du bois antique laminé par-dessus. « Comme ça, la surface que tu vois a du caractère. Bref, même si tu as une poutre carrée, tu dois l’approcher comme une forme abstraite. »
Bâtir pour durer
Pour le menuisier, les maisons de bois rond sont intemporelles. « Si le bois peut respirer, il n’y a aucune raison que la maison ne puisse pas exister encore dans 500 ans. En Europe, tu peux visiter des vieilles maisons en bois, qui sont bien protégées. »
Et cette durée dans le temps va aussi de l’autre côté, vers le passé. « Le bois, les arbres ont une histoire. Quand tu prends du bois antique, la grange peut avoir été construite en 1875. Mais l’arbre qui a été utilisé pour tailler ces poutres-là, il peut lui-même avoir 100 ans. Alors il existait déjà en 1775. Donc quand on récupère ce bois-là et qu’on le retaille, il a déjà tellement d’histoire. »
1 commentaire
Bravo Taylor!
Tu fais un noble métier.