Un moratoire… mais une traverse aussi

Par Éric-Olivier Dallard

Parc linéaire Le P’tit train du Nord

L’annonce de l’autorisation possible d’une traverse au kilomètre 28,5 du Parc linéaire Le P’tit train du Nord à Sainte-Adèle, révélée par Accès, avait soulevé une vague d’inquiétude et de protestation de la part des skieurs usagers des pistes. Une pétition de plus d’un millier de noms a été déposée à la MRC des Pays-d’en-Haut; les regroupements RunMSL, Ski de fond Laurentides et Ski de fond Québec ont également notifié leur opposition. Ce mouvement a donné naissance au dépôt aux quatre MRC concernées d’une demande de moratoire sur les traverses de rues, par la Corporation du Parc linéaire. Bien que cette demande ait été acceptée, le kilomètre 28,5 viendrait d’obtenir la sanction du Ministère des Transports du Québec (MTQ), malgré la forte opposition du milieu, qui craint le saccage du Parc linéaire, comme ce fut le cas plus au sud.

La MRC des Pays-d’en-Haut n’a-t-elle pas transmis cette opposition au MTQ? Comment le message du milieu et des citoyens a-t-il été porté par le préfet, Charles Garnier, qui reconnaît pourtant lui-même que «le milieu et les usagers n’en voulaient pas, de cette traverse de rue»?
«Le moratoire, c’est déjà une victoire!, lance Lucie Lanteigne, directrice-générale de la Corporation. Il sera en vigueur jusqu’à la fin du mois de mai, alors que nous déposerons une étude visant à baliser et encadrer les prochaines traverses. Cela permettra de protéger l’intégrité du Parc, et confirme que les MRC s’entendent pour une vision claire et pour envoyer le message que l’on désire véritablement établir une vision claire de la protection de ce patrimoine.»

C’est le 22 janvier dernier que la décision du MTQ a été transmise officiellement, donnant suite à la demande des promoteurs, les frères Valiquette, qui entendent développer 12 unités résidentielles sur un terrain adjacent à la piste du Parc linéaire, en présence des promoteurs, du préfet, de Mme Lanteigne, du nouveau président de la Corporationm, Yvan Genest, et de deux représenants du MTQ, Pierre Lambert et Alexandre Ferrari. Isabelle Doyon, du Ministère, explique la décision: «Nous avons tenu compte de la demande qui nous avait été présentée par la MRC et les promoteurs… et de la volonté des citoyens, exprimée par la voix de la MRC. Nous avons compris les inquiétudes des utilisateurs, et c’est la raison pour laquelle nous avons encadré sévèrement la mise en place de la traverse, en posant de nombreuses conditions… Pour nous il est clair – et cela est écrit noir sur blanc – que ce sont aux usagers de la traverse qui devront en subir les inconvénients, pas les skieurs utilisateurs du Parc linéaire…» C’est d’ailleurs pourquoi de nombreuses clauses encadrant la création de la traverse en question ont été édictées par le MTQ et la MRC: ré-enneigement régulier, interdiction d’utiliser des abrasifs, obligation pour le promoteur de démanteler la traverse si son développement dépasse 12 unités, etc… Des cadres qui ne rassurent pas le milieu: «Le Parc linéaire, c’est comme la colonne vertébrale de notre système de sentiers, qui sont une part importante de notre identité laurentienne, clame François Trudeau, porte-parole du Regroupement des usagers non-motorisés de sentiers des Laurentides (RUNMSL). Le moindre choc sur cette colonne vertébrale se répercute sur une multitude de sentiers et d’activités liées au plein air… En fait, nous avons l’impression que, pour la MRC et le MTQ, ce sont carrément les deux promoteurs qui sont le milieu!»

La MRC et la Ville

Rencontré à ses bureaux il y a quelques semaines, le maire de Sainte-Adèle, Réjean Charbonneau, pourtant sensible aux arguments des usagers, a clairement indiqué à Accès qu’il ne reviendrait pas sur la décision prises par l’administration précédente et qui donnait son aval au projet de traverse du kilomètre 28,5.

De son côté le préfet de la MRC des Pays-d’en-Haut, Charles Garnier, à l’instar du MTQ, défend la décision prise: «C’est la seule traverse que nous ayons autorisée en plus de 15 ans! Et il faut se rappeler que nous en avons démantelé une, sur le chemin Pierre-Péladeau, à grands frais (800 000$). Nous ne voyions rien, dans le cas présent, qui pouvait justifier le rejet de la demande des promoteurs.»

