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Filles de joie ou filles du Roi?

Par Rédaction

Au 17e siècle la Nouvelle-France est un pays d’hommes composés de marchands, de coureurs des bois, d’artisans, de prêtres,et d’à peine cinquante familles. En 1640, il n’y a que 300 personnes.

Colonie d’hommes, de célibataires, puisque les marchands de fourrures qui possèdent les monopoles pour la traite ne veulent pas s’embarrasser de la colonisation malgré que leurs contrats les y obligent.

La pêche, la chasse, la traite des fourrures ne s’embarrassent pas de femmes et surtout pas d’enfants. Devant cette situation, Le Roi reprend en mains la colonie en 1663 et décide d’y envoyer des femmes, pour qu’elles puissent s’y établir, fonder des familles et ainsi qu’une Nouvelle-France prenne réellement naissance.

De nos jours perdure toujours la calomnie, que ces femmes qualifiés de «catins de France» et de «femmes galantes ramassées dans Paris» furent celles choisies par le Roi pour ainsi débarrasser ce que l‘on qualifiait à l‘époque de royaume. Ces rumeurs, ces «bruits», tel celui «qu’on avait mené en Canada un vaisseau chargé de filles dont la vertu n’avait reçu l’approbation d’aucun docteur» mensonges colportés, devenus certitudes, furent le fait de poètes en mal d‘écriture, des gazetiers de l’époque ( les journalistes de la nôtre.. ) puis de mensonges en mensonges en vint à rejoindre la pensée populaire, puis le politique, alors qu’en 1780, le comte de Vergennes (un joli moineau celui-là…) affirma: «Nous avons émigré la plus vile classe de citoyens et de femmes perdues».

Cette opinion, non basée sur des faits ou sur des documents, devint ce qui prévalut dans l’Histoire du Québec et auprès de nombre d’historiens, pour finalement s‘ancrer profondément dans la mémoire collective où le québécois s’empressa, en petit Jos connaissant qu‘il est souvent… d’en remettre.

Mais qu’en est-il vraiment, où est la vérité ? Étaient-elles, oui ou non des prostituées, des filles sans feu ni lieu, des cortèges de filles de la galanterie vénale, omniprésente à Paris à cette époque?

Et bien voici ce qu’il faut savoir au premier abord, l’époque est chrétienne et même mystique, l’établissement de la colonie et la présence des jésuites a pour but d’évangéliser les amérindiens, tout est religion et d’importantes sommes d’argent sont versées pour l’établissement de la Nouvelle-France par des confréries religieuses, ainsi que leurs établissements. Des particuliers qui ne viendront jamais en Nouvelle-France investissent beaucoup d‘argent pour une nouvelle Jérusalem.

Durant la période 1634 et 1662 il ne viendra au pays que sept à huit immigrantes par année, recrutées et accompagnées par Jeanne Mance, mère Renée de la Nativité et soeur Marguerite Bourgoys, quelques unes prendront même le voile (pas l’islamique…) Colbert pour mettre en oeuvre la décision du Roi Louis XIV, décide alors de mettre sur pied un système de recrutement de «filles à marier» pour palier à la démographie stagnante, on les qualifia alors de «filles du Roi», car leurs frais d’équipement, de passage à bord du navire et de la remise du dot pour leur établissement étaient soldés par le trésor royal. Elles recevaient aussi des vêtements et un trousseau: fil, coiffe, peigne, rubans, ciseaux, couteaux, épingles, mouchoirs, lacets et autres en plus de quelques provisions tirées des magasins du Roi. La mauvaise réputation des filles du Roi vient peut être de leur rapidité à trouver un époux, les premières arrivèrent à l’été 1663, elles étaient trente-huit, toutes trouvèrent à se marier devant le nombre élevé de célibataires. Cette immigration féminine dura onze ans, nulle part que ce soit dans les correspondances, journaux personnels, pièces administratives et judicaires ne trouvent-on traces de plaintes ou de commentaires désagréables de ces jeunes femmes, par une seule plainte contre leur moralité. Soeur marguerite Bourgeoys va même jusqu’à en accueillir dix-sept d’entre-elles dans la chapelle à la Sainte-Vierge. Mais la preuve décisive, qui à elle seule réussit à ruiner toute imputation d’une immigration frelatée c’est la manière dont on recrutait ces jeunes femmes, elles provenaient en très grande partie des orphelinats, notamment de La Salpetrière de Paris et quant aux autres venues des paroisses des villes et des campagnes des certificats de bonne conduite émanant des curés.

Le Roi s’informait constamment des naissances et des baptêmes, on accompagnait aussi après le mariage les nouveaux époux dans leur établissement terrien. Huit-cent-cinquante-deux immigrantes sont ainsi venues durant cette période.

Le Québec, héritier de la Nouvelle-France, peut ainsi se vanter d’avoir eu une immigration féminine de choix, de femmes saines d’esprit de corps qui contribuèrent à bâtir ce pays, à ce titre le nom unique de «filles du Roi» est un héritage collectif dont il faut être fier.

De par son initiative, Louis XIV avait inventé sans le vouloir, de par la rapidité des mariages qui survinrent , l’exécrable nom anglais du mercantiliste «speed dating» que nous avons connu récemment. dans notre région.

Il vaudrait beaucoup mieux dénoncer des faits contemporains viciés, plutôt que de perpétuer des calomnies ou un jeu de mots facile peut servir à abaisser une nation qui n’a sûrement pas besoin d’un pareil héritage pour s’abaisser.

Regardez autour de vous, les Filles du Roi sont encore présentes.
 

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