Une sablière obtient 350 000$ de Financement agricole Canada

Par Éric-Olivier Dallard

Alors que certains exploitants de carrières et sablières de la région défrayaient la manchette, Excavation P. Bastien et fils inc. grugeait, dans le plus grand anonymat, un territoire immense de Saint-Adolphe-d’Howard. Accès a appris en exclusivité qu’il y a pratiquement un an jour pour jour, l’entreprise obtenait un important prêt de la part de Financement agricole Canada, sous prétexte de faire pousser des arbres.

Le 5 novembre 2009, devant le notaire Antoine Chabod, Pierre Bastien et son fils Pascal comparaissent et déclarent par écrit qu’ils exploitent une entreprise agricole. Ils obtiennent un prêt de 350 000$ et s’engagent par le fait même à «respecter et se conformer à toutes les lois et règlements à l’égard de la protection de l’environnement et obtenir tout certificat d’autorisation ou permis nécessaire de l’autorité compétente».

Mais ce prêt soulève quantité de questions. La compagnie opère une sablière en pleine zone résidentielle, grâce à un droit acquis obtenu il y a une cinquantaine d’années. Les exploitants ont fait fi du ruisseau qui traverse le secteur et les sédiments qu’on y retrouve ont fait l’objet de nombreuses plaintes. La municipalité a répliqué par des avis qui n’ont vraisemblablement pas porté fruits.

Au fil des ans, plusieurs tracteurs et autres mastodontes abandonnés sur les lieux ont rouillé en silence, laissant en guise de dernier soupir, de nombreux filets d’huiles à destination du lac Ste-Marie, un joyau aquatique de Saint-Adolphe-d’Howard. Excavation P. Bastien et fils inc. est d’ailleurs en infraction, tant au niveau du ministère de l’Environnement, du développement durable et des parcs (MDDEP), que du côté municipal. Ce secteur résidentiel compte une cinquantaine de maisons. Les bords de lac se faisant de plus en plus rares, les chalets retrouvés jadis font place à des résidences plus cossues et à des propriétaires désormais au fait des lois.

Un dossier connu

Au registraire des entreprises, Excavation P. Bastien et fils inc., constituée le 26 septembre 2005, dit se prêter à des activités de sablière et d’excavation. Joint au téléphone, Pascal Bastien a confirmé avoir obtenu un prêt pour, dit-il, «faire pousser des arbres ornementaux». Ce dernier a affirmé être en règle mais n’a pas voulu commenter davantage le dossier, disant ne pas vouloir «perdre de temps avec les journalistes».

Vérification faite, Saint-Adolphe-d’Howard vient d’expédier deux constats d’infraction en direction de l’exploitant. Un pour l’état général du terrain, l’autre pour construction de bâtiment sans permis préalable. Aucune demande de permis pour la plantation d’arbres n’a été acheminée à la municipalité. Par ailleurs, les activités d’excavation ne font pas partie du droit acquis.

Le maire Réjean Gravel affirme subir beaucoup de pression depuis le printemps dernier pour que la municipalité établisse des négociations avec la famille Bastien afin que celle-ci consente à agir en toute légalité. Le dossier est délicat. On parle d’une famille souche de Saint-Adophe-d’Howard. De peur de représailles, plusieurs riverains du lac Ste-Marie ont préféré garder le silence jusqu’à présent. «Nous sommes en pourparlers pour ramener la quiétude et protéger l’environnement immédiat», de déclarer Réjean Gravel. Celui-ci déplore du même souffle la latitude que confèrent les droits acquis. «Que le gouvernement nous donne un peu de moyens ou qu’eux prennent les moyens pour que ça change. On est menottés.»

Le député de Bertrand a lui aussi été interpellé dans le dossier. Malgré le fait que ce territoire ne fait pas partie de sa circonscription, Claude Cousineau a invité le MDDEP à enquêter dans le secteur. «On m’a montré des carcasses de camions et de bulldozers et des bidons d’huile abandonnés le long du ruisseau. Il n’y a pas de droits acquis pour polluer.»

Whissell se fait muet

Interpellé, le député d’Argenteuil et ex-ministre du Travail, David Whissell, n’a pas voulu commenter la situation. Le bloquiste Mario Laframboise préfère pour sa part investiguer davantage avant d’émettre quelque commentaire que ce soit. De son côté, Financement agricole Canada ne fait pas d’entrevue au sujet de dossiers de prêts spécifiques pour «protéger nos clients et par souci de confidentialité». L’organisme précise toutefois que l’agriculture comprend aussi la pisciculture et la foresterie. «Le fait de posséder une terre agricole ou une terre forestière et de la mettre en valeur permet à une personne d’être éligible à faire une demande de prêt avec FAC.»

Sur son portail, Financement agricole Canada se présente comme étant la seule institution financière au pays exclusivement vouée à l’agriculture, le plus important prêteur à l’industrie agricole canadienne. Avec un portefeuille de plus de 19,7 milliards de dollars, Financement agricole Canada vient de connaître une 17e année consécutive de croissance. Le MDDEP n’a pas été en mesure de nous indiquer le détail des infractions commises par Excavation P. Bastien et fils inc.

1 commentaire

  1. Faut tu être hypocrite et se foutre de tous les gens qui habite autour et ceux qui paye des taxes.

    Ou est cet argent?

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