Pour le député de Bertrand, Claude Cousineau, il devenait impératif de répondre à la demande des frères Valiquette, qui attendaient une décision depuis plus de deux ans: «Nous avons analysé leur demande, mais aussi les arguments des pétitionnaires qui s’opposent à la traverse. Bien que le terrain des promoteur ne soit pas enclavé à proprement parler, faire passer une route de l’autre côté (vers le chemin Rolland), et ainsi éviter de faire passer une traverse sur le Parc linéaire, aurait un impact beaucoup plus dommageable pour l’environnement… On parle de l’abattage de plusieurs arbres de valeur… et d’harnacher un cours d’eau, ce n’est pas rien quand même! Du reste, sachez que si le moratoire avait été demandé et obtenu avant le dépôt ou l’étude de la demande des promoteurs, j’aurais été très à l’aise de rejeter cette demande, sur la base du moratoire. Honnêtement, je crois que certaines personnes auraient dû tirer la sonnette d’alarme beaucoup plus tôt… Je pense notamment à la Corporation du Parc linéaire, mais aussi à l’Association touristique des Laurentides (ATL)…»

Nous avons logé un appel à Diane Leblond, directrice de l’ATL, mais n’avons pas pu recueillir ses commentaires au moment d’écrire ces lignes.

L’entente finale, qui doit intervenir entre la Ville de Sainte-Adèle, la MRC et les deux promoteurs devrait être signée bientôt. Elle sera revérifiée par le MTQ, qui tient à s’assurer que les conditions édictées y seront bien mentionnées.

La position du RUNMLS

Le MTQ crée une autre traverse de rue dans ce joyau qu’est le parc du P’tit Train du Nord, malgré le désastre déjà créé dans la portion sud, qu’y-a-t-il à comprendre de tout ça???

Le RUNMSL vient d’apprendre la décision d’appliquer un moratoire sur les traverses de rues sur le P’tit train du nord, quelle bonne nouvelle! Il était temps… Par contre, le Ministère des Transports du Québec donne son accord pour aller de l’avant avec la construction de la traverse de rue du km 28, ce qui selon nous constitue une décision très décevante. Le MTQ ne devait-il pas consulter ce qu’il appelait le MILIEU (c’est-à-dire les usagers) avant de rendre sa décision? Nous venons d’apprendre que le MILIEU est constitué des acteurs suivants selon la MTQ: les instances de la MRC, le député Claude Cousineau, la municipalité de Ste-Adèle, et le promoteur (!)… Et non la population et les professionnels du plein air qui se sont levés contre cette initiative au cours des derniers mois. Les décideurs avaient entre les mains la possibilité de démontrer qu’ils pouvaient enfin unir plein air, développement immobilier et bien être des résidents de la région. Le MTQ en a malheureusement décidé autrement.

Comment peut-on comprendre leur décision ? Un promoteur va gagner contre des milliers d’opposants qui sont, d’après nous, le vrai MILIEU (les électeurs, les citoyens d’ici, les usagers – dont plus de mille pétitionnaires, la Fédération de Ski de Fond Québec, le Regroupement de ski de Fond des Laurentides – l’expert conseil du Parc Linéaire, le président du Parc Linéaire lui-même, et plusieurs autres…) Nous croyons que le politique fait une grave erreur car visiblement, le milieu, les jeunes et moins jeunes (les utilisateurs du Parc linéaire), ainsi que tous les professionnels en matière de plein air de la région s’opposent à la décision rendue de permettre la dite traverse.

Comment peut-on comprendre leur décision quand on nous explique qu’il y avait des alternatives réalistes et viables. À quel prix peut-on encore sectionner le parc linéaire qui a déjà coûté des millions, mais qui aussi rapporte des millions en retombée économique pour la région, pour le MILIEU?

MTQ et MRC, vous admettez qu’il faut mettre un moratoire sur les traverses de rues, mais vous donnez votre accord sur la traverse du km 28? Cela ne fait aucun sens.

Le MTQ explique sa décision par des mesures sévères qui seront prises pour minimiser les impacts de cette traverse sur le ski de fond. Mais le MTQ n’a pas consulté le MILIEU du ski de fond et du plein-air, comment peut-il expliquer que les mesures sévères seront les bonnes?

Il est tout à fait clair que le MTQ devrait renverser sa décision!
– François Trudeau

Porte parole du RUNMSL

Regroupement des Usagers Non-Motorisés de Sentiers des Laurentides

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