La corde de la culpabilité

Par Journal Accès

Qui est le coupable du jour… moi ou l’autre?

Chronique défi, bien vieillir par Diane Baignée

Combien de fois – chaque jour – nous cherchons « le-la » responsable de nos peurs, malheurs, insatisfactions et émotions négatives. Faites le décompte des « c’est à cause de […] » C’est sécurisant et apaisant de savoir que quelqu’un d’autre porte ce fardeau. Il est vrai que certaines personnes adoptent des comportements inacceptables et combien répréhensibles. J’en conviens. Il faut défendre ses droits, mais pas nécessairement porter la charge qui en découle, tous les jours.

Les sources possibles d’une faute proviennent en général d’un manquement, une négligence, une perte, un abus ou autre forme d’attitude irrévérencieuse. Êtes-vous victime d’un méfait délibéré. Premier degré, deuxième degré? La justice est là pour trancher. Même là, des nuances s’imposent. Loin de moi l’idée de soulever le couvercle de cette marmite fumante.
Mais qu’en est-il des culpabilités que l’on endosse et qui nous habitent indûment? Et alors celles qui sont utilisées comme stratégie délibérée ou inconsciente pour attirer l’autre vers soi. L’âge n’atténue pas cette pratique.

Ce ravageur inutile

Mais quand la culpabilité s’installe comme un ravageur inutile, est-ce nécessaire de porter cette puissante lourdeur en soi, même si les événements vous laissent croire en sa raison? Prenons l’exemple des relations familiales. Dans ce système, la culpabilité peut être un précieux moyen d’atteindre ses fins. Vous avez entendu des « tu ne viens jamais me voir ». Ou encore, « tu pourrais bien prendre le temps de me téléphoner […] tu sais que je ne suis pas forte ces temps-ci ». Ce style d’approche peut évidemment ternir une relation, même parfois l’éteindre.
Mais pourquoi nous laissons-nous atteindre par ces remontrances?

Des racines de la culpabilité

Quelques réponses ont déjà été avancées sur le sujet, mais pourquoi ressent-on la culpabilité ou pourquoi est-elle projetée sur les autres?
Parmi les racines de la culpabilité, il y a cette colère que l’on retourne vers soi. J’ai entendu des proches s’écrier : « À son timbre de voix, j’aurais donc dû savoir qu’il n’allait pas bien! » ou « Si je n’avais pas quitté son chevet, j’aurais pu lui dire que je l’aime. Je m’en veux de ne pas avoir été là pour ses derniers moments! ». S’inflige-t-on ce fameux sentiment de devoir et de faute?
Sous un angle différent, dame culpabilité a su s’abreuver de notre éducation, de nos croyances culturelles et religieuses. « Ne pleure pas, car un homme ne pleure pas » « Tu dois aider tes parents vieillissants. C’est normal et naturel pour une fille! » Que dire des péchés ou des fautes qui nous rongent jusqu’au moment d’expier le tout par un pardon quelconque? Nous croyons vivre dans une ère évoluée, mais des pensées culpabilisantes sont encore bien ancrées. Elles arrivent en flèche à certains moments, car cristallisées dans la préface de notre histoire familiale et collective. Et surtout les femmes les portent depuis des lunes en elles. Je pourrais vous en parler longuement…
La culpabilité a aussi un agenda caché. Elle permet à certaines personnes d’attirer la mire sur elles. C’est un moyen d’influence si subtil et parfois inconscient. « Si tu m’aimes, viens chez moi ce week-end. Les gens de ma résidence sont tellement désagréables, tu sais. » Une demande affective, quand mal adressée, peut laisser croire à une emprise ou une forme de manipulation.

Reprendre le dessus

Au lieu de traîner cette culpabilité comme un boulet au pied, pourquoi ne pas s’en faire une alliée, malgré sa nature assez désagréable. Comprendre pourquoi elle s’installe peut aider à s’en débarrasser plus rapidement. Si elle prend le plancher pour de bon, elle peut polluer la vie et être plus nocive qu’utile. Il est donc important de percer ce sentiment malfaisant et de remettre les choses en perspective juste et objective.

Culpabilité : pas le meilleur mode d’expression

Et pour les personnes qui transigent de cette façon dans leurs relations, faites plutôt un retour sur vos besoins. Pourquoi ne pas troquer un « tu ne viens pas souvent me voir », par un « je me sens seule et apprécierais tellement ta présence. Ça me ferait du bien! ». Faites un essai juste pour voir. Parler au « je » est la méthode la plus efficace. Le « tu » fait fuir et astucieusement crée une brèche dans les relations. Garder une distance, espacer les rencontres si nécessaire pour un meilleur recul face aux situations. Bref, un moment de pause permettrait sûrement de voir l’ensemble du portrait et se raviser.
On sait qu’il est impossible de changer le monde, mais il est possible de modifier la façon de le percevoir et de se laisser atteindre. J’avoue que c’est plus facile à dire qu’à faire, cependant faites-en un petit essai, juste pour voir. Si une fois, vous preniez conscience d’être purifié de cette vilaine culpabilité? Libération!
Diane Baignée est travailleuse sociale en pratique privée.
Pour commentaires ou questions, vous pouvez la joindre à diane.baignee@gmail.com

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *