Une chapelle privée, un jardin tout de blanc…

Par Éric-Olivier Dallard

Les projets se suivent et ne se ressemblent pas. Heureusement d’ailleurs… Aujourd’hui j’ai envie de vous parler d’un jardin où je suis à mettre la touche finale. C’est un aménagement unique dans une vie probablement, et j’ai eu cette chance et ce plaisir-là: aménager une chapelle.

Cette annonce cause généralement une surprise. Pourtant il existe beaucoup plus de chapelles privées au Québec qu’on pourrait le croire. Celle dont je vous parle aujourd’hui, bien que fraîchement érigée, s’intègre maintenant dans son environnement comme si elle y avait toujours été.

En forme de petite croix, murs épais de pierre de granite taillée par des maîtres maçons locaux, vitraux aux fenêtres, reliques religieuses à l’intérieur, des portes travaillées et vieillies à s’y méprendre, et le modernisme de l’éclairage et du son de notre ère… cette chapelle est en soit une œuvre d’art. Impossible de pénétrer son enceinte sans émotion. Tout appelle le calme et la réflexion. À moi maintenant de créer un jardin, à la hauteur…

Une chose est certaine, l’ambiance qui règne à l’intérieur de la chapelle doit se refléter à l’extérieur. Inimaginable, enfin je crois, de passer par des plates-bandes chargées aux multiples couleurs avant d’entrer dans cette chapelle pour se recueillir. On est tous d’accord, les clients et moi: un jardin calme, pas trop chargé, un jardin tout de blanc. Évidemment vous aurez compris que la dominante restera le vert…

La chapelle est érigée sur le roc. On l’a donc dégagé pour le mettre en évidence. Un sentier mi-large y mène, où se succèdent des pierres tantôt en marches tantôt en trottoir et aussi en perron, à l’entrée de la chapelle, devant les superbes portes. De part et d’autre du sentier, des fougères, dont le feuillage délicat est déposé en éventail sur une tige si frêle qu’on a peine à croire qu’elle puisse tenir; l’adiantum pedatum. Il y a aussi quelques hostas au feuillage lime bordé de vert qui éclaire le sentier: hosta guacamole . Évidemment des fleurs blanches complètent le tout! J’ai choisi les anémones parce qu’elles se multiplient bien et se fondent avec la nature, en prenant soin d’en choisir une à floraison printanière, l’anémone sylvestris et une à floraison automnale l’anémone Honorine Joubert. Entre les deux floraisons des anémones, des astilbes plumeuses blanches prennent la relève. Au sol, du galium odoratum, un délicat couvre-sol qui forme un tapis de fleurs blanches au printemps, et se répand merveilleusement bien. Un seul écart dans le sentier, quand au vert, j’ai introduit quelques cimicifuga brunette. Le nom commun du cimicifuga est: cierge d’argent! De circonstance…. Le feuillage de celui-ci est rouge bordeaux, et ressort du restant. Très bel effet, dans cette portion du sentier qui est à la mi-ombre. Et juste avant d’arriver au perron de la chapelle, St-Francis, le patron des jardiniers, nous salue au milieu de fougères et de campanules carpatica blanches.

Ailleurs sur le terrain de cette propriété, l’aménagement est structuré avec des trios de grands cèdres pyramidaux thuya occidentalis fastigiata. Dans un tournant du sentier, tout près de la chapelle, il y avait juste le bon emplacement pour faire un rappel du reste du terrain, et intégrer cet aménagement. Echinaceas et astilbes blanches ont habillé la base des cèdres, sans rien cacher.

En fond de scène, ou pour faire le lien entre la forêt et la portion plus aménagée, l’arbuste que j’ai choisi et utilisé en grand nombre est la spirea arguta compacta. Curieusement son feuillage rappelle celui d’un saule, très fin et port légèrement retombant. C’est une spirea gracieuse et souple qui se couvre de fleurs blanches délicates au printemps. Et aussi, j’ai placé stratégiquement quelques salix integra Hakuro Nishiki, dont le feuillage panaché vert et blanc avec une touche de rose au printemps, donne un vent de légèreté à l’aménagement.

Plus près de la chapelle, on s’est gardé un espace plus grand légèrement vallonné et assez ouvert. Une aubépine a trouvé sa place, quelques fougères frisées entourent une statue de Gaïa, la Déesse de la Terre, d’autres echinaceas blanches, un trio d’hydrangeas Littlelamb, très blancs, et quelques stephanandra crispa, arbuste rampant aux rameaux arqués, débordent sur le roc… et au printemps quelques délicates fleurs blanches. Ici et là et un peu partout, des genévriers rampants, juniperus plumosa compacta, nous assurent d’avoir du vert douze mois par année. Oh et encore un petit écart de plus côté feuillage: l’introduction de quelques heuchères à feuillage bordeaux et fleur blanche; un coup de cœur.

Autre lien entre la forêt et la partie aménagée, des rosiers blancs très odorants, Henry Hudson, habillent un mur de pierre au bas d’une pente très abrupte.

Aux endroits où c’est possible, on a recréé la forêt: érables, conifères, viornes, amélanchiers, (toujours des fleurs blanches) , des saules arbustifs aussi parce que le terrain est mouillé par endroits. Celui utilisé s’appelle salix Rubykin, magnifique saule à port vertical, où les oiseaux-mouches aiment nicher. Il ne manque plus qu’à installer le banc déniché dans un encan, et le thym blanc entre les pierres du sentier.

Voilà un aménagement de calme cette fois, tout de vert et de blanc. Une beauté!

La chapelle a été baptisée par sa propriétaire « la Chapelle des mercis ». Pour l’opportunité, c’est à moi de dire merci!
– Chantal Rochette

Au Coin du Jardin

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