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La femme hassidique,une mère avant tout

Par nathalie-deraspe

Dossier Accès – 2e volet

Deux femmes discutent sur un vieux balcon en fin d’après-midi. Des enfants de deux à huit ans s’amusent autour. Les vélos vont et viennent. Les jeunes filles s’occupent du bébé. Une odeur agréable émane de la cuisine. Vive les vacances!
«On n’est pas en prison, lance l’une des femmes. Si on veut étudier on étudie, si on veut travailler on travaille. Mais qu’est-ce qu’il y a de mieux dans la vie que d’avoir des enfants, de les aimer et de cuisiner pour recevoir la famille autour d’une belle grande table?» Difficile de brandir le spectre du féminisme. Cette mère de famille est on ne peut plus sincère. Son regard candide, ses beaux yeux bleus et son teint lisse lui donnent l’air d’une femme à peine sortie de l’adolescence. Mais à 37 ans bien sonnés, celle-ci a déjà accouché 10 fois. «On ne se fatigue pas avec la télévision ou le cellulaire, explique son amie. On ouvre la radio pour avoir un peu d’information et puis hop, on la ferme. Dans le fond, on est bien plus libres que bien des gens», dit-elle en riant. Autant ces femmes peuvent paraître malheureuses, autant elles sont accueillantes et ricaneuses quand on a la chance de les côtoyer un tant soit peu. Il n’a fallu qu’une brève présentation pour que celles-ci acceptent de dévoiler une partie de leur vie de tous les jours. Une vie simple, remplie de sourires d’enfants et d’effluves appétissantes. Et les maris, qui les choisis? «C’est nous!», disent-elles en chœur. Comme ça, pas de mariages arrangés, glisse-t-on sur un ton sceptique. «Parfois les parents proposent quelqu’un, quand ils pensent que la personne serait bien pour nous. Mais si on n’est pas intéressées, ça s’arrête là.» Mœurs qui ressemblent fort à celles de la petite famille chrétienne des années ’50. Et qui prend les décisions? «Ça dépend, laisse tomber l’une des femmes. Parfois, on leur laisse l’impression que c’est eux qui décident (les maris) mais au fond, c’est nous», dit-elle sur un ton espiègle. Et la procréation? «Si une femme est fatiguée d’avoir des enfants, elle peut aller voir le rabbin et discuter avec lui, c’est possible.» Et le divorce? «Ça arrive. Pas parce que l’homme a trouvé une autre femme ou vice versa, précisent-elles. Mais parce que le couple n’arrive plus à dialoguer.» Et les sports? «On a des piscines privées. On se baigne tant qu’on veut, mais pas en même temps que les hommes, c’est tout.» Et les filles, elles vont à vélo? Regard incrédule en guise de réponse, puis un «Bien sûr!» finit par surgir. «Sauf que ce n’est pas très gracieux», ajoutent-elles. Dans les faits, la plupart des petites filles s’amusent davantage à câliner les bébés qu’à circuler en vélo. Et le français? Les enfants l’apprennent jusqu’en 6e année. Après, c’est plus difficile, confessent-elles, mais la plupart maîtrisent plusieurs langues. Quand les familles en ont les moyens, ils envoient leurs adolescents en camp de vacances aux États-Unis ou ailleurs. «Nos enfants ne sont pas confrontés à la violence ou à toutes les choses ignobles qu’on peut trouver sur Internet, dit une autre femme, pendant qu’un de ses plus vieux fait jouer de la musique au salon. Vous voyez, dit-elle, on écoute de la musique, mais pas n’importe laquelle. Mon mari danse parfois avec les enfants, on fait la fête dans les noces, mais on ne va pas dans les discothèques, on ne mange pas au restaurant. On préfère demeurer en famille pour éviter de voir nos jeunes errer dans les rues. Ça ne nous empêche pas de prendre un verre de vin à l’occasion, précise-t-elle. Mais vous ne nous verrez pas tituber ou crier à tue-tête en voiture et rouler à toute vitesse. Ça, ça n’a pas de sens. Regardez, il y a deux ans, des jeunes ont jeté des livres de prière dans la rivière. Pourquoi faire cela?»

Même si elle détient un diplôme d’éducatrice, cette dame préfère et de loin demeurer près des siens. «Et quand mes amies demandent si je travaille je dis bien sûr que je travaille, je travaille à temps plein! Je cuisine, je range les vêtements, j’élève mes enfants, je fais le ménage, c’est pas un travail à temps plein ça?» Mère de famille et heureuse de l’être. Voilà la femme hassidique.

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