Les défis 2023 en éducation : la pénurie de main-d’œuvre explose
Chaque année, la rentrée scolaire comporte plusieurs défis. C’est aussi le moment pour les différents syndicats et fédérations de mettre en lumière leurs préoccupations. Tour d’horizon des enjeux actuels dans le milieu de l’éducation.
5000 postes vacants
Le 17 août, la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement (FQDE) estimait un manque de 2000 enseignants à temps plein et 3000 autres pour des tâches à temps partiel, à travers les 1 600 écoles où travaillent ses membres. Il s’agit d’une hausse de 72 %, comparativement à l’année dernière. Notons que ces chiffres excluent l’île de Montréal. « La situation s’est gravement détériorée », a affirmé Nicolas Prévost, président de la FQDE, au micro de Radio-Canada.
Revaloriser la profession
Le 21 août, une conférence de presse a eu lieu concernant la rentrée 2023 pour le réseau scolaire. La présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ), Josée Scalabrini, demande au ministre de l’Éducation de faire la différence dans les prochains mois et de prouver que l’éducation est une priorité au Québec.
Dans leurs négociations, la FSE priorise la composition de la classe, c’est-à-dire de positionner le bon élève au bon endroit. « Ça fait longtemps qu’on le dit, la composition des classes au Québec n’a plus de bons sens », affirme madame Scalabrini. Selon une enquête menée auprès de 10 000 enseignants en début d’année, 48 % des élèves dans les classes ont de grandes difficultés. Également, 37 % du temps en classe ne serait plus consacré à l’enseignement. Les enseignants décrient aussi le manque de ressources à leur disposition.
En améliorant la composition des classes, on vise également à remplir une autre priorité pour la FSE, soit celle de revaloriser et d’améliorer la profession d’enseignant et de freiner la pénurie de main-d’œuvre. Josée Scalabrini note que ce sont des gens de tous âges, peu importe leur niveau d’ancienneté, qui délaissent le réseau. Elle veut « redonner le goût aux enseignants d’enseigner et leur permettre de rester, tous âges confondus, dans la profession ».
De moins en moins de services aux élèves en difficulté
La Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation (FPPE-CSQ) englobe 69 des 72 centres de services scolaires et représente des professions comme les orthopédagogues, psychoéducatrices, psychologues, travailleuses sociales, conseillers en éducation, etc. « Il est déplorable et accablant de constater que les élèves en difficulté ne reçoivent pas les services auxquels ils ont pourtant droit selon la loi. Pourtant, force est de constater que la pénurie de professionnelles et de professionnels n’a jamais été aussi flagrante. Elle est présente dans tous les centres de services scolaires », a déploré le président de la FPPE-CSQ, Jacques Landry, en conférence de presse. Ce dernier s’inquiète pour l’avenir des services professionnels dans le cadre des services publics.
Selon les estimations du 17 août de la FQDE, présentées dans un article de Radio-Canada, il manquerait 912 psychoéducateurs, orthophonistes et psychologues. Ce nombre ne surprend pas du tout Jacques Landry. Il pense même que les chiffres pourraient être, en réalité, encore plus élevés.
99,6 % des postes d’enseignants comblés au CSSL
La « très grande majorité » des postes en enseignement sont pourvus pour la nouvelle année scolaire, a annoncé le Centre de services scolaires des Laurentides (CSSL). C’est 99,6 % des postes en enseignement qui sont maintenant comblés.
En date du 18 août, il reste deux postes à combler sur un total de 607 postes d’enseignants réguliers. Cinq de ces postes sont comblés par du personnel non légalement qualifié, et deux de ces personnes ne possèdent pas de diplôme universitaire. Ces derniers occuperont les postes d’enseignants en art dramatique et en anglais. Le CSSL précise qu’il n’y a aucun titulaire de groupe non légalement qualifié en poste et qu’un programme d’accompagnement est prévu pour tout le personnel enseignant non légalement qualifié.
Le CSSL souligne par la même occasion que le taux de rétention du personnel enseignant au cours des six dernières années est de 95 %.
« À nos précieux membres du personnel enseignant, que vous soyez nouvellement ou déjà en poste, nous exprimons notre profonde gratitude pour votre dévouement exceptionnel envers la mission éducative. Votre engagement inébranlable et votre passion contagieuse créent un environnement propice à l’épanouissement de nos élèves. Ensemble, continuons à façonner l’avenir en offrant à nos élèves les clés de la réussite ! », affirme monsieur Sébastien Tardif, directeur général du CSSL.
Candidatures
Depuis le lancement de sa nouvelle plateforme en avril dernier, plus de 1252 candidat.e.s ont appliqué pour des postes offerts. « Des efforts importants sont consacrés à l’amélioration continue de l’expérience employé, ce qui constitue l’une de nos quatre priorités organisationnelles. Nous continuerons d’être attentifs aux besoins de notre personnel pour faire mieux encore », ajoute M.Tardif.
Il reste encore quelques postes disponibles en soutien scolaire. Vous pouvez postuler ou vous inscrire aux banques de candidatures spontanées sur la plateforme emploi dès maintenant !
« On ne parle pas assez des cégeps au Québec »
Le 16 août dernier, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) a tenu une conférence de presse sur la rentrée collégiale 2023. La CSQ et ses fédérations considèrent que le gouvernement du Québec ne se préoccupe pas suffisamment du réseau collégial et l’appelle à changer cette tendance. « On n’en parle pas assez des cégeps au Québec », a martelé Éric Gingras, président de la CSQ. D’ailleurs, les défis y sont grands.
Sans surprise, la pénurie de main-d’œuvre est particulièrement préoccupante. « Le ministère lui-même prévoit que dans les 10 prochaines années, il y aura une hausse de plus de 14 % de l’effectif des étudiants dans les cégeps. Non seulement, il faut garder le monde qui est là, mais en plus, il faudra les encadrer, et encore plus dans les prochaines années », a expliqué Monsieur Gingras.
Youri Blanchet, président de la Fédération de l’enseignement collégial (FEC-CSQ), note justement une difficulté de recrutement dans plusieurs programmes techniques, dont l’informatique, le génie électrique, la pharmacie et même les soins infirmiers. « C’est un programme dans lequel, pendant longtemps, on n’a eu aucun problème de recrutement, mais c’est difficile actuellement », a-t-il affirmé.
Chez le jeune personnel enseignant, un roulement trop important est également une problématique. « Ça fait en sorte qu’on a des sessions ou des parties de sessions où il manque des profs et ça doit être répartis sur les autres enseignants du département », a expliqué monsieur Blanchet. Enfin, l’intelligence artificielle est une autre préoccupation de la FEC, autant pour ses effets sur les étudiants que sur les enseignants des cégeps. La Fédération a d’ailleurs un comité de vigilance qui se penche sur cet enjeu et qui organise des activités.