Quand j’étais chanteur

Par marylin-deguire

Cette pesante solitude

J’ai beaucoup pensé à Paris Texas, de Wim Wenders, pendant la projection de Quand j’étais chanteur, le dernier film de Xavier Giannoli. Avec son esthétique de supermarchés et de bords d’autoroutes déprimants, de quartiers populaires à l’architecture de plastique et de bars clinquants éclairés aux néons et aux boules miroirs, avec ses environnements très «peuple» et ses personnages à la recherche d’un bonheur dont la quête est quasi-insurmontables, Quand j’étais chanteur offre un portrait saisissant et humain de la vie quotidienne d’une large part de la classe moyenne.

Le film s’ouvre sur la prestation d’Alain Moreau, chanteur de bars et de discos de la province française, véritable star locale de la région de Clermont-Ferrand. Moreau est personnifié par un Gérard Depardieu tout simplement incroyable.

Au bout d’un moment, on oublie Depardieu et on croit réellement à Moreau. Surtout lorsqu’il chante. Moreau, donc, s’éprend d’une jeune mère célibataire, Marion (Cécile de France), dont la rupture récente et l’obtention d’un stage dans une agence immobilière (donc un travail mal rémunéré et instable) rend la vie difficile. Elle a de la difficulté à rétablir les ponts avec son jeune fils d’âge préscolaire.

Rapidement, on se rend compte du vide existentiel qui anime les deux personnages. Marion vit à l’hôtel et elle est souvent à fleur de peau.Moreau, lui, mène une vie réglée d’étoile populaire régionale, qui multiplie les «covers» de chanteur de charme dont les tounes ont fait l’essentiel de la programmation de la station CFGL FM de Jean-Pierre Coallier, dans les années 70 et 80. Le royaume du kétaine, donc.

Moreau exécute à la chaîne les contrats de bals, de discothèque et de salles à manger que lui trouve son manager… qui est en fait son ex-femme, avec qui il entretient une relation détendue. D’autant plus qu’elle habite désormais avec le meilleur copain du chanteur, avec qui il possède un restaurant!

Moreau, homme d’âge mûr et observateur invétéré de sa clientèle, est devenu philosophe. Il connaît les affres de l’existence humaine. Habile, il se mêle aux danseurs d’une discothèque ou dédie une chanson à une femme âgée, subjuguée par le crooner!

La relation entre Marion et Moreau tiendra jusqu’à la fin du chassé-croisé. De cette relation, sorte d’amour-haine souvent marquée par les préjugés entretenus envers les chanteurs populaires, naîtra une solide amitié (souvent refoulée).

Le film, tourné en mode faux documentaire, comporte plusieurs scènes très émouvantes. Le jeu des acteurs, le rythme, le scénario apportent beaucoup d’authenticité à un récit qui rejoindra, dans leur quotidien, des millions de gens qui se reconnaîtront soit dans les personnages, soit dans leurs spectateurs!

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