(Photo : Nordy - Sébastien Fleurant)
La Municipalité de Sainte-Anne-des-Lacs.

Logement : « C’est maintenant qu’il faut agir »

Par Simon Cordeau (initiative de journalisme local)

Les principaux acteurs des Pays-d’en-Haut se sont réunis vendredi, 25 novembre, pour le premier Sommet de l’habitation. Élus, urbanistes, organismes communautaires, chambres de commerce et entrepreneurs étaient à Sainte-Anne-des-Lacs pour discuter de la crise du logement dans la région, et aborder ses solutions. « C’est un enjeu nouveau pour nous. Mais c’est maintenant qu’il faut s’occuper de la question, qu’il faut agir », a déclaré Catherine Hamé Mulcair, mairesse de Sainte-Anne-des-Lacs, en introduction.

« Les élus ont le devoir de représenter tous les citoyens », a rappelé la mairesse. Elle souhaite que les élus adoptent le logement comme la priorité de leur mandat. André Genest, préfet de la MRC des Pays-d’en-Haut, a aussi fait sentir l’urgence de la situation dans son discours d’ouverture. « Après Montréal, nous sommes la pire MRC au Québec concernant le coût du logement par rapport au revenu. Il ne faut pas attendre le gouvernement. C’est nous, le gouvernement de proximité », a-t-il soutenu. Le préfet a par ailleurs déplorer l’absence de quelques maires lors du Sommet.

Constat de la situation : la MRC avant-dernière

Eve Robinson-Chouinard, organisatrice communautaire au CISSS des Laurentides, a présenté les constats de la situation sur le territoire, chiffres à l’appui. La population de la MRC atteignait 47 105 personnes en 2021. Elle pourrait atteindre 60 000 personnes d’ici 15 ans. Cette augmentation met de la pression sur le prix des logements, tant pour les propriétés que les appartements.

Le prix médian d’une maison unifamiliale est passé de 260 000 $ en 2017 à 480 000 $ en 2022. Aussi, la proportion de ménages qui consacrent plus de 30 % de leur revenu à se loger est très élevé. Il est de 13 % pour les propriétaires, et de 32,7 % pour les locataires. Mais ces chiffres varient beaucoup d’une municipalité à l’autre. À Saint-Sauveur, ce sont 42,9 % des locataires qui paient plus de 30 % de leur revenu pour leur loyer.

De plus, le revenu médian après impôt des ménages était plus bas de 3 000$ dans les Pays-d’en-Haut que dans l’ensemble des Laurentides (78 890 $ vs 81 840 $). Il y a aussi 5 555 personnes qui vivaient sous la mesure de faible revenu en 2020, et 1 534 personnes par semaine ont bénéficié de l’aide alimentaire en 2021.

« Il y a une inadéquation entre les revenus et la valeur des maisons. C’est un enjeu pour l’accès à la propriété et au logement », a souligné Mme Robinson-Chouinard. La MRC des Pays-d’en-Haut se classe avant-dernière dans cette catégorie. Par ailleurs, les autres MRC de la région (Rivière-du-Nord, Argenteuil, Laurentides et Deux-Montagnes) sont également parmi les pires au Québec.

Des projets inspirants

Des panélistes ont ensuite présenté des « projets inspirants ». La conseillère municipale de Morin-Heights Louise Cossette a parlé d’Habitat Morin-Heights. Le projet compte 30 appartements (3 1/2) adaptés aux personnes âgées, avec services de repas midi et soir, de la surveillance 24/7, et des espaces communs pour les résidents. Grâce à un terrain donné par la Municipalité, les logements seront construits au coeur du noyau villageois.

La préparation du dossier s’est faite en janvier 2019. En septembre 2022, les plans et devis ont été envoyés à 75 %. Les travaux devraient débuter en 2023 et la livraison est prévue pour juillet 2024. « Si Dieu le veut », a toutefois nuancé Mme Cossette.

Michel Bélanger et Sylvain Richer ont ensuite présenté VIV’en Logis, à Sainte-Adèle. Ce projet souhaite offrir 20 logements (3 1/2) à des personnes handicapées ayant un faible revenu. L’idée est issue des parents et de la communauté et a pris forme en 2018. Les coûts étaient estimés à 6 M$ avant l’inflation. Trouver un terrain abordable et adéquat, à distance de marche des services, a pris 3 ans d’efforts.

Pascal Bader est directeur général d’Habitation Saint-Adolphe-d’Howard. Cet organisme offre déjà 20 logements (3 1/2 et 4 1/2) à prix modique pour les aînés. « Mais les loyers sont appelés à augmenter », a-t-il déploré. Le bâtiment, cependant, nécessitera des rénovations de 650 000 $ d’ici 2025, selon une estimation de 2020.

On planifie la construction d’une seconde résidence depuis 2020. Celle-ci compterait 31 logements (surtout des 3 1/2) pour aînés autonomes ou en légère perte d’autonomie. Le coût total estimé était de 11,5 M$, mais lorsque les soumissions ont été ouvertes, il avait grimpé à environ 20 M$. « On attend, on espère un retour à la normale. Mais j’ai l’impression qu’il n’y aura pas de retour à la normale », a regretté M. Bader.

« Un parcours du combattant »

Dans tous les projets, l’appui de la Municipalité est indispensable, ont souligné les panélistes. « Si la Municipalité n’est pas là, il n’y a rien qui se fait », a a dit M. Bader.

La participation citoyenne est aussi essentielle. M. Genest a souligné que, à l’exception de M. Bader, ce sont des bénévoles qui pilotent ces projets. Ils doivent gérer des budgets de plusieurs millions de dollars. Et les projets peuvent prendre près d’une décennie à se réaliser. « Nous devons nous adapter constamment. C’est un parcours du combattant, un chemin de croix », a lancé M. Bélanger. Certains abandonnent en chemin, a-t-il indiqué.

Entretenir des liens auprès de tous les intervenants est aussi un défi. Plusieurs organisations doivent être impliquées pour que le projet se réalise. Mais celles-ci ont un roulement de personnel important, surtout après quelques années.

Les modèles auxquels les projets doivent se conformer manquent également de flexibilité, a déploré M. Bader. « On voulait un porche pour l’hiver, pour protéger les aînés quand ils arrivent avec leurs commissions et qu’il neige. On s’est fait dire : « Non, on ne finance pas ça. » », illustre-t-il. Il souhaite une approche adaptée à la réalité de chaque région.

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