Sainte-Adèle : Le Manoir des Pays-d’en-Haut ne sera pas démoli
Le comité de démolition de la Ville de Sainte-Adèle a refusé la demande de démolition pour le Manoir des Pays-d’en-Haut, situé au 220 rue Lesage, par un vote de deux contre un, lors de sa séance du 4 septembre.
Le conseiller municipal Richard Allard, qui préside le comité, a indiqué avoir reçu beaucoup de commentaires par courriel et avoir discuté avec de nombreux citoyens. Ceux-ci lui ont témoigné « leur attachement profond au bâtiment et à son usage social ». Il a comparé cet attachement à celui qu’ont les citoyens pour la Croix.
La salle, remplie de citoyens mobilisés pour sauver le bâtiment, a applaudi la décision. Durant la période de questions, le citoyen Steve Melanson, de la rue Richer, avait de nouveau remis une pétition s’opposant à la démolition, qui comportait cette fois 642 signatures.
État du bâtiment
Le comité de démolition s’était déjà rencontré en février dernier pour ce dossier. Il avait décidé de reporter sa décision, en raison « d’informations manquantes ou insatisfaisantes », a indiqué M. Allard. Ainsi, il avait demandé au propriétaire un avis impartial de l’état du bâtiment.
Depuis, une inspection par un ingénieur indépendant a révélé des problèmes d’infiltration et un déficit d’entretien qui ont mené à la dégradation du bâtiment. Les coûts pour remettre le bâtiment en état sont évalués à 2,5 M$. Cependant, selon M. Allard, « la preuve n’est pas faite que le bâtiment n’a aucune valeur structurelle ».
Valeur historique
Le comité de démolition souhaitait aussi évaluer la valeur patrimoniale du bâtiment. Il a donc mandaté le comité patrimoine, mais celui-ci « n’a pas été en mesure de prendre une décision formelle », a indiqué M. Allard. Vue la mobilisation citoyenne, le comité de démolition a choisi de « passer outre ».
Inauguré en 1917 par la Communauté des Soeurs de la Providence, le bâtiment est un ancien couvent occupé par les religieuses jusqu’en 1988. Celles-ci ont enseigné aux enfants de Sainte-Adèle. M. Allard a reconnu que « la valeur patrimoniale n’est pas démontrée hors de tout doute ». Toutefois, démolir le bâtiment serait priver les Adélois « du souvenir du passage des Soeurs de la Providence », a-t-il soutenu.
Avis opposé
Le conseiller David Huggins-Daines a également voté contre le permis de démolition. Cependant, le conseiller Gaëtan Gagné a voté en faveur. Selon lui, les coûts pour restaurer le bâtiment sont trop élevés. « Personne ne va acheter ça. » Le centre-ville doit aussi être densifié pour faire face à la crise du logement, a-t-il soutenu. « C’est dur à Sainte-Adèle. Les investisseurs se poussent. »
Siégeant sur le comité patrimoine, M. Gagné a aussi remis en doute la valeur patrimoniale du bâtiment. Il craint que celui-ci soit laissé à l’abandon, jusqu’à ce qu’il se détériore au-delà d’une restauration possible, ou même qu’il soit détruit par un incendie dans quelques années.
M. Allard a salué le « courage politique » de son collègue, pour avoir exprimé son opinion dissidente devant des citoyens mobilisés de l’avis contraire.
Par ailleurs, la greffière, Me Audrey Sénécal, a indiqué qu’il est possible de demander une révision de la décision dans les 30 jours, en transmettant une demande écrite au greffe.
Avenir du bâtiment
Utilisée comme maison de chambres, le Manoir des Pays-d’en-Haut a dû être évacué de ses résidents en raison d’infractions au code du bâtiment et à la sécurité incendie. Un promoteur, qui n’est pas le propriétaire du bâtiment, souhaitait démolir le bâtiment pour y construire un projet résidentiel de 4 bâtiments multifamiliaux de 3 étages comportant un total de 129 logements.
Sylvie Labelle, du Comité des citoyens unis pour la préservation du 220 rue Lesage et résidente du quartier, croit qu’un projet social devrait plutôt être construit à cet endroit, tout en mettant en valeur le bâtiment patrimonial. Le refus du permis de démolition crée une occasion favorable, croit-elle. « J’ai communiqué avec les propriétaires et des promoteurs qui pourraient être intéressés. […] Nous, on est même intéressés à travailler avec le promoteur. »
Selon elle, il est inconcevable que le bâtiment reste abandonné. « On a fait tellement de travail de mobilisation. […] On est déterminés à ce que ça bouge. »