Portrait d’un homme sans âge

Par Journal Accès

Section Ainés

Véronique Piché, collaboration spéciale

Vendredi. 8 h 30. J’ai rendez-vous dans le hall d’entrée de la polyvalente de Sainte-Agathe-des-Monts avec un certain Jean-Guy Morin. « Tu vas me reconnaître facilement. Je suis vieux. » Un homme en survêtement m’attend effectivement. Mais il n’est pas vieux.

À l’origine, je cherchais de l’information sur la persévérance scolaire. J’étais intriguée par l’Option Développement Hockey.
La direction de l’école m’a alors mise en contact avec Jean-Guy Morin, celui-là même qui m’ouvre la porte vitrée. J’entre dans l’univers d’un homme pour qui la retraite n’est pas une option.
Les cours ne sont pas commencés, mais on fourmille déjà. Nous allons d’abord discuter dans son local. Il laisse la porte grande ouverte, au cas où des élèves voudraient lui parler. Jean-Guy est agent de liaison pour l’Option Développement Hockey. Il sourit. « Agent de liaison. Ils ont créé le poste pour moi. » À 75 ans, la retraite? Je n’ai même pas pensé lui poser cette question. Depuis quatre ans, il fait le lien entre la direction, les enseignants, les entraîneurs, les élèves et les parents. Entre les générations.

La pomme ne tombe jamais bien loin de l’arbre

Nous nous rendons dans les chambres des joueurs : des locaux aménagés dans l’école et qui ressemblent drôlement à l’idée qu’on pourrait se faire d’un vestiaire professionnel. Des pièces d’équipement accrochées.
Le nom des élèves inscrit au-dessus de leur place. Jean-Guy est fier de me faire visiter les lieux. Il blague avec trois étudiants à propos de l’odeur. J’observe leur complicité.
Nous poursuivons la discussion dans le bureau de l’entraîneur-chef, absent parce qu’à Kuujjuaq avec un groupe de joueurs. La porte reste encore grande ouverte lorsqu’un carillon appelle les élèves vers les classes. Pour Jean-Guy, le hockey est un levier fabuleux. Il nous explique comment on utilise cette passion pour encourager la persévérance scolaire.
Dans sa jeunesse, il se souvient que les religieux du Collège Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse utilisaient aussi cette approche. D’ailleurs, parmi toutes les banderoles, affiches, médailles et accessoires de hockey qui emplissent l’espace, il me montre une vieille photo en noir et blanc, encadrée. « Regarde, c’est moi là. La lumière du but est allumée… Je venais de compter! »
Jean-Guy a étudié en éducation physique à l’Université d’Ottawa. C’était dans les années 1960, lors de la création des premières polyvalentes. Quand on fait le calcul, on comprend que « l’agent de liaison » a plus de cinquante ans d’expérience dans le domaine de l’éducation. C’est beaucoup. Énorme même. Je ne lui demande toujours pas s’il va bientôt s’arrêter. Nous traversons vers le centre sportif municipal : un groupe est à la patinoire pour le dernier entraînement sur glace de l’année.
* * *
Vendredi. Presque midi. De retour dans le hall d’entrée. Je raconte à Jean-Guy le conseil d’un journaliste d’expérience à des novices : trouvez le vieux singe, ou la vieille guenon, qui connaît tout d’un sujet.
Il rit.
Je ne trouve toujours pas qu’il a l’air vieux.

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