Pour fleurir le jardin, au mois d’août

Par Éric-Olivier Dallard

Il y a plus d’une vingtaine d’années maintenant, je me suis installée à Saint-Sauveur de manière permanente; ma première maison, notre première maison, rue Léonard. Croyez-le ou non, je ne l’ai même pas visitée avant de l’acheter. J’ai fait confiance à Gilbert, mon conjoint. Lui la connaissait plutôt bien, de fond en comble et pour cause puisque c’est la maison où il a grandi, celle que son père a construite. Il me l’a décrite cent fois, non plutôt mille.

Sans y avoir jamais mis les pieds, je m’imaginais déjà parcourant le couloir, et entrant dans chacune des pièces. Je la connaissais bien de l’extérieur par contre. J’aimerais vous dire que c’était la maison la plus coquette du quartier, mais hélas il n’en était rien. Pas de charme de campagne, mais une maison solide, bien construite, et extrêmement bien placée pour un jeune couple avec projet de famille. Et un grand terrain…

On avait de gros projets. Le bungalow d’un étage allait devenir une maison canadienne, avec de belles lucarnes. Ça prendrait quelques années, mais Gilbert m’avait promis la maison de mes rêves. Entre-temps, il m’avait aussi avisé que, dès emménagée, il y a quelques trucs que je voudrais probablement modifier, comme les comptoirs de cuisine. Moi j’avais d’autres projets dans l’immédiat. Les comptoirs de cuisine attendraient. On arriverait à distraire avec quelques accessoires. Non, mon premier projet: la façade!

Il fut un temps, puisse-t-il être révolu à jamais, où les arbres (ou conifères) en boules avaient la cote! Et j’avais la très grande chance d’en avoir quelques spécimens sur mon nouveau terrain, en façade de maison. Des épinettes, de vraies épinettes, celles qui finissent par toucher le ciel avaient été, avec amour et patience, taillées et retaillées en boule, en topiaire pour être exact, depuis au moins vingt, voire vingt-cinq ans.

Tailler des épinettes ou sapins pour accentuer légèrement leur forme pyramidale naturelle, c’est une chose, mais garder à 3 mètres de hauteur une épinette qui peut atteindre 20 mètres… ça ne devrait pas être permis! Un jour, je démarrerai l’Association pour la protection des droits de l’Arbre!

Après avoir écrit cela, je me sens un peu ridicule de vous dire qu’en sortant de chez le notaire, je me suis précipitée à la Mairie pour obtenir la permission de mettre fin aux supplices et humiliations endurés par mes pauvres épinettes… Bon, je vous l’accorde, j’exagère. J’espère seulement que vous aurez compris que la Nature, il faut la respecter. Quand on plante un arbre ou un conifère, on se doit de prendre connaissance de sa taille à maturité. Des arbres, c’est comme le monde! Il y en a de tous les formats, et il y en a un pour vous! Choisissez donc le bon. Voilà pour mon petit brin de Morale Horticole 101.

Si j’ai fait ce long préambule, c’est que dans le jardin original de cette maison, il y avait quelques trésors, des valeurs sûres, encore maintenant. Toujours à l’affût des nouveautés, on en vient à oublier certaines plantes qui ont pourtant fait leurs preuves. L’hémérocalle fulva est de celles-là. Vous savez la grande hémérocalle orange, que l’on retrouve même parfois sur le bord de nos routes de campagne? Une grande hémérocalle qui fleurit en juillet août, au soleil ou à la mi-ombre, et qui se multiplie très facilement. Pour un coin sauvage et coloré, sans trop d’entretien, pourquoi pas. J’en avais fait une haie au pied d’une haie de cèdres, et je ne m’en suis jamais lassée. Et cette année, pour une cliente qui justement cherchait ce look, en bordure du chemin menant à sa maison, c’est justement cette hémérocalle que j’ai choisie. Et ce sera, j’en suis certaine, très joli et avant longtemps, très rempli!

Un autre des trésors de la rue Léonard: les rosiers rugosa! Je crois vous avoir déjà entretenu sur le sujet… Mais encore, à ce temps-ci de l’année, à part le sorbier des oiseaux dont les branches s’arquaient sous le poids des grappes de fruits orange et dont les oiseaux étaient fous, il y a une autre plante de cette maison qui me manque: le phlox paniculata. Directement sous la fenêtre du salon, il y avait une immense talle de phlox, couleur lilas. Et au mois d’août, c’est elle qui faisait vivre tout le jardin. Quand l’été tire à sa fin et que le gros des floraisons s’achève, outre les rudbeckies, sedums et chélones, le phlox est une vivace de choix. Environ 90 cm de hauteur, du blanc au rose, en passant par les bleus même les rouges et oranges, le phlox est à essayer et à répéter. Au soleil de préférence, quoiqu’il s’accommode de la mi-ombre.

C’est une de celles que j’ai négligées au fil des ans, éprises moi aussi de nouveautés. Quand nous avons fait nos travaux sur la maison, j’ai partagé la talle entre plusieurs parents et amis. À vous en parler, il me prend soudainement l’envie d’aller faire un tour dans le jardin de ma mère, avec mon plus beau sourire… et une pelle!

Le phlox paniculata: à essayer, et pourquoi pas à partager!

Chantal Rochette

Au Coin du Jardin

www.aucoindujardin.com

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